Question de M. DOMINATI Philippe (Paris - UMP) publiée le 02/08/2012

M. Philippe Dominati attire l'attention de M. le ministre délégué auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche, sur les dysfonctionnements récurrents dans les transports en commun parisien.

En 2011, 34 % des trains de la ligne B du RER étaient considérés comme irréguliers par l'association SaDur. Un dysfonctionnement sur cinq était une suppression. La qualité du service des transports en commun parisien demeure un problème. La situation est celle-ci : une hausse de 1,7 millions d'usagers en quelques années, alors que le réseau reste en l'état, voire se détériore. La durée de vie moyenne du matériel est de trente ans, le matériel actuel a en moyenne vingt-six ans selon le rapport de la Cour des comptes de novembre 2010. Les usagers le ressentent avec une hausse croissante des accidents, des prix du transport, de l'insécurité au sein des wagons alliés à un manque de propreté des transports.

Même si les entreprises concernées ont entrepris des rénovations, les passagers se sentent tout de même délaissés :
324 incidents de transports ont été recensés dans les pages du Parisien en 2011. Ce chiffre est en constante hausse car 272 ont été comptabilisés en 2010 et 142 en 2009. À ceux-ci viennent s'ajouter les mouvements sociaux qui paralysent les transports en commun.

Il souligne que la ligne de RER B est gérée par quatre entreprises, bientôt cinq avec la société du Grand Paris. Celles-ci disposent de centres de commandements distincts et chaque centre est dans une station différente. Il n'y a pas de liens entre ces entreprises sur le terrain.

Le monopole d'État ne fonctionne pas. La solution serait d'ouvrir les réseaux de transport à la concurrence. Cela pourrait résoudre nombre de problèmes des passagers que ce soit en terme de qualité de service comme de coût. Nos voisins l'ont fait et les résultats sont surprenants sur la qualité du transport. Nos voisins anglais ont développé leur réseau dans le cadre du Grand Londres. Il faut s'en inspirer et non pas tout faire pour prolonger le monopole de la RATP, spécificité française en Europe.

Il lui demande ce qu'il compte faire pour aider ces usagers, ce qu'il compte faire face au problème de gouvernance, face au problème de superposition, d'organisation et d'articulation de ces structures qui engendrent des coûts et des dysfonctionnements qui s'accumulent et qui nuisent aux usagers.

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Réponse du Ministère chargé des transports, de la mer et de la pêche publiée le 30/01/2013

Réponse apportée en séance publique le 29/01/2013

M. Philippe Dominati. Monsieur le ministre, en 2012, 36 % des trains de la ligne B du RER étaient considérés comme irréguliers par l'association d'usagers SaDur : c'était un nouveau record !

La qualité du service des transports en commun parisiens est un véritable cauchemar au quotidien : incidents en tout genre, prix toujours en hausse, sentiment d'insécurité croissant, propreté qui laisse à désirer... Le Parisien a recensé 142 incidents en 2009, 272 en 2010, 324 en 2011. Je ne parle ici que des incidents, monsieur le ministre, et non des mouvements sociaux, qui, on le sait, ne sont pas rares !

Le diagnostic n'a pas été pris en compte. Sur cette période, on a mesuré un accroissement de 1 700 000 du nombre d'usagers, tandis que la durée de vie moyenne du matériel roulant a été estimée par la Cour des comptes à vingt-six ans, sachant qu'elle ne peut excéder trente ans dans ce type d'activité.

Je sais que vous êtes un élu local attaché au bon fonctionnement des transports de sa région, monsieur le ministre. Dans ce domaine, les Parisiens ont malheureusement l'habitude d'être maltraités.

Depuis la fin de la guerre, l'État exerce un monopole. Nous vivons dans la seule région de France où cette particularité perdure. Ce système est unique en Europe, voire au monde : pas moins de quatre sociétés d'État gèrent la ligne B du RER, dont le fonctionnement est défaillant.

J'ajoute que, lors de l'élaboration du dernier rapport, le maire de Paris n'a même pas été auditionné. Il n'a pas été impliqué dans le développement de la société du Grand Paris. Seuls deux adjoints ont été consultés.

Cette société a été constituée sur l'initiative du Président Sarkozy pour essayer de résoudre, dans l'urgence, les problèmes de transports parisiens. La voie choisie ne paraît pas la plus efficace puisque, encore une fois, le monopole public a été retenu. Pour autant, elle avait le mérite de fixer un objectif clair.

