Question de Mme GHALI Samia (Bouches-du-Rhône - SOC) publiée le 03/02/2011

Mme Samia Ghali attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration sur les violences contre les personnes. Les résultats enregistrés par l'Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales entre octobre 2009 et septembre 2010 ne trouvent pas de limite. Ce type de violence, le plus durement ressenti par nos concitoyens, est en effet en forte hausse. Le nombre de faits observés en 2010 atteint 461 294.

Alors que l'insécurité est régulièrement présentée comme une priorité du Gouvernement, les résultats confirment hélas l'échec de la politique actuelle en la matière. À Marseille, le 21 novembre 2010, suite à la mort d'un adolescent de seize ans lors d'un règlement de compte, le ministre annonçait le renforcement des effectifs policiers sur Marseille et les Bouches-du-Rhône. Le 22 novembre 2010, à Marseille, le Président de la République haussait le ton et déclarait une nouvelle fois la guerre aux délinquants. Le 27 janvier 2011, à Marseille, une personne âgée était agressée et retrouvée morte sur la voie publique suite à une tentative de vol de sac.

Les effectifs de police doivent donc être réellement augmentés.

Enfin, il semble que la réglementation sur la vente d'objets précieux en or qui garantit l'anonymat et la publicité faite autour sont une aubaine pour les délinquants et le vol dit « à la sauvette ».

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Réponse du Secrétariat d'État chargé de la fonction publique publiée le 02/03/2011

Réponse apportée en séance publique le 01/03/2011

Mme Samia Ghali. Monsieur le secrétaire d'État, en décembre dernier, j'interpellais le ministre de l'intérieur sous la forme d'une question écrite sur l'évolution inquiétante de la délinquance et la très nette augmentation du nombre de violences contre les personnes enregistrées par l'Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales entre octobre 2009 et septembre 2010.

Ce type de violence, le plus durement ressenti par nos concitoyens, est effectivement de nouveau fortement en hausse. Le nombre de faits observés atteint 461 294.

La lutte contre l'insécurité fut le principal thème de campagne de l'actuel Président de la République. Alors que celle-ci est régulièrement présentée comme une priorité du Gouvernement, les résultats confirment – hélas ! – l'échec de la politique actuelle en la matière.

Le 21 novembre dernier, à la suite de la mort d'un gamin de seize ans lors d'un règlement de compte, le ministre, flanqué du directeur général de la police nationale, des directeurs centraux de la police judiciaire et de la sécurité publique, annonçait le renforcement des effectifs sur Marseille et les Bouches du Rhône.

Le 22 novembre dernier, à Marseille, le Président de la République haussait le ton et déclarait une nouvelle fois la guerre aux délinquants.

Le 21 janvier, lors de la présentation des chiffres de 2010, il annonçait que les agressions sans arme contre les femmes sur la voie publique avaient connu une forte hausse de 13 %.

Le 27 janvier dernier, à Marseille, dans l'un des deux arrondissements dont je suis le maire, une personne âgée de 73 ans était agressée et succombait à ses blessures, pour le vol d'un sac ne contenant que 5 euros.

Nous en sommes là ; vous en êtes là, monsieur le secrétaire d'État !

Les Marseillais, et les Français en général, en ont assez des annonces que vous enfilez, les unes derrière les autres, à l'instar de toutes vos lois qui s'accumulent, sans que nous apercevions le début d'un résultat. Ce que nos concitoyens voient de moins en moins, en revanche, ce sont des policiers dans les rues.

En huit ans, vous avez diminué les effectifs de police de 10 000 hommes. Nous vous demandons de revenir sur cette politique et d'implanter une police de proximité que, par idéologie, vous avez fait disparaître de nos quartiers.

Oui, nous voulons d'abord des policiers dans nos villes, nos quartiers et nos rues, pour dissuader le vol et traquer les délinquants.

Enfin, je souhaite ajouter un détail, qui n'en est d'ailleurs pas un. Il est une mesure qui, sans rien coûter au budget de l'État, serait très utile : la modification de la réglementation sur la vente d'objets précieux, en particulier en or.

Comme vous tous, mes chers collègues, nous voyons fleurir des publicités commerciales garantissant l'anonymat sur la vente d'objets précieux. La facilité de la revente de ces objets, colliers, bracelets, et la publicité que l'on en fait sont une aubaine pour les délinquants et les auteurs de vols dits « à la sauvette », ces agressions, toujours plus violentes, dont le nombre augmente au fur et à mesure de la montée du prix de l'or.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Georges Tron, secrétaire d'État auprès du ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État, chargé de la fonction publique. Madame la sénatrice, avant de vous transmettre la réponse de mon collègue ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, je tenais à vous faire part de mes réflexions sur deux points de votre intervention.

Vous avez mentionné les faits tragiques qui ont eu lieu le 21 novembre dernier et qui ont abouti à la mort d'un jeune homme de 16 ans. Comme vous, j'ai une pensée pour les familles touchées par ces évènements, qui vivent un drame épouvantable. En tant que maire, j'ai été confronté à une situation analogue et j'ai eu l'occasion de m'occuper d'une famille ainsi endeuillée. Je connais donc bien la situation dont vous parlez.

Par ailleurs, je partage votre point de vue sur les achats et ventes d'or anonymes, qui ne laissent pas d'inquiéter. Ces opérations, qui se déroulent sur internet et garantissent l'anonymat, donnent lieu à de nouvelles formes de trafic et peuvent encourager les agressions et les actes graves de délinquance. Vous soulevez là une vraie question !

J'en viens à la situation de la délinquance dans votre ville de Marseille, sur laquelle vous avez interrogé le ministre de l'intérieur.

La politique menée par le Gouvernement produit des résultats concrets, même si divers exemples peuvent donner le sentiment d'une relative impuissance.

