Question de M. DESESSARD Jean (Paris - ECOLO) publiée le 27/02/2014

M. Jean Desessard attire l'attention de Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur la situation des travailleurs frontaliers entre la France et la Suisse au regard de leur affiliation à l'assurance maladie.

À partir du 1er juin 2014, les travailleurs frontaliers qui, jusqu'à présent, disposaient d'un droit d'option vers une assurance privée, devront faire le choix entre une affiliation à l'assurance maladie française ou à l'assurance maladie suisse, la LAMal.

Si l'objectif d'équité et de participation de tous à la solidarité nationale est légitime, cette décision soulève des questionnements, notamment concernant l'accès aux soins.

En effet, l'offre de soins est très inégalement répartie de chaque côté de la frontière. Si les structures sanitaires suisses sont globalement bien dotées et réparties, de grandes disparités existent côté français où certains territoires, comme le Jura ou l'Ain, peuvent être qualifiés de déserts médicaux. À titre d'exemple, le pays de Gex compte 101 praticiens pour 100 000 habitants, toutes spécialités confondues, alors que la moyenne nationale s'établit à 286 praticiens.

La coopération, qui aurait dû permettre de répartir l'offre de soin de manière équilibrée des deux côtés de la frontière, n'a pas été suffisamment développée et son principe même se retrouve menacé par la fin du droit d'option.

La réintégration dans le droit commun des frontaliers comporte ainsi un risque important de surcharge pour les installations médicales en France. La conséquence pourrait être le développement de cliniques privées tout le long de la frontière pour prendre en charge le déficit de soins publics.

À ce titre, l'annonce faite le 20 janvier 2014, concernant la prise en charge par la sécurité sociale des soins ambulatoires et des consultations réalisées par un médecin traitant en Suisse, mérite d'être saluée.

Néanmoins, il existe toujours des incertitudes quant à la nature de la facilitation de l'accès aux soins en Suisse pour les personnes résidant dans une zone à faible densité médicale.

Sur l'aspect financier également, des questions subsistent. Les montants remboursés aux frontaliers pour les différentes prestations de soins effectuées en Suisse, hors soins d'urgence, ne sont pas connus, notamment les remboursements pour les prestations ambulatoires auprès du médecin traitant et des spécialistes ou pour les prestations hospitalières et les soins nécessitant des équipements lourds.

Dès lors, il lui demande comment le « dispositif frontalier » annoncé garantira l'accès aux soins de tous les frontaliers français, de chaque côté de la frontière, quels que soient leur situation ou leur lieu de résidence.

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Transmise au Ministère des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes


Réponse du Ministère des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes publiée le 30/10/2014

Depuis le 1er juin 2014, les travailleurs frontaliers de la Suisse, lorsqu'ils choisissent d'être assurés en France dans les conditions prévues par l'accord Union européenne - Suisse sur la libre circulation des personnes, doivent désormais s'affilier auprès de l'assurance maladie. Ils n'ont plus la possibilité de choisir un assureur privé. Ainsi, ceux qui détiennent un contrat auprès d'un assureur privé sont concernés par le basculement vers l'assurance maladie française. La fin du « droit d'option » était annoncée puisque c'est la loi elle-même qui prévoyait son extinction programmée, sans qu'il soit besoin de prendre une nouvelle mesure législative. Il s'agissait d'une dérogation, maintenue en 2002, puis prorogée en 2006 jusqu'au 31 mai 2014. Cette dérogation ne se justifiait plus au regard du caractère universel, mutualisé et solidaire de notre système de sécurité sociale. Elle soulevait un problème de constitutionnalité. Le débat parlementaire qui a eu lieu à l'automne 2013 a permis d'expliciter les tenants et aboutissants sur ce dossier et la concertation a été très étroite avec les associations de frontaliers. Le Gouvernement a été particulièrement soucieux du bon déroulement de la transition pour les frontaliers. Une mission a été confiée en ce sens à l'IGAS et à l'IGF ; toutes les administrations concernées ont travaillé à la mise en place du cadre juridique et opérationnel de la réforme. Ainsi, deux décrets publiés le 23 mai 2014 ainsi qu'une circulaire détaillent les modalités de mise en œuvre et apportent toutes les garanties aux intéressés quant à la qualité de leur couverture sociale tout en tenant compte de leur situation professionnelle et personnelle particulière. Pour faciliter cette transition, l'intégration dans le régime général peut intervenir à l'échéance annuelle du contrat d'assurance privée, soit entre le 1er juin 2014 et le 31 mai 2015 au plus tard. Les frontaliers qui le souhaitent peuvent bien entendu anticiper cette échéance et se rapprocher de leur caisse d'assurance maladie avant le terme de leur contrat. La prise en charge des soins par l'assurance maladie française est effective dès la fin du contrat d'assurance privée. S'agissant des modalités de prise en charge des soins réalisés en Suisse, il est important de rappeler que les règles européennes et les procédures existantes en la matière offrent d'ores et déjà un cadre adapté pour les soins transfrontaliers. En outre, différentes mesures d'assouplissement ont été prises par le Gouvernement pour tenir compte de la situation spécifique des frontaliers, en vue de garantir l'accès et la continuité des soins. Ainsi est prévue la possibilité de choisir un médecin traitant en France ou en Suisse, afin de pouvoir respecter le parcours de soins et de bénéficier d'un meilleur remboursement. L'accès aux soins programmés hospitaliers ou coûteux en Suisse est facilité pour les frontaliers résidant dans des zones à faible densité médicale. S'agissant des soins lourds entamés en Suisse avant le 1er juin 2014, le remboursement par l'assurance maladie est autorisé dans certaines conditions pour les travailleurs frontaliers suisses et leurs ayants droit. Pour les frontaliers qui effectueraient des soins par commodité en marge de leur travail, le remboursement sur la base des tarifs suisses est possible. En revanche, les autres soins ambulatoires non urgents seront remboursés sur la base des tarifs français. La date du 1er juin 2014 marque le terme d'un processus dense au cours duquel toutes les parties prenantes ont pu faire valoir leurs points de vue et ont été entendues. Les services des CPAM et des URSSAF sont à l'écoute des frontaliers ; un numéro d'appel dédié a par ailleurs été mis en place (0 811 910 024).

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