Monsieur le ministre, il semblerait que le gouvernement auquel vous appartenez hésite. Il n'a pas affecté le milliard d'euros nécessaire au budget pour 2013, comme cela était prévu. Le 3 janvier, le Premier ministre a annoncé qu'il rendrait un arbitrage sur un certain nombre de dispositions. Mais pendant ce temps-là, les Parisiens attendent...

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche. Monsieur le sénateur, votre question étant dense, je vais répondre à vos interrogations qui concernent mon domaine de compétence.

Vous semblez regretter le monopole d'État. Vous le constaterez cependant, au fil de ma réponse, le système peut avoir des conséquences heureuses et conduire à une prise en charge efficace. C'est en tout cas ce à quoi je m'emploie depuis maintenant quelques mois.

Cela étant, vous en conviendrez, en la matière, le passif est ancien. Il ne peut donc être imputé à ce gouvernement, lequel, depuis sa constitution, s'attache à réorienter la politique des transports pour la rendre plus efficace. Nous sommes très attachés à ce que vous considérez être un droit pour les Parisiens et les Franciliens, c'est-à-dire la qualité et la régularité du service. Je vous l'accorde volontiers : le transport du quotidien doit effectivement être une priorité.

La commission du développement durable et de l'aménagement du territoire de l'Assemblée nationale organise demain une table ronde sur les transports en Île-de-France avec les présidents de la SNCF, de la RATP, de RFF, la direction générale du STIF et l'association des usagers des transports d'Île-de-France, ce dont je me félicite. Je vous précise que j'ai eu hier un entretien avec les présidents de la SNCF et de RFF.

Je veux le souligner, les dysfonctionnements que vous avez évoqués peuvent être d'origine tout à fait différente. Les causes, multiples, ne tiennent pas nécessairement à des défaillances matérielles. Quoi qu'il en soit, j'ai demandé aux dirigeants de la RATP, de la SNCF et de RFF d'avoir comme préoccupation de limiter au maximum les conséquences des dysfonctionnements. À cette fin, je développe également des relations avec le syndicat des transports d'Île-de-France, qui rassemble la région et les départements et qui est l'autorité organisatrice des transports franciliens.

Les nouveaux contrats conclus entre le STIF et les deux entreprises publiques RATP et SNCF, portant sur la période 2012-2015, signés au printemps 2012, sont marqués par un renforcement des exigences du STIF, notamment en matière de qualité de service et de suivi des programmes d'investissement. Sachez que le niveau d'exigence dans la réalisation de l'offre a été fortement relevé. L'accent a notamment été mis sur la ponctualité et la régularité ; un système de bonus-malus renforcé a été instauré pour les deux entreprises. Je partage les objectifs affichés par le STIF.

Vous critiquez aussi le retard pris dans le renouvellement du matériel roulant. Cofinancé à parité par le STIF et les entreprises, un programme de rénovation portant sur les 119 rames de la ligne B du RER, soit la totalité du parc, est en cours et s'achèvera en 2014.

Par ailleurs, du point de vue de l'infrastructure, des travaux de modernisation, financés par l'État et la région, sont en cours sur la ligne B au nord. Ce projet, qui sera mis en service en 2013, a pour objet général d'améliorer les conditions de transport des voyageurs. Les travaux permettront au RER B de circuler sur deux voies qui lui seront exclusivement dédiées, améliorant ainsi la ponctualité. La desserte sera simplifiée et renforcée et deviendra omnibus. Aux heures de pointe, un train partira toutes les trois minutes de la gare du Nord pour desservir alternativement l'aéroport Paris-Charles-de-Gaulle et Mitry-Claye.

Dans la continuité de ces actions, le STIF a lancé les travaux d'élaboration du schéma directeur de la ligne B du RER au sud, afin d'améliorer la qualité de service, de consolider l'exploitation. L'État appuiera ce projet. Il est aussi indispensable, comme pour les lignes C et D, qu'une action globale soit mise en œuvre en termes tant d'exploitation que d'investissement, afin d'améliorer le fonctionnement de cette ligne.

Actuellement - tel était l'objet de notre rencontre d'hier -, en lien avec la région et le STIF, le Gouvernement réfléchit aux moyens d'accélérer l'investissement dans les trains du quotidien en Île-de-France.

