Question de Mme GARRIAUD-MAYLAM Joëlle (Français établis hors de France - UMP) publiée le 16/05/2013

Mme Joëlle Garriaud-Maylam interroge M. le ministre de la défense sur les difficultés engendrées, depuis plusieurs mois déjà, par la mise en place du logiciel interarmées de paiement des soldes, baptisé LOUVOIS.

Elle rappelle qu'en octobre 2011, l'armée de terre a décidé de basculer la gestion des bulletins de soldes de ses 130 000 militaires sur le nouveau logiciel interarmées de paiement des soldes, baptisé LOUVOIS (LOgiciel Unique à VOcation Interarmées de la Solde).

Des dizaines de milliers d'erreurs de paiement se seraient apparemment produites depuis et l'absence de versement de soldes et de primes a entraîné des préjudices importants pour les militaires concernés et leurs familles.

Le cabinet du ministre de la défense a été alerté dès sa prise de fonction au printemps 2012 et une délégation d'épouses de militaires a été reçue au ministère en octobre 2012. Une trésorerie immédiatement mobilisable de 30 millions d'euros devait être débloquée et une centaine de personnels supplémentaires affectés au traitement prioritaire des dossiers en souffrance.

Deux missions d'audit sur le système LOUVOIS devaient par ailleurs rendre leurs premières conclusions en décembre 2012 et un moratoire d'au moins deux mois était décidé concernant l'entrée dans le système LOUVOIS de l'armée de l'air et de la gendarmerie.

Il semble pourtant que l'application du logiciel LOUVOIS entraîne toujours de sérieuses difficultés : retards ou erreurs dans le paiement des soldes (certains militaires étant trop payés et d'autres pas du tout) et non-versement des primes des soldats actuellement en opérations extérieures... 10 000 familles de militaires français seraient concernées.

Aussi, elle souhaiterait savoir comment et dans quel délai le ministère de la défense pense mettre un terme à l'ensemble de ces dysfonctionnements. Elle souhaiterait également connaître les préconisations des audits commandés par le ministre et savoir si, compte tenu des difficultés encore rencontrées à ce jour, le ministère a levé ou a prolongé le moratoire concernant l'entrée dans le système LOUVOIS de l'armée de l'air et de la gendarmerie.

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Réponse du Ministère de la défense publiée le 19/09/2013

