Question de M. BAS Philippe (Manche - UMP) publiée le 11/04/2013

M. Philippe Bas appelle l'attention de Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie sur la panne d'électricité qui a touché le département de la Manche en mars 2013, à la suite d'un important épisode neigeux.

L'ampleur d'une telle panne, qui a privé 47 000 foyers bas-normands d'électricité pendant quelques jours, peut s'expliquer, au-delà des conditions météorologiques.

Le réseau à moyenne tension ou haute tension A (HTA), qui reste en majorité aérien en France, avec seulement 39 % du réseau en souterrain en 2012, a souffert, depuis de nombreuses années, de sous-investissement.

Certains États comme l'Angleterre, l'Allemagne ou encore les pays du Nord de l'Europe, ont un réseau souterrain proche de 80 %. Les longues coupures d'électricité y sont, alors, moins fréquentes.

Pour le département de la Manche, le taux d'enfouissement de son réseau moyenne tension (HTA) atteint 22,7 %, soit un peu plus que la moitié seulement du taux national. Il regrette la faiblesse de ce taux, alors que ce département est, notamment, traversé par la ligne à très haute tension (THT) Cotentin-Maine.

L'enfouissement du réseau HTA est un enjeu majeur pour assurer une sécurité maximale de la fourniture de l'électricité, une grande qualité de l'électricité et l'esthétique des réseaux.

Dans ce contexte et dans une société où le mode de vie dépend très largement de la disponibilité de l'électricité, il souhaite connaître les mesures que le Gouvernement compte prendre pour lutter contre le vieillissement du réseau aérien et accompagner le développement des réseaux souterrains à moyenne tension, en particulier dans le département de la Manche où le taux d'enfouissement est particulièrement faible.

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Réponse du Ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie publiée le 24/07/2013

Réponse apportée en séance publique le 23/07/2013

M. Philippe Bas. Monsieur le ministre, depuis de nombreuses années, le département de la Manche apporte une contribution décisive à la politique énergétique de la France.

Cette contribution est assurée notamment par l'usine de retraitement des déchets nucléaires de la Hague, la centrale nucléaire de Flamanville et le futur réacteur EPR, en cours de construction dans la même commune.

Demain, elle sera complétée par l'implantation sur le port de Cherbourg d'une partie de la filière industrielle de création d'éoliennes en mer et d'hydroliennes.

Or le contraste est assez saisissant entre cette capacité de production d'énergie électrique et la qualité de la distribution du courant électrique dans le même département.

De fait, au mois de mars dernier, une panne de courant électrique consécutive à un épisode neigeux a affecté pendant plusieurs jours 43 000 de nos concitoyens. Il est évident que l'épisode neigeux n'est pas le seul responsable de cette panne : si cette dernière a pu se produire et provoquer de tels effets, c'est largement à cause de la médiocre qualité de l'équipement de transport et de distribution d'électricité.

Je rappelle qu'en France, la part des lignes à haute tension et des lignes à moyenne tension A qui ont été enfouies est environ moitié moindre qu'en Grande-Bretagne, en Allemagne ou dans les pays d'Europe du nord. Or, dans la Manche, cette proportion est moitié moindre que la moyenne nationale, de sorte qu'elle correspond au quart de la part des lignes enfouies dans les pays les plus avancés à cet égard.

Monsieur le ministre, le Gouvernement entend-il donner les instructions nécessaires pour que le système de transport du courant électrique soit modernisé sur le plan de la qualité du courant et de la sécurité de sa fourniture ?

Ma question vaut pour l'ensemble de notre pays, mais spécialement pour le département de la Manche, dont je suis l'élu, parce que l'écart entre son effort au service de la politique énergétique nationale et la qualité de la distribution du courant qui y est assurée finit par exaspérer un certain nombre de nos concitoyens manchois.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Philippe Martin, ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie. Monsieur Bas, permettez-moi de vous témoigner le plaisir que j'ai à vous retrouver, après la visite que vous aviez faite voilà quelques années, en tant que ministre, dans le département du Gers ; vous nous aviez alors apporté des éléments importants en ce qui concerne des établissements de santé et d'accueil de personnes âgées.

Vous avez décrit les conséquences de l'épisode neigeux exceptionnel qui a frappé le département de la Manche en mars dernier ; je vous rappelle que la vigilance rouge avait été déclenchée par Météo France, ce qui était une première pour ce département. Vous avez eu raison de signaler que des coupures d'électricité très importantes se sont produites.

Vous comprendrez que je commence par saluer l'extrême mobilisation des agents d'ERDF : avec le soutien des moyens de l'État, de l'armée et aussi parfois des retraités des grandes entreprises du secteur, ils ont mis tout en œuvre pour réparer au plus vite les lignes électriques endommagées.