Pour ce qui concerne la gestion de la ligne B du RER, le STIF incite les entreprises à poursuivre leur action pour en unifier l'exploitation. La relève en gare du Nord a ainsi été supprimée. Dans la continuité de cette opération, la RATP et la SNCF vont mettre en place cet été un centre de commandement unique de la ligne. De la même manière, j'ai demandé qu'une réflexion soit lancée sur la ligne A du RER.

S'agissant de la société du Grand Paris, vous en connaissez les limites : elle a vocation non pas à gérer une ligne, mais à construire le réseau de métro automatique. En l'occurrence, Cécile Duflot et moi-même ne sommes pas dans l'indécision. Nous essayons de hiérarchiser les interventions et les investissements qui sont utiles au voyage et au transport du quotidien pour les Franciliens et les Parisiens.

La polémique relative au milliard d'euros n'a pas lieu d'être puisque, comme les comptes le précisent bien, cette somme ne sera nécessaire qu'à l'horizon de 2014, voire même de 2015. Elle sera donc provisionnée au moment opportun. L'important, c'est à la fois de mobiliser rapidement tous les moyens requis pour des réalisations, des aménagements ponctuels mais utiles et de faire avancer le schéma du Grand Paris.

Monsieur le sénateur, vous auriez pu interroger sur ce point Cécile Duflot, qui est précisément chargée du dossier du Grand Paris. Cela étant, pour ce qui concerne le volet transport, nous travaillons de concert. Sachez bien que, conformément à l'engagement du Président de la République, le transport du quotidien, sa régularité, son efficacité sont, pour nous, des préoccupations majeures.

Vous avez souligné que, en tant que ministre chargé des transports, j'étais attentif à la qualité du service dans ma région. J'en conviens, mais je porte une même attention à cette question dans toutes les régions, et particulièrement en Île-de-France, laquelle, on le sait, doit disposer d'un service public de qualité en raison de l'intensité du trafic. Je m'y attache et je suis heureux de pouvoir compter sur votre mobilisation.

M. le président. La parole est à M. Philippe Dominati.

M. Philippe Dominati. Monsieur le ministre, je vous le concède bien volontiers, vous n'êtes pas responsable de l'état catastrophique des transports en Île-de-France. Vous venez seulement de prendre vos fonctions. Je suis donc ravi d'avoir pu vous sensibiliser à la situation spécifique de cette région.

Votre réponse est certes fournie, mais c'est celle du STIF, et nous la connaissons, nous, élus parisiens ! M. Huchon est à la tête de la région Île-de-France et préside le STIF depuis deux mandats, mais rien ne change. On nous dit qu'on va améliorer la qualité du service, rénover le matériel, mais selon le bilan réalisé par la Cour des comptes, celui-ci a été mis en service voilà vingt-six ans !

Pour ce qui concerne le Grand Paris, provisionner le milliard d'euros prévu ne constituerait pas un problème, cette somme n'étant pas nécessaire tout de suite. Mais les Parisiens, eux, paient d'ores et déjà, dès cette année, la taxe spéciale d'équipement, soit plus de 10 euros par foyer. C'est la réalité ! Pourquoi le Gouvernement ne leur rend-il pas cet argent ?

Paris est maltraité ! Vous protégez en partie les grandes sociétés nationales en cause. Or, lorsque vous étiez dans l'opposition, vous reconnaissiez que le système engoncé, bloqué, méritait d'être rénové.

Pourquoi confier à la société du Grand Paris le soin de s'occuper de la construction du métro automatique, d'établir un budget d'un montant de plus ou moins 10 milliards d'euros - tel est d'ores et déjà le dépassement du budget initial prévu -, alors que la RATP pendant ce temps manque de moyens ? Simplifiez ! Donnez mission à la RATP, société nationale dont 98 % de l'activité est régionale, de terminer ce réseau également régional. Autorisez l'exploitation de lignes de bus par des compagnies privées, ce qui allégera le fardeau de la RATP. Il ne faut pas être spécialiste en la matière pour savoir que, dans la France entière, dans l'Europe entière, dans le monde entier, les lignes de bus ne sont pas monopole d'État.

Telles sont les deux idées que je voulais vous soumettre, à vous, ministre chargé des transports.

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