Dans le cadre d'une réforme de la fonction ressources humaines (RH) du ministère de la défense, a été mis en service, au mois d'octobre 2011, le logiciel Louvois (LOgiciel Unique à VOcation Interarmées de la Solde), un calculateur de rémunération « raccordé » aux systèmes d'information des ressources humaines (SIRH) des armées, dans lesquels se trouvent les données nécessaires au calcul de la solde. Ce logiciel, qui avait initialement vocation à calculer la solde des militaires des armées, des services interarmées et de la gendarmerie, vise à remplacer les chaînes autonomes de traitement de la solde pour économiser les effectifs exigés par la révision générale des politiques publiques. Ce projet de grande ampleur s'est inscrit dans une démarche complexe et risquée. Complexe, parce que le calcul de la solde des militaires obéit à des règles particulières, nombreuses, parfois anciennes, qui correspondent à la grande diversité de leurs compétences, de leurs situations et des missions qui leur sont confiées ; risquée, parce qu'elle touchait à la rémunération et que, dans ce domaine, tout retard ou toute anomalie prend tout de suite, légitimement, des proportions importantes. En dépit de ces éléments qui ne pouvaient être ignorés, la méthode adoptée par le précédent Gouvernement pour le déploiement du logiciel Louvois est identique à celle appliquée à la conception et l'ouverture à marche forcée des bases de défense (BdD). Cette politique de la précipitation, dispensée d'évaluations préalables et d'études d'impact, a eu pour conséquence, lors de la brutale bascule informatique des soldes, l'émergence de difficultés majeures de fonctionnement et le mécontentement légitime du personnel directement affecté. Là encore, le précédent Gouvernement, qui n'avait pas pris toute la mesure des risques et de la complexité de ce projet, a alors tardé à réagir lorsque les premières difficultés sont apparues. Conscient de ces graves dysfonctionnements et les jugeant inacceptables, le ministre de la défense a estimé que le système devait être stabilisé sans délai et les difficultés sérieusement prises en compte. Il a demandé un état des lieux précis des dossiers encore en souffrance, afin que tous les moyens nécessaires à leur régularisation soient mis en œuvre. Dans cette même dynamique, il a présenté, dès le 25 septembre 2012, au centre expert RH soldes de l'armée de terre de Nancy (CERHS), un plan d'action opérationnel le jour-même, se concrétisant par : - le renforcement des effectifs du CERH-S pour lui permettre de traiter de façon satisfaisante toutes les demandes dans un délai raisonnable ; - la mise en place, depuis le 1er octobre dernier, d'un numéro vert accessible aux militaires et à leurs familles afin de répondre directement à toutes leurs questions et de les accompagner dans le traitement de leur dossier ; - la création d'un « groupe utilisateurs » rassemblant les acteurs de la solde du ministère, les représentants des militaires et de leurs familles, et auquel est associé le conseil supérieur de la fonction militaire ; - l'instauration d'un contrôle mensuel de la fonction solde permettant une double remontée des incidents, à la fois par la chaîne de commandement et par la chaîne solde ; - l'établissement d'un dispositif spécifiquement dédié au suivi du versement des soldes et des primes du personnel de retour d'opérations extérieures (OPEX), s'inscrivant dans le devoir de reconnaissance de la Nation envers celles et ceux que leur engagement expose à de difficiles et périlleuses missions. Pour accompagner ces actions, le ministre a décidé la création d'une mission d'appui avec le déploiement d'équipes de spécialistes dans toutes les bases de défense afin que l'ensemble des dysfonctionnements puisse être clairement identifié, pris en compte et résolu dans les plus brefs délais. Par ailleurs, le 30 octobre 2012, le ministre a annoncé la mise en place d'une procédure exceptionnelle d'urgence pour que tous les militaires vis-à-vis desquels l'État a une dette soient payés immédiatement par le centre interarmées d'administration de la solde sur fonds d'avance, lorsqu'ils en font la demande. Près de 30 millions d'euros ont été versés depuis l'instauration de ce dispositif, qui se poursuit au titre de l'année 2013. Tous les militaires qui ont demandé la régularisation des sommes qui leur étaient dues ont été payés ou sont en passe de l'être. Dans le même temps, le ministre de la défense s'est efforcé de sensibiliser les opérateurs bancaires aux difficultés auxquelles la communauté militaire est temporairement susceptible d'être confrontée. Simultanément, des solutions de nature à garantir une juste appréciation de la situation des militaires au regard du calcul et des modalités de recouvrement de leur impôt sur le revenu ont été étudiées par le ministère de la défense en liaison avec la direction générale des finances publiques. Par mesure dérogatoire à l'article 12 du code général des impôts, il a notamment été convenu que le revenu d'activité imposable des intéressés au titre de l'année 2012 serait calculé sur la base du montant qu'ils auraient perçu si les dysfonctionnements liés à Louvois ne s'étaient pas produits. Des imprimés modèle 2470 et des certificats administratifs mentionnant ce montant ont été établis et adressés aux services administratifs et/ou aux militaires concernés afin de les aider à renseigner leur déclaration de revenus et de servir de justificatif auprès des différents services sociaux. En outre, à la suite des recommandations des audits réalisés à la demande du ministre, un plan d'action décliné en douze chantiers couvrant l'intégralité du spectre de la fonction solde a été lancé début 2013. A cet égard, une attention particulière est portée aux domaines suivants : gouvernance de l'ensemble des composantes du dispositif, pilotage fonctionnel de la chaîne, suivi comptable et réglementaire, pilotage des systèmes d'information et gestion du référentiel métier. Enfin, le moratoire sur les entrées de l'armée de l'air et de la gendarmerie dans le système Louvois, initialement prévues respectivement en mars et septembre 2013, a été décidé afin de préparer ces deux bascules de gestion dans les meilleures conditions. L'armée de l'air et la gendarmerie sont associées, comme les autres armées, directions et services, à la réflexion et au travail de fond actuellement menés pour traiter les dysfonctionnements du logiciel et consolider l'ensemble des processus de calcul et de versement de la solde. La décision de « raccorder » les rémunérations des personnels de l'armée de l'air et de la gendarmerie au logiciel Louvois ne sera prise qu'à partir du moment où le ministre de la défense obtiendra l'assurance que cette opération ne dégradera pas le service rendu aux administrés. Le ministre de la défense veille personnellement à l'application de l'ensemble de ces mesures.

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