Question de M. MAUREY Hervé (Eure - UDI-UC) publiée le 31/01/2013

M. Hervé Maurey attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur les incertitudes et les difficultés que rencontrent les collectivités dans le respect de leurs obligations relatives à la sécurité incendie.
La loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 de simplification et d'amélioration de la qualité du droit a institué la police de la défense extérieure contre l'incendie rappelant ainsi la responsabilité du maire en matière de lutte contre l'incendie.
Cette compétence, et le pouvoir de police spéciale qui y est associé, sont transférables aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI).
Dans certains cas, les communes ont transféré leur compétence en matière d'eau et d'assainissement mais n'ont pas transféré leur compétence en matière de lutte contre l'incendie.
Or, le respect des normes applicables en matière de lutte contre l'incendie (notamment en termes de débit) impose souvent dans les communes rurales un renforcement des réseaux liés à la compétence assainissement. Ces communes n'ayant plus, ni la compétence assainissement ni les ressources associées, ont les plus grandes difficultés à respecter leurs obligations. Il en résulte par ailleurs des incertitudes sur le rôle des différents acteurs concernés : communes, syndicats d'eau, communautés de communes, etc.
Il rappelle que depuis de nombreux mois pour ne pas dire années est attendue la partie réglementaire de la réforme de la sécurité incendie.
Aussi il l'interroge sur les mesures qui pourraient être proposées pour répondre aux difficultés rencontrées par les collectivités et leurs groupements, en rappelant le rôle de chacun et en précisant dans quel délai sera pris le décret prévu à l'article 77 de la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 de simplification et d'amélioration de la qualité du droit.

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Réponse du Ministère chargé de la décentralisation publiée le 10/04/2013

Réponse apportée en séance publique le 09/04/2013

M. Hervé Maurey. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je souhaite attirer l'attention du Gouvernement sur les incertitudes et les difficultés que rencontrent les collectivités locales et leurs groupements pour respecter leurs obligations relatives à la sécurité incendie.

Les premières difficultés portent sur la répartition des compétences entre ces collectivités.

En effet, la loi du 17 mai 2011 de simplification et d'amélioration de la qualité du droit a institué la police de la défense extérieure contre l'incendie, rappelant ainsi la responsabilité du maire en matière de lutte contre l'incendie. Cette compétence et le pouvoir de police spéciale qui y est associé sont transférables aux EPCI.

Par ailleurs, les communes ont, dans de nombreux cas, transféré à des EPCI leur compétence en matière de gestion de l'eau sans pour autant transférer leur compétence en matière de lutte contre l'incendie. Or le respect des normes applicables en matière de lutte contre l'incendie, notamment en termes de débit, impose souvent dans les communes rurales un renforcement des réseaux, et cette action est liée à la compétence eau. Il en résulte des difficultés pour les maires responsables de la sécurité incendie quant au respect de leurs obligations en la matière dès lors qu'ils n'exercent plus la compétence de gestion de l'eau.

Une autre source d'incertitudes tient au fait que le volet réglementaire de la réforme relative à la sécurité incendie, engagée voilà près de dix ans, n'est toujours pas parachevé. Or il s'agit d'un volet important puisqu'il doit préciser des normes aussi indispensables que les débits minimaux ou la capacité des réserves d'eau. La publication d'un décret relatif à l'aménagement et d'un référentiel national de défense extérieure a été reportée à plusieurs reprises par vos prédécesseurs. Ces textes sont plus que jamais attendus et réclamés par les associations d'élus.

Je vous rappelle, madame la ministre, que le bureau de l'Association des maires de France avait donné un avis favorable sur le dernier projet de décret présenté par votre prédécesseur.

Le changement de Gouvernement et la modification des périmètres ministériels semblent avoir imposé de nouvelles procédures, allongeant d'autant le retard pris dans la publication de ces textes.

Les élus sont donc contraints soit de différer leurs projets, avec tous les risques qui en résultent en termes de responsabilité, soit, dans un contexte budgétaire particulièrement difficile pour les collectivités, d'engager des travaux que l'on sait coûteux sans avoir la certitude qu'ils ne seront pas obligés de les revoir à terme.

Madame la ministre, pouvez-vous m'indiquer dans quel délai sera pris le décret attendu et quelles seront ses conséquences en termes de charges financières pour les collectivités ? Par ailleurs, quelles sont les mesures qui pourraient être proposées pour répondre aux difficultés que rencontrent les collectivités lorsqu'il y a répartition, pour ne pas dire éclatement, de compétences et de responsabilités en matière de sécurité incendie entre des communes et des EPCI ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée auprès de la ministre de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique, chargée de la décentralisation. Monsieur le sénateur, le ministre de l'intérieur, Manuel Valls, retenu aujourd'hui à Alger par un sommet des ministres de l'intérieur, m'a demandé de vous assurer, comme il l'a fait lors de sa réponse à une question analogue de votre collègue M. Ambroise Dupont voilà quelques semaines, de sa volonté de mener à bien la réforme de la sécurité incendie, engagée depuis 2005.

