Question de M. CARRÈRE Jean-Louis (Landes - SOC) publiée le 04/03/2011

Question posée en séance publique le 03/03/2011

Concerne le thème : Situation en Afghanistan

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Carrère, pour le groupe socialiste.

M. Jean-Louis Carrère. Moi, je souhaite que les journalistes fassent leur métier, tout simplement !

M. Roland Courteau. Très bien !

M. Alain Gournac. Voilà !

M. Jean-Louis Carrère. Avec ce débat, on entre dans le vif du sujet : le domaine réservé, peut-être même exclusif, du Président de la République !

Monsieur le ministre, le retour dans l'OTAN, la très grave surdité face aux évolutions du Maghreb, la faillite de la politique africaine et, surtout, la docilité face aux impératifs de la politique extérieure des États-Unis, notamment en Afghanistan, voilà ce que personnellement je relève !

Face au délitement de la politique extérieure de la France, je n'irai pas par quatre chemins. Je l'ai déjà indiqué ici le 26 novembre 2010 et encore le 18 janvier 2011 : il nous faut aller vers un retrait progressif, négocié et planifié d'Afghanistan. Cela constitue notre position constante depuis plusieurs années.

Sous sa forme actuelle, notre engagement militaire dans le bourbier afghan ne peut pas réussir, malgré le courage et l'esprit de sacrifice de nos soldats. D'ailleurs, quoi qu'on en dise, nous ne sommes pas associés à l'élaboration de notre stratégie !

M. Roland Courteau. C'est vrai !

M. Jean-Louis Carrère. La solution, si solution il y a, monsieur le ministre, est politique, et non pas militaire ! Il faut sortir de cette logique infernale avant que nous ne soyons obligés, comme tant d'autres naguère, d'abandonner piteusement l'Afghanistan à son sort, les enfants et les femmes afghanes qui vivent sous le joug de l'obscurantisme.

M. Roland Courteau. Très bien !

M. Jean-Louis Carrère. Mais, puisque je connais aussi le goût de certains pour la polémique politicienne, je signale tout de suite que, dans la mesure où nous sommes des gens responsables, nous n'ambitionnons pas un retrait brutal du jour au lendemain de toutes nos forces.

M. le président. Mon cher collègue...

M. Jean-Louis Carrère. Nous souhaitons que s'opère une négociation, une planification avec nos alliés et avec les autorités afghanes. L'idéal serait d'ailleurs…

M. le président. Il faut conclure !

M. Roland Courteau. C'est intéressant, monsieur le président !

M. Jean-Louis Carrère. … que ce retrait émane d'une volonté politique européenne commune.

M. le président. Mon cher collègue, concluez ! (M. Alain Gournac approuve.)

M. Jean-Louis Carrère. Monsieur le ministre, ma question sera directe et j'espère qu'il en sera de même de votre réponse : le Gouvernement français…

M. François Trucy. Ce n'est pas sérieux !

M. Jean-Louis Carrère. … et, forcément, le Président de la République…

M. le président. Vous êtes en train de manger votre capital !

M. Jean-Louis Carrère. … indiqueront-ils que le retrait militaire d'Afghanistan débutera en 2011 ? Pour nous, il faut non seulement le dire, mais aussi le faire ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

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Réponse du Ministère de la défense et des anciens combattants publiée le 04/03/2011

Réponse apportée en séance publique le 03/03/2011

M. Gérard Longuet, ministre. Monsieur le sénateur, vous avez évoqué de très nombreux sujets, mais je me limiterai à votre seule question extrêmement précise.

Dans le cadre de la résolution 1386, les troupes françaises de l'Alliance ont vocation à rétablir la sécurité et à transférer les responsabilités au gouvernement afghan.

Deux élections présidentielles et des élections législatives ont eu lieu. C'est la lente et difficile reconstruction d'un État. Cela me permet, entre parenthèses, de dire tout le bonheur que l'on a d'avoir un État qui tienne la route !

Notre mission se traduit donc par une politique de transfert de responsabilités et une « afghanisation » de la sécurité, secteur par secteur. Le Joint Afghan Nato Inteqal Board, ou JANIB, pour employer l'un des nombreux acronymes utilisés en matière de politique de défense, en France comme à l'étranger, évalue chaque situation.

Pour répondre précisément à votre question, ce comité dont nous faisons partie – ce qui signifie très clairement que nous sommes associés aux décisions les plus importantes de la conduite des opérations de paix et de reconstruction de l'État en Afghanistan – examinera, nous l'espérons profondément et nous le proposerons, la situation du district de Surobi en 2011.

Mais le transfert des responsabilités dans ce district ne s'effectuera qu'en accord avec le comité, la décision définitive appartenant au Président Karzaï. Je vous confirme que nous avons la volonté de l'afghanisation et que, à la fin de l'année 2011, ce comité sera saisi.

Toutefois, il serait bien imprudent de tirer aujourd'hui une conséquence définitive, car nous sommes dans un système dialectique, au sein duquel nos actions sont naturellement contrebattues. C'est la raison pour laquelle je ne puis, en cet instant, être plus catégorique sur cette date, même si, en effet, elle correspond au calendrier souhaité et au résultat obtenu sur le terrain par notre armée. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. Alain Gournac. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Carrère, pour la réplique.

Je vous prie d'être bref !

M. Jean-Louis Carrère. Je le serai, monsieur le président !

Monsieur le ministre, je crois surtout qu'il faut imiter les Américains lorsqu'ils font des choses justes.

Nous, socialistes, ne partageons pas l'attitude du Gouvernement français à propos de l'Afghanistan et du commandement intégré de l'OTAN. En revanche, s'agissant du débat à l'intérieur du pays, nous partageons l'opinion américaine et l'attitude du Président Obama.

Nous souhaitons que se tienne au Parlement un véritable débat sanctionné par un vote sur l'opportunité de maintenir nos troupes en Afghanistan et, surtout, que le Président de la République entende, non seulement en France, mais aussi en Europe, l'opinion publique ! Elle souhaite que nous quittions au plus vite le bourbier afghan et que nous substituions à l'action militaire une action plus politique.

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