Question de M. CAPO-CANELLAS Vincent (Seine-Saint-Denis - UDI-UC) publiée le 17/10/2014

Question posée en séance publique le 16/10/2014

M. Vincent Capo-Canellas. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

À l'occasion du récent renouvellement d'une moitié du Sénat, les élus locaux ont exprimé leur incompréhension devant un certain nombre de réformes engagées par le Gouvernement, devant l'absence de vision claire du devenir de nos collectivités locales et plus largement des territoires ainsi qu'une forte inquiétude quant aux baisses des dotations. Voilà pourquoi nous souhaitons que le Sénat soit associé, mieux associé encore à la réforme territoriale.

Cette inquiétude sur la réforme territoriale s'inscrit également dans un cadre plus global, celui d'une situation économique et sociale où, malheureusement, les mauvaises nouvelles s'accumulent : appréciation très négative sur le projet de budget tant de la part du Haut Conseil des finances publiques que de l'Eurogroupe, et peut-être demain de la Commission européenne, qui doute de la réalité des économies attendues ; absence de lisibilité de la politique du Gouvernement quant aux nécessaires réformes du marché du travail – beaucoup de choses ont été dites sur le sujet ; sentiment que notre pays ne sait pas entreprendre les réformes indispensables pour retrouver sa compétitivité et sa croissance.

La France s'engage dans ce contexte très incertain, avec des déficits accrus, vers un niveau de dette qui a déjà franchi la barre des 2 000 milliards d'euros. Cela peut-il durer ?

La question n'est pas tant de savoir qui est fautif ou qui a tort. La question n'est pas de renvoyer aux héritages des uns ou des autres. Elle est de déterminer comment le pays va s'en sortir. Je le dis avec gravité : il n'est plus temps de tergiverser.

La nouvelle majorité sénatoriale, dans laquelle le groupe UDI-UC jouera tout son rôle, s'est engagée dans la voie d'une opposition lucide, donc constructive, selon les mots employés par le président Larcher. Lucides, nous devons l'être face à l'état du pays et aux difficultés auxquelles sont confrontés les Français. Responsables, nous le serons si le Gouvernement emprunte un cap réaliste de réformes et d'adaptation de notre pays au monde moderne.

Monsieur le Premier ministre, il faut parler un langage de vérité, certes, mais surtout agir à la hauteur des enjeux. Au-delà de vos déclarations, nous vous jugerons aux actes. Ce sont ces actes que nous attendons, des actes forts.

La démocratie parlementaire et le dialogue avec le Sénat, entre majorité et opposition, peuvent permettre d'améliorer substantiellement tant la réforme territoriale que le projet de budget et d'engager enfin les réformes structurelles dont la France a besoin. Êtes-vous prêt à faire œuvre utile et à ouvrir le dialogue avec le Sénat ou resterez-vous tourné vers les plus à gauche de votre majorité, ceux-là mêmes qui refusent les réformes nécessaires à l'adaptation de notre pays ? (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.)


Réponse du Premier ministre publiée le 17/10/2014

Réponse apportée en séance publique le 16/10/2014

l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre, que je remercie de sa présence.

M. Manuel Valls,Premier ministre. Depuis les élections du 28 septembre dernier, il ne m'a pas échappé qu'une nouvelle majorité siégeait au Sénat. Je tiens d'ailleurs à féliciter Gérard Larcher pour son élection. Je ne doute pas, monsieur le président du Sénat, que nous aurons ensemble, dans le respect de nos opinions, un dialogue fructueux.

Je le dis très clairement au Sénat : le Gouvernement entend respecter votre assemblée, comme je l'ai toujours fait à la place qui était la mienne. Le Sénat, quels que soient les contours de sa nouvelle majorité, doit poursuivre son travail et continuer à participer pleinement à l'élaboration de la loi - j'ai déjà eu l'occasion de le rappeler. Je suis heureux de constater, monsieur le sénateur, que c'est également votre volonté.

Aujourd'hui, comme cela a été rappelé à l'instant, notamment par Bernard Cazeneuve, le Sénat examine le projet de loi renforçant les dispositions relatives à la lutte contre le terrorisme. Au vu de la qualité des débats qui ont eu lieu, il semble que votre assemblée s'apprête à adopter ce texte après y avoir apporté toute son expertise - que j'avais moi-même pu apprécier voilà presque deux ans lors de l'examen du projet de loi relatif à la sécurité et à la lutte contre le terrorisme -, et je m'en réjouis. C'est la preuve que, sur de nombreux sujets, comme celui de la réforme ferroviaire adoptée au Sénat l'été dernier, nous sommes capables d'avancer ensemble et de prendre des décisions que nous jugeons utiles - vous l'avez souligné, monsieur le sénateur - pour l'avenir du pays.

Vous avez exprimé des inquiétudes, notamment sur la réforme territoriale. Là aussi, je souhaite que le dialogue se poursuive. Je veux pouvoir expliquer clairement la volonté du Gouvernement afin que nous puissions débattre sereinement de l'avenir de nos collectivités territoriales. C'est pourquoi, sur la proposition du président Gérard Larcher, je viendrai devant votre assemblée le 28 octobre prochain pour une déclaration, suivie d'un débat, sur la réforme territoriale, en application de l'article 50-1 de la Constitution. Je pense que ce débat sera utile ; il permettra - c'est en tout cas mon souhait, ma volonté, mon intention -, de donner de la cohérence et du sens, qui sont si nécessaires.

L'inquiétude, les questions, les doutes, je les ai, comme vous, entendus. Ce débat aura donc toute son importance, juste avant d'aborder le texte sur la nouvelle carte des régions - dont, je l'espère, vous vous saisirez cette fois pleinement -et d'examiner le projet de loi concernant la répartition des compétences, à la fin de l'année. C'est une réforme majeure.

Par ailleurs, dans les prochaines semaines, le Sénat examinera le projet de loi de financement de la sécurité sociale et le projet de loi de finances pour 2015. Sur l'ensemble de ces textes, je souhaite que le Sénat apporte des améliorations. Le Gouvernement est prêt à entendre les propositions de la majorité sénatoriale sur l'avenir du pays. Il faut en effet éclairer le pays à la fois sur les économies qu'il est indispensable de réaliser, sur le projet européen ainsi que sur les priorités que chacun peut défendre.

Vous avez dit vous-même qu'il ne s'agissait pas de se rejeter mutuellement les responsabilités. Très bien ! Éclairons le pays sur les propositions pour l'avenir. En tout cas, le Gouvernement entre dans ce débat avec la majorité sénatoriale, sans oublier le rôle de la minorité et l'apport de chacun ici - je rappelle que le groupe socialiste et les radicaux de gauche sont présents au sein du Gouvernement. Je ne doute pas que les uns et les autres apporteront toute leur part à la construction de l'avenir du pays.

Voilà, monsieur le sénateur, l'état d'esprit qui est celui du Gouvernement. (Applaudissementssur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE et de l'UDI-UC.)

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