Question de Mme ANGO ELA Kalliopi (Français établis hors de France - ECOLO) publiée le 12/10/2012

Question posée en séance publique le 11/10/2012

Mme Kalliopi Ango Ela. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur.

La presse s'est fait l'écho, il y a environ une semaine, du souhait du Gouvernement de revenir sur « les critères pénalisants » introduits par le précédent ministre de l'intérieur en matière de naturalisation. Je salue évidemment la détermination affichée de la nouvelle majorité d'affirmer une volonté forte d'intégration par l'accès à la nationalité française.

Les éléments relayés par la presse font notamment état de la suppression du QCM de connaissance générale. Cette épreuve, dans tous les sens du terme, est souvent perçue comme humiliante par nos concitoyens aspirant à la nationalité française.

Cependant, rien n'est dit sur l'obligation faite, depuis le 1er janvier 2012, pour tous les candidats à la nationalité française de présenter un document certifiant leur niveau de langue. Cette mesure prise par l'ancienne majorité leur impose de fournir un diplôme ou une attestation certifiant qu'ils ont acquis le niveau B1 oral en langue française. Cette dernière attestation est délivrée par un organisme labélisé FLI, c'est-à-dire français langue d'intégration, ou par un organisme agréé par le ministère de l'intérieur.

À l'étranger, cette attestation s'obtient auprès des alliances françaises ou des instituts français.

Au-delà du coût que représente cette démarche, celle-ci pose également des problèmes particuliers pour les conjoints de Français résidant à l'étranger, a fortiori dans des pays francophones. Il est ainsi aberrant d'être obligé de produire un document certifiant votre niveau de langue, lorsque l'on est originaire d'un État qui compte le français parmi ses langues nationales.

Je ne peux m'empêcher d'illustrer mes propos avec l'exemple du Cameroun, où je résidais depuis vingt-cinq ans avant de rejoindre les rangs du Sénat au mois de juillet dernier.

De la même manière, comment réagirions-nous, si un postulant français à la nationalité belge – un sujet d'actualité ! – se voyait imposer de fournir la preuve de son niveau de langue française ?

S'il est évident que maîtriser la langue d'un pays constitue indéniablement un vecteur d'intégration, cela ne doit pas se transformer en un parcours d'obstacles onéreux et humiliant.

Dès lors, monsieur le ministre, quel est le sort réservé aux certificats de niveau de langue ? Par ailleurs, les améliorations prévues quant au droit de la nationalité viseront-elles l'acquisition par déclaration, qui concerne les conjoints de Français, ou seront-elles cantonnées aux demandes de naturalisation et de réintégration ? Enfin, pourriez-vous également nous éclairer sur le calendrier envisagé ? (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste et du groupe CRC. – Mme Bariza Khiari applaudit également.)

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Réponse du Ministère de l'intérieur publiée le 12/10/2012

Réponse apportée en séance publique le 11/10/2012

M. Manuel Valls, ministre de l'intérieur. Madame la sénatrice, ces deux dernières années, l'accès à la nationalité française a été entravé et empêché ; cette politique a produit les résultats que nous connaissons aujourd'hui et que rappelait l'autre jour le Premier ministre : une baisse du nombre de naturalisations de 40 % entre 2011 et mai 2012.

M. David Assouline. C'est Guéant !

M. Manuel Valls, ministre. Ces obstacles, qui n'ont jamais fait l'objet d'un débat, ont touché notamment les étrangers installés depuis longtemps en France, parfaitement insérés dans la société et qui ont fait le choix de devenir Français.

Notre volonté est de changer cette donne et de refaire de l'accès à la nationalité un moteur de l'intégration. Pour cela, nous préparons une circulaire qui devrait être adressée aux préfets dans quelques jours pour revenir sur les critères les plus discriminants. J'en retiendrai quatre points.

Premièrement, la méthode du questionnaire à choix multiples portant sur la connaissance de l'histoire, de la culture et de la société françaises sera abandonnée.

Deuxièmement, s'agissant des tests, la connaissance du français est bien évidemment un facteur d'intégration tout à fait essentiel.

M. Pierre Charon. Bien !

M. Manuel Valls, ministre. Le niveau exigé sera maintenu ; ce n'est pas ce niveau qui est discriminant, mais la façon dont il est évalué et la prise en compte des conditions spécifiques de certains demandeurs.

Troisièmement, nous allons cibler les critères à l'origine de la majeure partie des refus ; je pense en particulier à l'insertion professionnelle.

Quatrièmement, enfin, seront traités à part le cas des jeunes de moins de vingt-cinq ans ayant effectué tout ou partie de leur scolarité en France et celui des médecins étrangers.

Bref, je souhaite, madame la sénatrice, mener un travail ambitieux en matière de naturalisation. Il ne s'agit pas d'engager des polémiques ou d'ouvrir un débat absurde sur la nationalité - je me rappelle des mots à l'Assemblée nationale de Pierre Mazeaud, qui nous avait conseillé il y a deux ans de ne pas ouvrir ce débat néfaste -, mais de faire en sorte que ceux qui veulent être français le soient dans de bonnes conditions. Notre message, et nous devons en être fiers, c'est que la France est prête à accueillir de nouveaux Français. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

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