Vous avez cité les chiffres de l'Observatoire national de la délinquance ; pour ma part, je citerai ceux de la délinquance globale : celle-ci a reculé de 2 % en 2010, ce qui fait de cette année la huitième année de baisse consécutive de la délinquance depuis 2002. Le Gouvernement veut, à cette occasion, rendre hommage à nouveau aux actions menées et à l'engagement sans faille des policiers et des gendarmes.

La lutte contre les atteintes volontaires à l'intégrité physique figure parmi les toutes premières priorités du ministre de l'intérieur. Ce phénomène est d'ailleurs commun à l'ensemble des sociétés développées.

La mobilisation des forces de l'ordre permet cependant d'obtenir de premiers résultats, et l'augmentation constatée depuis 2002 est sans commune mesure avec celle observée entre 1997 et 2002, qui était, je le rappelle, de 60,8 %. Cette hausse, qui représente 2,5 % en 2010, est en effet de mieux en mieux contenue – même si, je le concède, c'est encore trop... – et le phénomène est désormais circonscrit géographiquement.

Vous avez rappelé, notamment, la fusillade dramatique qui s'est produite le 21 novembre dernier, au cours de laquelle un jeune homme de 16 ans a été tué et un enfant de 11 ans, totalement innocent, grièvement blessé. Pour ces familles, ainsi que pour la collectivité nationale, c'est une immense épreuve, d'autant plus que cette mort si injuste trouve sa source dans des règlements de comptes, des trafics de stupéfiants et des rivalités de bandes dans les quartiers.

Le ministre de l'intérieur s'est rendu sur place à deux reprises pour donner des instructions claires au préfet et aux forces de l'ordre.

Je rappelle les quatre mesures annoncées par Brice Hortefeux à cette occasion : le renforcement des effectifs liés aux renseignements accrus avec l'affectation, dès le 1er décembre dernier, de cinq policiers spécialisés supplémentaires au service départemental d'information générale ; l'amélioration de la sécurisation et de la surveillance des quartiers sensibles grâce à la mise en place de deux unités de CRS, soit 150 CRS supplémentaires ; le renforcement des équipes d'enquête dédiées au trafic d'armes, avec la nomination de six policiers supplémentaires, et dont le double objectif est d'élucider tous les règlements de compte et de démanteler les gangs qui y sévissent ; une coordination renforcée de l'action du groupe d'intervention régionale de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur centrée sur la lutte contre le blanchiment, en lien étroit et permanent avec l'autorité judiciaire.

En outre, le préfet des Bouches-du-Rhône a mis en place un plan de lutte contre les armes à feu et, d'une manière générale, contre les trafics. Ainsi, depuis le 21 novembre dernier, date de ce drame, 207 opérations ont été menées quotidiennement dans l'agglomération marseillaise. Elles ont déjà permis de saisir 70 armes à feu, 65 kilos de cannabis et 3,5 kilos de cocaïne ; par ailleurs, 587 personnes ont été interpellées pour diverses infractions.

Madame la sénatrice, sous l'autorité du Président de la République et du Premier ministre, nous sommes dans l'action. Les Français doivent le savoir : pour assurer leur sécurité au quotidien, nous sommes toujours à l'offensive.

M. le président. La parole est à Mme Samia Ghali.

Mme Samia Ghali. La diminution de la délinquance que vous évoquez, monsieur le secrétaire d'État, n'est pas liée à la baisse du nombre des agressions, mais au fait que les victimes ne déposent plus plainte. En effet, en l'absence de commissariats de proximité, il faut parfois parcourir plusieurs dizaines de kilomètres pour déposer une plainte, ce qui est souvent compliqué pour les personnes âgées.

Vous avez ensuite cité les mesures prises, à Marseille, au cours du dernier trimestre de 2010. Il est vrai que le ministre de l'intérieur est venu sur place afin d'annoncer, avec tambours et trompettes, la mise en place d'effectifs supplémentaires de police. Or, quinze jours plus tard, ces policiers étaient partis.

Pour ma part, j'estime qu'il ne faut pas fixer de rendez-vous à des voyous. En l'occurrence, ces derniers s'étaient organisés, entre-temps, pour entreposer leurs marchandises dans des garde-meubles en attendant que la police reparte. Ils savaient en effet que ces policiers ne resteraient pas sur le territoire, et ce fut effectivement le cas. À Marseille, nous connaissons donc les mêmes problèmes qu'à la fin de l'année 2010.

Certes, 60 policiers supplémentaires ont été nommés. Mais que peut-on faire avec pareil effectif ? Dans certains quartiers, des enfants de huit ou dix ans n'ont jamais vu un seul uniforme. C'est inacceptable !

Je rappelle que de nombreux auteurs d'agressions, à l'instar de ceux qui ont tué la vieille dame dont je parlais, sont des mineurs. La peur de l'uniforme permettrait de canaliser de tels comportements. Mais, pour que ces jeunes aient peur de l'uniforme, encore faudrait-il qu'ils en voient !

Vous avez dit, monsieur le secrétaire d'État, que la police faisait son travail. Je le confirme : ceux qui sont en poste sur notre territoire, avec lesquels je communique régulièrement, font tout ce qu'ils peuvent. Mais ils manquent de moyens : eux-mêmes disent qu'ils ne sont pas assez nombreux. Et lorsqu'ils sont en effectif suffisant, ce qui arrive parfois, ils n'ont pas de véhicules pour se déplacer ! Il suffit d'appeler la police pour le savoir : on vous répond qu'il est impossible de se rendre sur place faute de voiture...

Au XXIe siècle, il est inacceptable que la police n'ait pas les moyens, notamment humains, d'accomplir son travail.

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