Question de M. LEFÈVRE Antoine (Aisne - UMP) publiée le 03/07/2014

M. Antoine Lefèvre attire l'attention de Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur les réflexions engagées par les Unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF), et celle de Picardie en particulier, dans le cadre de la commission de recours amiable (CRA).

En effet, celle-ci connaît de plus en plus de dossiers qui concernent la législation, avec de lourdes pénalités, et qui l'interpellent dans son rôle amiable. La Picardie, dans le contexte économique et social national dégradé que nous connaissons, se singularise par un tissu économique de petites et moyennes entreprises (PME) en grande souffrance.

Or, dans de nombreux dossiers, notamment de négociation annuelle obligatoire (NAO) ou de mise en place d'un plan senior, les textes prévoient des dispositifs « couperets » pour constater la présence ou l'absence de négociation ou de plan.

Dans un contexte de complexification constante de la législation, ces textes ne prévoient aucune marge d'appréciation, ni de la situation économique des entreprises, ni de la bonne foi des cotisants.

Alors que d'autres administrations, notamment l'administration fiscale ou les directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE), disposent d'un pouvoir d'appréciation - comme il est prévu, par exemple, dans la circulaire ministérielle du 28 octobre 2011 relative à la mise en œuvre du dispositif de pénalité financière en matière d'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes -, celui-ci n'est pas reconnu aux URSSAF.

Ainsi et afin de maintenir l'acceptation du prélèvement social mais surtout d'assurer la sauvegarde des emplois menacés par ces lourdes pénalités et donc les cotisations futures correspondant à ces emplois, le conseil d'administration de ces URSSAF souhaiterait une modification de la législation qui confierait à la CRA un pouvoir d'appréciation identique à celui dont disposent notamment les administrations citées ci-dessus.

À l'heure où l'objectif partagé par l'ensemble des acteurs est bien de promouvoir l'emploi, l'idée serait de laisser, dans des conditions à définir et moyennant un encadrement à prévoir, aux administrateurs la possibilité d'accorder aux entreprises, selon la situation, un délai de mise en conformité par rapport à la législation, une modulation des pénalités pour tenir compte de la réalité de la situation des entreprises.

Il lui demande donc si le Gouvernement peut être réceptif à de telles propositions.

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Réponse du Secrétariat d'État, auprès du ministère des affaires sociales et de la santé, chargé de la famille, des personnes âgées et de l'autonomie publiée le 23/07/2014

Réponse apportée en séance publique le 22/07/2014

M. Antoine Lefèvre. Madame la présidente, je souhaite appeler l'attention de Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur la question du pouvoir d'appréciation des commissions de recours amiable d'URSSAF.

En effet, l'URSSAF connaît de plus en plus de dossiers qui concernent l'interprétation de la législation, avec de lourdes pénalités, et interpelle ces commissions dans leur rôle amiable. La Picardie, région que vous connaissez par ailleurs fort bien, madame la secrétaire d'État, dans le contexte économique et social national dégradé que nous subissons, se singularise par un tissu économique de petites et moyennes entreprises en très grande souffrance.

Or, dans de nombreux dossiers, notamment de négociation annuelle obligatoire, les NAO, ou de mise en place d'un plan senior, les textes prévoient des dispositifs « couperets » pour constater la présence ou l'absence de négociation ou de plan.

Dans un contexte de complexification constante de la législation, ces textes ne prévoient aucune marge d'appréciation, ni de la situation économique des entreprises, ni de la bonne foi des cotisants.

Or d'autres administrations, notamment l'administration fiscale ou les directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi, les DIRECCTE, disposent d'un pouvoir d'appréciation, comme cela est prévu, par exemple, dans la circulaire ministérielle du 28 octobre 2011 relative à la mise en œuvre du dispositif de pénalité financière en matière d'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes. Je sais, madame la secrétaire d'État, que vous êtes particulièrement sensible à cette question.

Cette circulaire précise : « si l'inspecteur ou le contrôleur du travail estime, à la lumière des documents transmis,... » et un peu plus loin« la décision ou non d'appliquer la pénalité appartient en l'espèce au DIRECCTE, qui ne peut déléguer son pouvoir d'appréciation ou de notification ».

Eh bien, ce pouvoir d'appréciation n'est pas reconnu aux URSSAF.

À cet égard, permettez-moi de rappeler le difficile dossier, il y a quelques années, des cotisations des associations, en particulier des centres communaux d'action sociale, les CCAS, des petites communes, pour qui l'interprétation des textes était floue. Ces CCAS se sont vus dans l'obligation d'effectuer des reversements de cotisations sur plusieurs années, avec pénalités, dont les montants avaient mis en cause leur pérennité, alors que l'utilité de ces services est unanimement reconnue.