En matière de défense extérieure contre l'incendie, un cadre juridique nouveau a été fixé par l'article 77 de la loi du 17 mai 2011. Le décret d'application nécessaire est aujourd'hui prêt. Il a déjà reçu l'avis favorable de tous les organismes consultatifs concernés, en particulier la Commission consultative d'évaluation des normes. Le bureau de l'Association des maires de France a également apporté son soutien à ce projet. Le texte a été déposé devant le Conseil d'État en avril 2012, mais il n'a pu être examiné avant le changement de gouvernement. Comme vous l'avez indiqué, la réorganisation et la définition de nouveaux périmètres de compétences pour les ministères ont sans doute quelque peu retardé la publication du décret en question.

Le ministre de l'intérieur a donc relancé la procédure d'adoption de ce décret dès l'été 2012.

Avant la saisine du Conseil d'État, il était en effet nécessaire d'engager une nouvelle concertation avec les ministères concernés selon les nouveaux périmètres. Cette procédure arrive à son terme et ce décret sera très prochainement - je ne peux pas vous donner de date précise - présenté devant le Conseil d'État. Il pourra alors être rapidement publié.

Par ailleurs, ce décret sera complété par un arrêté définissant le référentiel national de la défense extérieure contre l'incendie. Il s'agit d'un recueil des solutions techniques à la disposition des acteurs territoriaux.

Sur le fond, la réforme engagée vise, comme vous le souhaitez, à définir plus clairement le rôle des différents acteurs locaux. La défense extérieure contre l'incendie est désormais une compétence transférable aux EPCI, sur la base du volontariat. Il en va de même du pouvoir de police administrative spéciale attaché à cette compétence, qui sera dévolu au président de l'EPCI. Cette compétence requiert des capacités techniques et juridiques complexes, d'où le caractère indispensable de l'arrêté.

Il est en outre nécessaire de mieux distinguer les deux services publics de l'eau potable, d'une part, et de la défense contre l'incendie, d'autre part. La loi et le futur décret organisent cette répartition, notamment en matière de financement. Les interactions juridiques et techniques entre ces deux services seront précisées par le décret et le référentiel national à venir.

Enfin, vous évoquez le problème du dimensionnement des réseaux d'eau potable, notamment en zone rurale. Vous estimez que les normes applicables en matière de défense contre l'incendie imposent un surdimensionnement de ces réseaux. Le ministre de l'intérieur tient à vous indiquer que des solutions techniques permettent de répondre à cette difficulté ; elles seront, bien sûr, privilégiées. La défense contre l'incendie n'est d'ailleurs pas uniquement alimentée par ces réseaux, mais également par des citernes ou des points d'eau naturels.

La réforme impose l'organisation de partenariats plus étroits entre les différents acteurs locaux : les services départementaux d'incendie et de secours, les opérateurs des réseaux d'eau et les collectivités. Le ministre de l'intérieur y travaille selon une méthode à laquelle il est très attaché, celle du dialogue et de la concertation.

M. le président. La parole est à M. Hervé Maurey.

M. Hervé Maurey. Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse et je me réjouis de savoir que le décret sera publié « très prochainement », même si ces adverbes ne permettent pas véritablement de repérer une date sur le calendrier.

En tout cas, ce décret doit effectivement être publié sans tarder. Il est attendu par les élus, et je suppose que les associations d'élus vous le rappellent régulièrement.

Par ailleurs, ce décret ne devra pas imposer trop de normes supplémentaires. Aujourd'hui, tout le monde, y compris le Gouvernement, est conscient de la nécessité d'alléger les normes. Évitons donc tout excès de zèle en la matière. Nous le savons, les élus croulent sous les normes et sous les dépenses qu'elles impliquent, car leur application a un coût.

Il est clair que, dans une période où les collectivités locales, notamment les communes, vont devoir supporter une baisse de leurs dotations, elles risquent de ne pas pouvoir financer des mesures de sécurité incendie trop coûteuses, quand bien même il est évidemment indispensable de pouvoir lutter efficacement contre les incendies.

Enfin, madame la ministre, il faut trouver des solutions pour que l'action d'un maire ne soit pas freinée, lorsqu'il décide des mesures destinées à assurer la sécurité incendie, par le fait qu'il n'a plus de compétences en matière de gestion de l'eau. Sur le terrain, certains maires se heurtent parfois à cette difficulté et ne parviennent pas à obtenir le renforcement des réseaux parce que la compétence en question a été transférée à un syndicat ou à l'EPCI. J'espère que le décret en tiendra compte et sera extrêmement précis sur ce point.

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