La fourniture d'électricité est une mission de service public, et l'électricité un service essentiel à la vie quotidienne et à l'activité économique. C'est pourquoi, au-delà de la gestion de crise consécutive à certains phénomènes météorologiques, l'amélioration de la qualité de la fourniture d'électricité demeure une priorité des pouvoirs publics.

Cette amélioration passe par l'entretien et la modernisation des réseaux de distribution ; elle se mesure d'abord à la réduction des temps de coupure. J'observe que ceux-ci ont été stabilisés en 2010 : ils représentent environ soixante minutes par an, en moyenne, hors événements exceptionnels. Parmi les pays européens de taille comparable, seule l'Allemagne fait mieux, mais - faut-il le rappeler ? - pour un coût de distribution bien supérieur.

Comme vous l'avez fait remarquer, monsieur le sénateur, la qualité de la fourniture d'électricité dépend aussi de l'enfouissement des réseaux de moyenne tension ; en effet, l'enfouissement permet non seulement de réduire les conséquences des lignes électriques sur les paysages, mais aussi de diminuer la sensibilité du réseau aux aléas climatiques. Pour avoir connu la tempête Klaus, mon département, le Gers, sait quels peuvent être les effets des événements météorologiques exceptionnels, quels qu'ils soient !

En ce qui concerne l'enfouissement, ERDF a pris deux engagements : construire plus de 90 % des nouvelles lignes à moyenne tension en technique souterraine à compter de 2005 et enfouir plus de 30 000 kilomètres de réseau en moyenne tension en dix ans, dans le cadre du plan d'actions « Aléas climatiques » défini en 2006. Cet engagement a permis de faire passer la part du réseau souterrain dans le total du réseau national de 32 % en 2000 à 43,8 % à la fin de 2012.

Je signale cependant que l'enfouissement systématique des lignes n'est pas forcément synonyme d'amélioration de la qualité de la fourniture. De fait, le taux d'incident hors événements climatiques est à peu près identique pour les réseaux aériens et les réseaux souterrains, notamment pour la moyenne tension.

En outre, l'enfouissement systématique entraîne des coûts élevés et soulève des difficultés techniques, comme la sensibilité aux inondations et aux variations de température, ainsi que le risque d'accrochage des câbles lors des travaux de terrassement.

Dans le département de la Manche, la part du réseau souterrain dans le total du réseau national pour la moyenne tension est relativement faible, puisque ce ratio est seulement de l'ordre d'un quart. C'est pourquoi l'effort d'investissements d'ERDF est plus important dans ce département qu'ailleurs : il a crû de 20 % par an entre 2007 et 2010, soit à un rythme plus de deux fois supérieur à la moyenne nationale.

J'ajoute que, grâce aux mesures accompagnant la construction de la ligne à très haute tension Cotentin-Maine, 163 kilomètres de lignes existantes doivent être mis en souterrain, dont 117 kilomètres de lignes aériennes à basse et moyenne tension surplombant les surfaces agricoles ; 268 kilomètres de lignes à construire seront également enfouis.

Ces projets d'enfouissement de réseaux électriques sont éligibles aux crédits du plan d'accompagnement de projet, doté de plus de 6 millions d'euros au bénéfice des communes de la Manche sur le tracé de la ligne Contentin-Maine.

M. le président. La parole est à M. Philippe Bas.

M. Philippe Bas. Monsieur le ministre, je vous remercie pour les engagements que vous avez rappelés, mais je souhaite qu'ils soient encore amplifiés compte tenu du retard important accumulé dans mon département.

J'ai souligné dans ma question l'importance, pour le reste du territoire national, de la production électrique manchoise. J'ajoute que la Manche, déjà traversée par une ligne à très haute tension, sera désormais traversée par une seconde de ces lignes. Ces deux balafres dans nos paysages ont naturellement suscité les oppositions que vous pouvez imaginer.

Aussi, qu'à l'occasion de la construction de cette ligne à très haute tension, ERDF procède à l'enfouissement de certaines lignes, ce n'est que justice pour le département ! Mon souhait à cet égard est qu'on aille plus loin que les objectifs prévus.

Monsieur le ministre, vous avez eu l'amabilité de rappeler mon déplacement dans le Gers et les apports qu'il a permis sur le plan des établissements de santé et médico-sociaux ; je serais ravi que vous puissiez me rendre cette visite en venant dans la Manche annoncer de nouvelles mesures en faveur de la fourniture d'électricité ! (M. Didier Guillaume rit.)

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