Aussi, et afin de maintenir l'acceptation du prélèvement social, mais surtout d'assurer la sauvegarde des emplois menacés par ces lourdes pénalités et donc des cotisations futures correspondant à ces emplois, le conseil d'administration de ces URSSAF souhaiterait une modification de la législation. Il aimerait que soit confié à la commission de recours amiable un pouvoir d'appréciation identique à celui dont disposent notamment les administrations que j'ai précédemment citées.

À l'heure où l'objectif partagé par l'ensemble des acteurs est bien de promouvoir l'emploi, l'idée serait de laisser aux administrations, dans des conditions à définir, et moyennant un encadrement à prévoir, la possibilité d'accorder aux entreprises, selon les cas, un délai de mise en conformité avec la législation et une modulation, voire une suppression, des pénalités afin de tenir compte de la situation réelle des entreprises.

Je vous remercie, madame la secrétaire d'État, de bien vouloir m'indiquer si le Gouvernement peut être réceptif à de telles propositions.

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Laurence Rossignol,secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée de la famille, des personnes âgées et de l'autonomie. Monsieur le sénateur, je vous prie d'abord d'excuser l'absence de Mme Marisol Touraine, dont l'agenda ne lui permettait pas d'être présente ce matin. Je vous confirme que je connais effectivement bien la Picardie, de même que le Nord-Pas-de-Calais, deux régions ayant en commun le même dynamisme.

Les commissions de recours amiable des organismes de sécurité sociale donnent, sur les réclamations qui leur sont soumises, leur avis aux conseils d'administration, qui statuent et notifient leurs décisions aux intéressés.

Dépourvues de caractère juridictionnel, ces instances sont tenues de respecter la réglementation dans le traitement des réclamations qui leur sont adressées. Leurs décisions sont soumises au contrôle de la Mission nationale de contrôle et d'audit des organismes de sécurité sociale, qui veille au respect de la légalité des décisions prises par les organismes de sécurité sociale.

Ces commissions n'ont donc pas vocation, dans le cas des redressements réalisés par les URSSAF, à apprécier les éléments économiques liés à la conjoncture ou à la situation financière de l'entreprise. La prise en compte de la situation financière de l'entreprise n'entre pas en considération dans la procédure de contrôle et son examen par la commission de recours amiable, qui relèvent d'une appréciation juridique sur le respect de la réglementation par l'entreprise. La prise en compte des considérations économiques peut en revanche intervenir dans l'application du recouvrement des montants redressés.

S'agissant des exonérations de cotisations sociales, le législateur a expressément conditionné leur bénéfice à l'ouverture d'une négociation annuelle sur les salaires. La circulaire du 7 mars 2011 en a précisé la mise en œuvre et les modalités de contrôle. Le formalisme lié à la justification de l'engagement d'une négociation qui n'a pas conduit à la conclusion d'un accord est assez souple.

L'employeur qui n'a pas respecté son obligation d'engager une négociation doit alors régulariser spontanément sa situation en diminuant de 10 % le montant des exonérations qu'il a pratiquées, sans application de majorations de retard. L'employeur qui n'a pas procédé à cette régularisation se verra notifier, en cas de contrôle, un redressement du montant de 10 % des exonérations qu'il aurait dû régulariser, assorti, le cas échéant, de majorations de retard. Ce n'est qu'en cas de répétition durant trois années consécutives du non-respect de son obligation d'engager une négociation que l'employeur se verra sanctionné par une annulation de la totalité de ses exonérations.

Au vu de ces éléments, monsieur le sénateur, il n'y a pas lieu de permettre de déroger aux sanctions prévues par les textes pour les sociétés qui n'auraient ni engagé de négociation, ni régularisé le montant de leurs exonérations.

Mme la présidente. La parole est à M. Antoine Lefèvre.

M. Antoine Lefèvre. Je suis un peu déçu par la réponse de Mme la secrétaire d'État, car elle n'incite pas vraiment à la simplification des procédures, alors qu'il me semblait justement que cette question était d'actualité.

En effet, aujourd'hui débute à l'Assemblé nationale l'examen d'un texte défendu par le secrétaire d'État chargé de la réforme de l'État et de la simplification, M. Thierry Mandon, dont l'objet est de s'attaquer, c'est bien le moins, à la simplification en faveur des entreprises.

À cette occasion, ne serait-il pas intéressant de prendre en compte les réflexions des administrateurs sur le terrain, qui sont tous les jours confrontés à la vie réelle des entreprises, laquelle n'est pas celle qui est souvent rêvée dans les bureaux parisiens ?

Le Gouvernement nous avait il y a peu promis un choc de simplification. Nous avons surtout eu le choc, nous attendons maintenant la simplification.

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