Question de M. BLANC Jacques (Lozère - UMP) publiée le 10/06/2011

Question posée en séance publique le 09/06/2011

M. Jacques Blanc. Monsieur le Premier ministre, je sais votre volonté d'aider nos agriculteurs, et particulièrement nos éleveurs, à traverser la crise dramatique provoquée par la sécheresse actuelle, pire encore que celle de 1976.

Il fallait des gestes forts. Le Président de la République en a fait un ce matin, en Charente, en se rendant dans une exploitation agricole pour exprimer la solidarité de la nation.

M. René-Pierre Signé. La pommade…

M. Jacques Blanc. Mme la ministre chargée de l'écologie, au lendemain d'un déplacement en Lozère, a réuni le comité sécheresse et apporté un certain nombre de réponses.

Le ministre de l'agriculture s'est particulièrement mobilisé, tant à Paris, avec l'ensemble des professionnels, qu'à l'échelon européen. Un certain nombre d'annonces ont été faites.

Les agriculteurs eux-mêmes ont établi des solidarités. En Lozère, par exemple, les éleveurs de montagne sont allés chercher de la paille dans les départements du Sud.

À ma grande satisfaction, vous avez indiqué à l'instant, monsieur le Premier ministre, que la solidarité nationale jouerait, pour un montant de l'ordre de 1 milliard d'euros, selon diverses modalités.

Il est en effet indispensable de lever les blocages, notamment financiers, que subissent les agriculteurs. Ainsi, les éleveurs, déjà étouffés par leurs emprunts, ne peuvent ni nourrir leurs animaux ni décapitaliser, les abattoirs et le négoce étant engorgés. Il faut leur permettre de passer ce cap.

Pouvez-vous, monsieur le Premier ministre, confirmer les propos que vous avez tenus ?

Par ailleurs, quelles leçons peut-on tirer, pour demain, de cette crise ? Je pense, par exemple, à la constitution de réserves collinaires, à la mise en œuvre de nouvelles modalités d'irrigation, au développement de productions plus économes en eau. Quelles voies le Gouvernement explore-t-il pour assurer l'avenir de l'agriculture, question qui relève de l'intérêt public ?

M. Jean-Pierre Raffarin. Absolument !

M. Jacques Blanc. En effet, en défendant les agriculteurs, c'est toute notre société que nous défendons ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)

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Réponse du Premier ministre publiée le 10/06/2011

Réponse apportée en séance publique le 09/06/2011

M. François Fillon, Premier ministre. Monsieur le sénateur, les agriculteurs frappés par la sécheresse ont droit à la solidarité nationale.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Comme les ouvriers licenciés pour cause de délocalisation…

M. François Fillon, Premier ministre. Ils y ont droit pour des raisons humaines, car cette sécheresse va plonger de très nombreuses familles dans une situation financière extrêmement difficile et provoquer des tragédies.

Ils y ont droit aussi pour des raisons économiques, car les exploitations agricoles produisent de la richesse au même titre que les entreprises, que nous avons également aidées à traverser la crise économique et financière.

Ils y ont droit pour des raisons stratégiques, enfin, car notre indépendance et notre sécurité alimentaires sont en cause.

C'est dans cet esprit que le Président de la République a affirmé, ce matin, sa volonté de faire jouer la solidarité nationale au-delà des mesures d'urgence que j'ai évoquées tout à l'heure, concernant le transport ou la lutte contre la spéculation sur les fourrages. J'évalue le montant de cet effort à environ 1 milliard d'euros, sachant que le chiffrage définitif dépendra des demandes qui seront formulées par les agriculteurs.

Cette solidarité s'exprimera, tout d'abord, au travers de la mobilisation du Fonds national de garantie des calamités agricoles, qui sera abondé en tant que de besoin, pour lui permettre de traiter les dossiers. Le Président de la République a annoncé, ce matin, un premier versement de 200 millions d'euros destiné à faire face aux situations les plus urgentes. La première réunion de la commission chargée de prendre les décisions en la matière aura lieu la semaine prochaine. C'est d'ailleurs la première fois, dans l'histoire de notre pays, que cette commission est mise en place aussi rapidement pour répondre à une situation de crise. Les premiers versements aux agriculteurs concernés pourront ainsi intervenir au début du mois de septembre.

La solidarité nationale se traduira, ensuite, par des exonérations de taxe sur le foncier non bâti, pour un montant d'environ 350 millions d'euros. Cette mesure sera bien entendu prise en charge par l'État, et ne pèsera donc aucunement sur les collectivités locales.

Enfin, le Gouvernement a décidé de reporter d'un an l'échéance des emprunts contractés par les agriculteurs en 2010 dans le cadre du plan exceptionnel de soutien à l'agriculture qui avait été mis en place pour faire face à la crise à laquelle était confrontée notre économie, en particulier le secteur agricole.

Je souligne qu'il s'agit bien là d'aides directes, accordées selon des procédures acceptées par l'Union européenne dans le cadre des règlements communautaires. Le Président de la République a indiqué ce matin que nous ne nous laisserions pas aller à prendre des mesures démagogiques, comme cela a pu être le cas dans le passé quand on a versé aux agriculteurs des aides dont le remboursement leur est maintenant réclamé parce qu'elles n'étaient pas autorisées par l'Union européenne.

Nous avons demandé, parallèlement, aux acteurs privés de se mobiliser. Ainsi, les banques prêteront 700 millions d'euros à des taux préférentiels aux agriculteurs afin d'assurer la trésorerie des exploitations. En outre, la Mutualité sociale agricole a d'ores et déjà accepté le report de l'échéance de juin pour les éleveurs.

Cependant, comme vous l'avez très justement souligné, monsieur le sénateur, cette situation d'urgence peut se reproduire, notamment si nous sommes confrontés à des évolutions climatiques durables.

Le Président de la République a donc annoncé ce matin l'élaboration d'un plan de cinq ans pour la mobilisation de la ressource en eau, à laquelle le Parlement sera naturellement associé.

M. Jacques Blanc. Très bien !

M. François Fillon, Premier ministre. Il s'agit de faciliter la réalisation des retenues collinaires tout en respectant les particularités environnementales de chaque région et d'engager une réflexion avec la profession agricole, pour examiner comment faire évoluer, dans certaines régions, les pratiques et les productions afin de les adapter à des changements climatiques qui pourraient être durables.

Vous le voyez, la solidarité à l'égard de nos agriculteurs sera totale. Elle s'exercera dans le cadre des contraintes financières actuelles, ce qui nous amènera à redéployer des crédits pour respecter les enveloppes votées par le Parlement. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)

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