Question de Mme CERISIER-ben GUIGA Monique (Français établis hors de France - SOC) publiée le 04/05/2011

Question posée en séance publique le 03/05/2011

Concerne le thème : La France et l'évolution de la situation politique dans le monde arabe

Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ma question porte sur l'état de nos relations avec la Syrie.

Je crains que la France, en dépit de ses efforts, ne paie aujourd'hui les choix calamiteux du début du quinquennat.

Le fait que le président Sarkozy ait renforcé ou renoué les relations avec les pires dictateurs du monde arabe que sont Khadafi ou Bachar el-Assad, leur rendant ainsi une légitimité internationale, était une erreur.

Le fait d'établir des liens avec la Syrie en marge de la diplomatie officielle l'était également – je rappelle à ce propos les innombrables missions de Claude Guéant à Damas lorsqu'il était secrétaire général de l'Élysée.

En quoi ces accords, passés hors de tout contrôle du Parlement, ont-ils consisté ? Nous voudrions savoir dans quelle mesure ils pèsent sur la politique menée actuellement.

En apparence, la politique française a aujourd'hui radicalement changé, et nous approuvons totalement le vote de la résolution du Conseil des droits de l'homme de l'ONU, qui demande à la Syrie de mettre un terme à la violation des droits de l'homme contre son peuple, et qui met en place une commission d'enquête.

De même, nous approuvons les déclarations du ministre des affaires étrangères et celles du représentant permanent de la France auprès des Nations unies.

Toutefois, face à une répression qui a pris la forme d'actes de guerre caractérisés contre les habitants des villes de Deraa, Douma et Banyas, entres autres, et d'arrestations massives ces deux derniers jours, nous estimons que la France doit aller au-delà des déclarations.

Le Gouvernement entend-il prendre des mesures contraignantes contre Assad, son entourage et les responsables de la répression, en atteignant leurs avoirs financiers, leurs propriétés, et en les empêchant d'entrer sur notre territoire ?

Quelles sanctions défendrez-vous aux prochaines réunions du Conseil de sécurité de l'ONU ?

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Réponse du Ministère chargé de la coopération publiée le 04/05/2011

Réponse apportée en séance publique le 03/05/2011

M. Henri de Raincourt, ministre. Bien qu'elle ne soit pas si éloignée dans le temps, la période à laquelle vous faites référence était fondamentalement différente de celle que nous connaissons aujourd'hui, madame la sénatrice. Cela justifie, me semble-t-il, les positions successives adoptées par le Gouvernement français.

Il s'agissait en l'occurrence de discuter d'État à État. Et, lorsque nous tentons de contribuer modestement à la création d'un environnement favorable à la paix dans cette partie du monde – souvenons-nous plus particulièrement du Liban – je ne vois pas comment nous pourrions nous passer d'une discussion avec la Syrie. (M. Robert del Picchia applaudit.)

Nous n'avons jamais dépassé ce qu'il était convenable de faire en matière de relations diplomatiques.

S'agissant maintenant de la situation actuelle, la France condamne sans réserve, de la manière la plus solennelle qui soit, toutes les exactions. Elle a demandé à la Syrie que cessent les violences. Nous avons convoqué l'ambassadrice de Syrie à Paris, et la réciproque s'est déroulée à Damas. Nous essayons également de mobiliser autour de nous nos partenaires du Conseil de sécurité, mais sans grand succès jusqu'à présent.

À propos du Conseil des droits de l'homme, nous partageons votre sentiment, madame la sénatrice : nous militons pour que la candidature de la Syrie ne soit pas acceptée.

Enfin, nous travaillons, au sein de l'Union européenne, à la mise en place de sanctions fortes telles qu'un embargo sur les armes, le gel de l'accord d'association, la révision de la politique de coopération entre l'Union européenne et la Syrie ou encore des sanctions individuelles contre les responsables de la répression sanglante de ces dernières semaines.

Je puis vous assurer, madame, que le Gouvernement français n'a pas, à l'égard de la Syrie, une position différente de celle qu'il exprime de façon générale au cours de ce printemps des peuples qui se battent pour plus de liberté et de dignité. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga, pour la réplique.

Mme Monique Cerisier-ben Guiga. J'ai bien entendu votre réponse, monsieur le ministre, et je vous ferai remarquer que je n'ai jamais mis en cause les prises de position de la France. Mais des prises de position verbales aux actes, il est un pas qu'il faut aujourd'hui franchir…

Dès maintenant, les biens et avoirs de tous les responsables syriens en France doivent être gelés. Cela concerne directement le général Manaf Tlass, responsable des exactions à Banyas. La diplomatie de connivence, qui était un peu la règle ces derniers temps dans les relations entre Paris et Damas, doit absolument cesser.

Enfin, la France doit demander au Conseil de sécurité de l'ONU la comparution de Bachar el-Assad et des responsables de la répression devant la Cour pénale internationale. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

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