Question de Mme LIENEMANN Marie-Noëlle (Paris - SOC) publiée le 01/03/2013

Question posée en séance publique le 28/02/2013

Concerne le thème : La compétitivité

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Madame la ministre, quand il est question de compétitivité, on parle souvent du coût du travail. Néanmoins, je suis frappée qu'il ne soit pas fait allusion au prix de l'immobilier, au coût du logement.

Or des études de l'Organisation de coopération et de développement économiques, l'OCDE, montrent que chaque augmentation d'environ 10 % du prix de l'immobilier s'accompagne d'une baisse de nos exportations de 1,3 %.

De plus, des études sur la compétitivité comparée de la France et de l'Allemagne ont mis en exergue la flambée des prix de l'immobilier dans notre pays, notamment la forte augmentation des dépenses de logement dans la consommation totale de nos concitoyens.

Parce que les dépenses de logement n'ont pas augmenté en Allemagne, le pouvoir d'achat de nos voisins a été préservé en dépit de salaires en stagnation, voire en recul.

Dans le même temps, en France, ces dépenses de logement augmentaient de 15 à 20 %, voire davantage. Ainsi, un smicard peut dépenser jusqu'à 40 % de son salaire pour se loger ! Vous le voyez, quand une très faible progression des salaires est assortie d'une forte augmentation du coût du logement, on a une perte nette de pouvoir d'achat.

En dernier lieu, l'augmentation des prix de l'immobilier est un mécanisme spéculatif qui ne dissocie pas l'immobilier d'entreprise de l'immobilier commercial. Or, qu'elles soient liées à l'un ou l'autre poste, ces dépenses pèsent lourd pour certaines entreprises.

En conséquence, madame la ministre, je vous demande quelles dispositions le Gouvernement compte prendre, au-delà des mesures qui ont déjà été engagées, pour réguler à la baisse des prix de l'immobilier trop élevés et faire en sorte de stopper l'évolution à la hausse des loyers. On pourrait imaginer, par exemple, que l'indice de référence des loyers, l'IRL, soit gelé pendant trois ans.

Enfin, on sait que pour faire baisser le coût du logement, il faut produire massivement des logements sociaux et les proposer à un prix abordable. Or le Président de la République a notamment pris l'engagement de construire 150 000 logements sociaux.

J'attire votre attention sur un point : pour tous les acteurs concernés, cet objectif ne pourra être atteint que si la TVA pour le logement social est abaissée à 5 %. Je plaide donc pour que le Gouvernement prenne ces mesures, qui amélioreront la compétitivité de la France.

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Réponse du Ministère chargé des petites et moyennes entreprises, de l'innovation et de l'économie numérique publiée le 01/03/2013

Réponse apportée en séance publique le 28/02/2013

Mme Fleur Pellerin, ministre déléguée. Vous avez raison, madame la sénatrice, de lier la question de l'inflation immobilière à la compétitivité de l'économie, que ce soit la compétitivité-prix ou la compétitivité hors prix.

S'agissant de la compétitivité-prix, la dégradation s'est faite par deux canaux : directement, via le prix des loyers, des investissements immobiliers qui sont le fait des entreprises ; indirectement, en raison de la pression sur les salaires nominaux. Puisque les prix de l'immobilier pèsent sur le pouvoir d'achat des ménages, ils se répercutent sur les salaires nominaux.

Les problèmes de logement des salariés affectent aussi les entreprises par d'autres biais, notamment parce qu'ils pèsent sur le recrutement, freinent la mobilité interne des salariés et diminuent leur productivité. Autrement dit, les tensions qui se traduisent par une hausse des prix de l'immobilier affectent les salariés et le marché du travail.

En ce qui concerne la compétitivité hors prix, la hausse des prix a pesé négativement par deux biais. Tout d'abord, elle a créé un effet d'éviction, puisque l'investissement immobilier se fait au détriment d'autres investissements ou de dépenses plus productives, dans le domaine des machines-outils ou de la recherche-développement, par exemple. Ensuite, du fait de la hausse des prix, l'épargne a préféré les crédits immobiliers au financement des entreprises ; il y a été fait allusion tout à l'heure.

Puisque vous soulevez la question de la TVA, j'aimerais apporter une clarification, tout en précisant que la relance de la construction de logements, notamment de logements sociaux, est une préoccupation du Gouvernement ; elle entre dans le cadre des attributions de Cécile Duflot, qui est très active et tout à fait mobilisée sur ce chantier.

Le taux de TVA applicable au secteur du logement social est, je tiens à le rappeler, le fait du précédent gouvernement. C'est lui qui avait choisi, à la fin de 2011, de faire passer le taux de TVA de 5,5 % à 7 %.

Quant aux différents taux de TVA inscrits dans le troisième projet de loi de finances rectificative pour 2012, ils ne sont applicables qu'à compter du 1er janvier 2014. Dans l'intervalle, les barèmes sont inchangés et le taux applicable au logement social reste à 7 %, tout comme pour les travaux de rénovation thermique.

Le Premier ministre l'a dit, la question très critique du relèvement des taux pour certains secteurs comme le logement social fait actuellement l'objet d'un débat. Celui-ci est en cours, dans un cadre budgétaire extrêmement contraint.

Le logement social, comme le logement en général, est l'une des priorités du Gouvernement. Le droit de tous nos concitoyens à se loger dignement est absolument inaliénable et fondamental. C'est la raison pour laquelle une mobilisation très importante en faveur du logement social a été engagée.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour la réplique.

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse. Vous avez raison de dire que le passage du taux de TVA de 5,5 % à 7 % a handicapé la construction de logements sociaux, qui est en chute.

Néanmoins, je me permets de souligner - je l'ai d'ailleurs déjà fait auprès de certains de vos collègues - que la thèse selon laquelle le seul taux de TVA actuellement en vigueur est de 7 % passe sous silence un aspect majeur.

Pour construire, il faut acheter des terrains. Quand un organisme HLM veut acheter un terrain, il a besoin de savoir comment il va boucler le financement de son opération. Le taux de 7 % applicable à l'achat de toute une série de terrains le met dans l'impossibilité d'acheter et lui fait renoncer à l'opération.

Que le Gouvernement fasse, dès à présent, passer à 5 % le taux applicable à ce bien de première nécessité qu'est le logement social et les organismes HLM pourront constituer les réserves foncières nécessaires à la construction des 150 000 logements promis. Dans le cas contraire, ceux-ci ne verront pas le jour.

J'ai bien entendu la volonté du Gouvernement d'ouvrir le débat. Je lui demande de le conclure vite, en annonçant que le taux de la TVA est abaissé à 5 % pour le logement social.

M. Jean-Pierre Raffarin. Elle a raison !

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