Question de M. del PICCHIA Robert (Français établis hors de France - UMP) publiée le 26/04/2013

Question posée en séance publique le 25/04/2013

M. Robert del Picchia. Madame la présidente, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question s'adressait au ministre des affaires étrangères, mais je comprends qu'il ne puisse y répondre puisque, si je suis bien informé, il accompagne le Président de la République en Chine.

L'explosion d'une voiture piégée à Tripoli, dont on parle depuis trois jours, suscite un certain nombre de questions à Paris, mais aussi de graves inquiétudes chez nos compatriotes du réseau diplomatique et parmi les communautés françaises à l'étranger.

Certes, M. Laurent Fabius, au cours de son déplacement à Tripoli, a annoncé l'envoi sur place d'une équipe du GIGN ; celle-ci, du reste, est arrivée. Il a également annoncé le renforcement de la sécurité de nos intérêts au Moyen-Orient et dans le Sahel. Cependant, pour bienvenues qu'elles soient, ces annonces sont-elles suffisantes ?

Soyons clairs : nous savons tous qu'Al-Qaïda a lancé des menaces contre la France. Vendredi dernier, Al-Qaïda au Maghreb islamique, AQMI, a directement menacé notre pays de représailles pour son intervention au Mali. Dans ces conditions, il paraît légitime de s'interroger : l'attentat de Tripoli n'était-il pas la mise à exécution de cette menace ?

Surtout, avait-on bien pris toutes les mesures de précaution ?

M. Alain Gournac. Non ! La voiture stationnait dans la rue ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.) C'est la vérité ! Quand je suis allé sur place, j'ai pu emprunter cette rue sans qu'on me demande rien !

M. Robert del Picchia. À la suite de l'assassinat de l'ambassadeur américain Christopher Stevens et de trois autres ressortissants américains à Benghazi, en septembre dernier, le gouvernement libyen avait promis de mettre sur pied une force spéciale de protection des diplomates. Or, me dit-on, on ne voit que de rares voitures de police libyennes patrouiller de temps en temps…

Le pouvoir libyen éprouve toujours les plus grandes difficultés à imposer son autorité sur un pays où d'importantes quantités d'armes restent en circulation et où de nombreuses milices agissent à leur guise. Est-on intervenu auprès des autorités libyennes pour que la sécurité de nos compatriotes, dont on comprend qu'ils soient de plus en plus inquiets, soit mieux assurée à l'avenir ?

J'ajoute que, au-delà de ses implications politiques en Libye, et surtout dans la région, cet attentat est un signal très inquiétant pour les entreprises, qui vont être encore un peu plus dissuadées de travailler en Libye et dans les pays voisins.

Le vice-Premier ministre libyen, Awad al-Barasi, a déclaré : « Nous sommes dans une période cruciale et certains veulent déstabiliser la Libye. » Les auteurs de l'attentat de Tripoli ont touché deux cibles à la fois : la Libye et la France. Dans ce contexte de violence et de risque extrême, on voit mal comment les relations franco-libyennes pourraient se développer. Alors, comment peut-on envisager leur avenir ?

À Paris, mais aussi au sein de nos communautés à l'étranger, chacun s'accorde pour réaffirmer avec force qu'il ne faut jamais, absolument jamais, céder aux terroristes !

Mme la présidente. Mon cher collègue, veuillez conclure.

M. Robert del Picchia. Permettez-moi, au nom des Français de l'étranger, de rendre hommage aux deux gendarmes blessés à Tripoli et, plus largement, à tous les membres de nos services de sécurité qui font quotidiennement preuve de courage au service de nos compatriotes à travers le monde ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP. – Mme Sylvie Goy-Chavent applaudit également.)

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Réponse du Ministère chargé des Français de l'étranger publiée le 26/04/2013

Réponse apportée en séance publique le 25/04/2013

Mme Hélène Conway-Mouret, ministre déléguée auprès du ministre des affaires étrangères, chargée des Français de l'étranger. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, je remercie M. del Picchia de sa question, qui me permet de vous confirmer que la sécurité de nos ressortissants à l'étranger est un objectif prioritaire pour le ministère des affaires étrangères. C'est une question que nous traitons avec sérénité et responsabilité.

Laurent Fabius est parti à Tripoli immédiatement après l'annonce de l'attentat pour apporter le soutien du Gouvernement aux deux gendarmes blessés, dont l'un grièvement ; ils ont, depuis, été rapatriés en France. Le ministre s'est rendu sur place pour exprimer notre solidarité à nos agents consulaires, qui accomplissent un travail remarquable, ainsi qu'à la communauté française en Libye - une petite communauté puisqu'elle ne compte qu'environ 300 personnes. Il a veillé à ce que les mesures nécessaires soient prises pour que la sécurité de nos ressortissants en Libye soit renforcée.

Ces compatriotes participent à la reconstruction de la Libye ; ils y promeuvent nos intérêts, mais aussi nos valeurs. Nous devons les protéger.

Les mesures de sécurité étaient déjà très importantes avant l'attentat, je peux en témoigner. Des décisions immédiates ont été prises pour les renforcer encore. C'est ainsi que les différentes implantations françaises, c'est-à-dire l'école, l'institut, le service et la mission économique, ont été fermées. Par ailleurs, comme M. del Picchia l'a signalé, un groupe du GIGN a été déployé à la résidence de l'ambassade, où la chancellerie a été rapatriée. En outre, il a été demandé à nos ressortissants de ne pas sortir en attendant de nouvelles instructions. Ils reçoivent quotidiennement des consignes venant du poste.

Si la France a été prise pour cible par cet acte terroriste, ce sont aussi les Libyens qui en sont victimes. Plus que jamais, la France est déterminée à accompagner la Libye sur le chemin de la stabilité. Le 12 février dernier, Laurent Fabius a présidé une conférence au Quai d'Orsay pour mobiliser la communauté internationale. Nous avons notamment prévu de former près de 3 000 policiers libyens, et une mission européenne devrait arriver sur place au mois de juin.

Ces actes isolés et barbares sont le fait d'extrémistes qui bafouent les idéaux des révolutions arabes. Avec les Libyens et tous les peuples qui luttent pour leur liberté, nous resterons fidèles à ces idéaux.

L'attentat de Tripoli n'a pas été revendiqué. Plusieurs hypothèses peuvent être avancées : tentative de déstabilisation interne ou représailles à la suite de l'action de la France contre le terrorisme, notamment au Mali.

Quoi qu'il en soit, mesdames, messieurs les sénateurs, soyez certains que nous ne céderons jamais à la violence. Les auteurs de ces actes seront retrouvés, où qu'ils se cachent ; ils seront jugés et punis. L'enquête a commencé à Paris et à Tripoli, avec la nomination d'un juge antiterroriste. Les autorités libyennes nous apportent tout leur soutien et nous les en remercions ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur quelques travées de l'UDI-UC.)

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