Question de M. MASSON Jean Louis (Moselle - NI) publiée le 21/03/2013

Rappelant sa précédente question orale du 5 février 2013, M. Jean Louis MASSON attire, à nouveau, l'attention de M. le Premier ministre sur la nécessité de disposer de plus de transparence et de plus de rigueur dans l'attribution des subventions de la réserve parlementaire. En ce qui concerne la rigueur, la réponse formulée par le ministre de l'intérieur lors de la séance du 5 février, suggérait de saisir la justice et, dans au moins un cas, ce conseil a été suivi puisqu'une plainte avec constitution de partie civile pour détournement de fonds publics et prise illégale d'intérêts a été déposée, depuis lors, par un administré. En revanche, la transparence relève des différents ministères car ce sont eux qui assurent le suivi administratif des subventions et qui procèdent à leur versement. Les dispositifs actuels en matière de transparence sont insuffisants et il faudrait, au moins, que les ministères appliquent complètement les trop rares dispositions législatives existantes. C'est, notamment, le cas de l'obligation de communiquer au Parlement, en annexe au projet de loi de finances, la liste des subventions de l'État versées aux associations au cours de l'année précédente. C'est aussi le cas du droit, pour le public, de consulter les documents administratifs relevant de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif, social et fiscal. Certains ministères, notamment le ministère de l'intérieur appliquent correctement la jurisprudence de la Commission d'accès aux documents administratifs (CADA) et communiquent au public les informations demandées (cf. réponse aux questions écrites n°31768, JO AN du 07/10/2008 et n°4459, JO AN du 18/09/2012). Toutefois, d'autres ministères entretiennent une regrettable absence de clarté. Ainsi, l'association Valeur Ecologie a, semble-t-il, perçu en 2009 une subvention de 100 000 euros et la loi obligeait le Gouvernement à la répertorier dans la liste annexée au projet de loi de finances présenté en septembre 2010. Cela n'a pas été fait. Il lui demande donc une explication sur l'origine de cette lacune. Ensuite, le ministère de l'écologie, contrairement à la loi de n° 78-753 du 17 juillet 1978, a refusé de communiquer la liste des subventions parlementaires reçues par cette association. La CADA a alors été saisie et, malgré son avis positif, le ministère a persisté dans son refus. Finalement, à la suite de sa mise en cause dans la question orale du 5 février 2013, l'autorité ministérielle a fini par signer, le jour même, une lettre fournissant les informations correspondantes. Toutefois, malgré un second avis favorable de la CADA, le ministère persiste à refuser la consultation du dossier administratif pour ces subventions. Il lui demande si un tel exemple ne prouve pas qu'il faudrait que chaque ministère respecte au moins les avis de la CADA et le minimum légal de transparence s'agissant de l'emploi de la réserve parlementaire. À défaut, les nombreux articles publiés dans la presse sur le cas d'espèce risquent d'alimenter une suspicion générale (site en ligne Médiapart du 28/10/2012, journal Aujourd'hui en France du 14/12/2012, journal le Républicain Lorrain du 12/02/2013, émission télévisée Capital sur la chaîne M6 du 17/03/2013...). Afin de ne pas discréditer le principe même de la réserve parlementaire, il est absolument indispensable qu'une véritable transparence contribue à clarifier le système.

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Transmise au Ministère chargé des relations avec le Parlement


Réponse du Ministère chargé de la réussite éducative publiée le 10/04/2013

Réponse apportée en séance publique le 09/04/2013

M. Jean Louis Masson. J'avais adressé cette question, qui concerne la réserve parlementaire, à M. le Premier ministre. On m'a téléphoné pour m'indiquer qu'elle était transmise au ministre chargé des relations avec le Parlement. Or je constate qu'il n'est pas là aujourd'hui. J'en déduis que c'est finalement Mme la ministre chargée de la réussite éducative qui va me répondre. Je suis tout de même un peu surpris, je l'avoue, par une telle désinvolture. Je ne vois pas bien le rapport entre la réussite éducative et la réserve parlementaire... Cela fait sans doute partie des mystères du Gouvernement !

Madame la ministre, les événements qui ont émaillé l'actualité de ces derniers jours - je pense en particulier à l'affaire Cahuzac - illustrent une nouvelle fois la nécessité de moraliser la vie publique.

Sur cette question de la morale dans la vie politique, un sujet fournit un exemple très probant : la réserve parlementaire. En l'occurrence, une réforme s'impose. Celle pour laquelle je milite depuis plus d'un an s'articule autour de trois axes : l'équité, tant dans la dotation aux différents parlementaires que dans la répartition territoriale ; la transparence, car, s'agissant d'argent public, nos concitoyens et nous-mêmes avons le droit de savoir ce qu'il en est exactement ; l'honnêteté, parce qu'il convient d'empêcher les dérives possibles.

J'avais interrogé M. le ministre de l'intérieur sur ce dernier point lors de la séance des questions orales du 5 février. Il m'avait répondu que les tribunaux judiciaires étaient compétents en la matière et que des poursuites pouvaient, le cas échéant, être engagées. D'ailleurs, j'ai appris depuis par la presse que cela avait été le cas dans deux dossiers au moins.

Je concentrerai mon propos sur l'équité et la transparence. Je m'appuierai notamment sur les révélations récentes de la presse, en particulier celles de l'émission Capital diffusée par M6 le 17 mars et d'un article paru dans le journal Le Parisien-Aujourd'hui en France le 5 avril.

Premier axe : l'équité.

Par le passé, il y avait, et c'était un scandale, des distorsions considérables. Certains profitaient du système, « s'empiffraient » littéralement de réserve parlementaire, tandis que d'autres devaient se contenter de quelques miettes...

Le président de l'Assemblée nationale et le président du Sénat ont annoncé, à grand renfort de publicité, que tous les parlementaires seraient dorénavant traités sur un même pied. Je m'étais réjoui dans la presse d'une telle annonce et j'avais félicité la nouvelle majorité de l'initiative ainsi prise.

Hélas ! M. le rapporteur général de la commission des finances de l'Assemblée nationale a désavoué les propos de M. Bartolone et a reconnu sur M6 qu'il y avait toujours des parlementaires privilégiés pour profiter du système en recevant deux ou trois fois plus que les autres.

La presse et les parlementaires ont manifestement été « enfumés » lorsqu'on leur a fait croire que tout le monde serait désormais sur un pied d'égalité.

Deuxième axe : la transparence.

En la matière, je vous rappelle, madame la ministre, que le Gouvernement a l'obligation de communiquer aux membres de l'Assemblée nationale et du Sénat la liste de toutes les subventions allouées aux associations, y compris celles qui relèvent de la réserve parlementaire. Le gouvernement Fillon ne l'a pas toujours fait. Comme par hasard, l'utilisation de la principale subvention en cause a été pour le moins douteuse... D'ailleurs, elle fait l'objet d'une enquête judiciaire.

Quant à l'actuelle ministre de l'écologie, elle a vraiment traîné les pieds pour fournir un minimum d'informations sur le sujet. Pourtant, elle y est obligée par la loi du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif, social et fiscal ; les personnes concernées ont dû saisir la Commission d'accès aux documents administratifs, la CADA. Mais la ministre continue de refuser la consultation des documents malgré les injonctions que la CADA lui a adressées !

M. le président. Il faut conclure, mon cher collègue.

M. Jean Louis Masson. Ces deux exemples démontrent la nécessité d'une réforme globale de la réserve parlementaire. Le Gouvernement doit présenter un projet de loi ou demander l'inscription à l'ordre du jour du Parlement d'une proposition de loi - j'en ai déposé une en ce sens - tendant à moraliser la réserve parlementaire.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme George Pau-Langevin, ministre déléguée auprès du ministre de l'éducation nationale, chargée de la réussite éducative. Monsieur Masson, c'est effectivement moi qui suis chargée de représenter le Gouvernement pour vous répondre. Comme vous le savez, les ministres, au même titre d'ailleurs que les parlementaires, ne sont pas toujours maîtres de leur emploi du temps, et mon collègue Alain Vidalies ne pouvait pas être présent ce matin pour vous répondre personnellement.

Vous avez attiré l'attention du Gouvernement sur la réserve parlementaire. Au passage, je vous fais observer qu'il n'y a pas non plus de lien entre ce sujet et l'affaire Cahuzac, à laquelle vous avez néanmoins fait allusion.

Je ne dispose pas d'éléments très précis sur les différents aspects que vous avez évoqués. Je voudrais toutefois rappeler les règles et les principes qui s'appliquent en l'espèce.

Vous avez cité la nécessité de la transparence : des règles existent ; elles doivent être respectées. Si, dans tel ou tel cas particulier, elles ne l'ont pas été, il vous appartient, comme à nous tous d'ailleurs, de veiller à leur application.

Vous avez rappelé l'obligation de publier chaque année, en annexe au projet de loi de finances, la liste des subventions versées par l'État aux associations sur l'initiative du Gouvernement ou du Parlement. Cette liste est scrupuleusement renseignée ; elle intègre les subventions versées au titre de la réserve parlementaire. Il doit être normalement possible de vérifier que cette information est fiable et complète et, avec les ministres concernés, mon collègue Alain Vidalies veillera à ce que cela soit fait.

Vous avez également insisté sur l'accès aux documents administratifs. Là encore, des règles claires et rigoureuses sont fixées par la loi. La CADA assure leur respect et leur application, sous le contrôle du juge administratif, qui peut et doit même être saisi de tout manquement éventuel.

Je tiens à rappeler que l'ensemble des subventions attribuées au titre de la réserve parlementaire font l'objet d'amendements déposés par le Gouvernement sur proposition des commissions des finances de l'Assemblée nationale et du Sénat. C'est un élément d'information et de contrôle démocratique essentiel auquel il faut se référer.

Comme vous l'avez dit devant le ministre de l'intérieur lors de la séance de questions du 5 février dernier, des questions plus larges se posent sur l'attribution de la réserve et, plus fondamentalement, sur la rénovation des pratiques en la matière.

Au nom du Premier ministre, nous saluons, comme vous l'avez vous-même fait, l'effort de transparence et d'équité des présidents Jean-Pierre Bel et Claude Bartolone, qui ont souhaité que les crédits de la réserve soient répartis au prorata des effectifs des groupes parlementaires. Il reste à espérer qu'à l'intérieur des groupes parlementaires le même principe d'équité s'applique, mais, vous en conviendrez, nous sommes moins armés pour intervenir en ce domaine.

En tout cas, votre souci d'améliorer la transparence et l'équité dans l'emploi de la réserve parlementaire est partagé par les membres du Gouvernement.

M. le président. La parole est à M. Jean Louis Masson.

M. Jean Louis Masson. Je suis vraiment stupéfait, et même scandalisé, madame la ministre ! À quoi bon poser des questions si c'est pour vous entendre nous répondre que le soleil brille quand il fait nuit ?

Je vous ai dit précisément que certains responsables avaient reconnu l'absence de toute égalité, notamment le rapporteur général du budget de l'Assemblée nationale, qui a affirmé toucher trois fois plus que les autres. Je n'entrerai pas dans le détail des problèmes qui se posent au Sénat, mais, il en va de même. Initialement, c'est vrai, madame la ministre, tout le monde devait avoir la même chose, et je m'en réjouissais. Mais l'égalité n'a pas été instaurée, et c'est un vrai scandale ! M. Bartolone et le président du Sénat se sont moqués des journalistes et de l'opinion en faisant croire qu'il y avait une justice alors qu'il n'y en a toujours pas !

S'agissant de l'autre problème que j'ai évoqué, madame la ministre, on est à la limite du mensonge. Dans ma question, je citais un exemple précis.

J'ai transmis par écrit au Gouvernement cette question, mais peut-être n'en avez-vous pas eu connaissance, le hasard vous ayant sans doute désignée, aucun autre membre du Gouvernement n'étant disponible, pour répondre à la question que j'ai adressée au Premier ministre... Si, au moins, vous avez lu cette question et si vous avez été un peu informée avant de venir ici, vous savez très bien que, contrairement à ce que vous avez dit, la subvention allouée à cette association au titre de la réserve parlementaire n'a pas été publiée. On l'a dissimulée, et une interrogation persiste donc.

Vous ne pouvez pas me répondre que toutes les subventions aux associations sont publiées. Elles devraient normalement l'être, madame la ministre, mais, là, il y a eu magouille, il y a eu entourloupe, et c'était bien l'objet de ma question. Pourquoi cette subvention a-t-elle été masquée ? Pourquoi n'a-t-elle pas, comme toutes les autres subventions aux associations, été publiée ?

Sur ces points, madame la ministre, vous n'avez pas répondu !

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