Question de M. LE SCOUARNEC Michel (Morbihan - CRC) publiée le 04/12/2014

M. Michel Le Scouarnec attire l'attention de M. le ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique sur la situation délicate de l'entreprise STX de Lorient, spécialisée dans la construction navale de navires de 20 à 120 mètres, soit civils pour le marché national, soit militaires à l'export.
Depuis plusieurs années, les carnets de commandes se remplissent aléatoirement, impactant directement la charge de travail. Malgré ces aléas, STX Lorient a su rebondir et porter une volonté ambitieuse de poursuite des activités, avec la construction de sept navires en un peu plus d'un an. Tous ces projets se sont avérés à l'équilibre, malgré un effectif en constante diminution, prouvant que le savoir-faire des salariés et leurs compétences ne sont plus à démontrer.
Or, lors d'un récent comité d'entreprise, la direction a annoncé le prochain licenciement de 47 salariés, soit plus de 50 % de l'effectif actuel comptant 97 employés. Cette déclaration inattendue a légitimement accablé l'ensemble du personnel qui se bat au quotidien pour démontrer tout le potentiel de développement de cette entreprise. L'incongruité de la situation des chantiers STX de Lorient réside dans le manque de commandes, alors qu'une main d'œuvre qualifiée et expérimentée est disponible. Les récentes annonces de la direction ne permettent pas d'envisager sereinement l'avenir de ces chantiers, d'autant que le service commercial et le service projets ne sont plus présents sur le site, complexifiant encore plus sa visibilité et sa reconnaissance par de potentiels commanditaires. L'inquiétude est grande puisque cette nouvelle pourrait présager d'une éventuelle fermeture du site de Lorient. Pourtant de possibles commandes sont déjà identifiées, comme, par exemple, la construction d'un roulier pour l'île de Groix, dans le département du Morbihan. D'autres appels à projets similaires pourraient compléter les activités de STX Lorient mais le contexte budgétaire contraint et les baisses des dotations freinent durablement les projets d'investissement des collectivités locales. Les salariés de STX Lorient connaissent leur potentiel de production. Ils ne demandent pas des moyens inconsidérés pour sauvegarder leur outil de travail mais simplement une reconnaissance de leurs compétences qui peuvent être plus qu'utiles, dans la bataille de la compétitivité industrielle menée par notre pays.
Aussi lui demande-t-il les dispositions envisagées pour venir en aide à cette entreprise qui possède un appareil de production aguerri, malheureusement ralenti par un manque de projets ou de commandes, notamment publiques.

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Réponse du Secrétariat d'État, auprès du ministère de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargé du numérique publiée le 04/02/2015

Réponse apportée en séance publique le 03/02/2015

M. Michel Le Scouarnec. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, de nombreuses activités industrielles sont liées à l'identité maritime du département du Morbihan, à l'image du port de pêche de Lorient, mais aussi des chantiers STX de Lorient.

Ces chantiers traversent une situation délicate puisque la direction de STX France a engagé une procédure de licenciement collectif de quarante-sept salariés, soit 50 % de l'effectif actuel, qui compte quatre-vingt-dix-sept personnes.

Cette déclaration a légitimement accablé l'ensemble du personnel, qui a porté une volonté ambitieuse de poursuite des activités avec la construction de sept navires en un peu plus d'un an. Tous ces projets se sont révélés à l'équilibre malgré un effectif en constante diminution, ce qui prouve que le savoir-faire de ces travailleurs et leurs compétences ne sont plus à démontrer.

Alors que la société STX Lorient dispose d'une main-d'œuvre qualifiée et expérimentée, sa situation difficile s'explique par le manque de commandes.

Les récentes annonces de la direction ne permettent pas d'envisager sereinement l'avenir, d'autant que le service commercial et le service projets ne sont plus présents sur le site, ce qui complexifie encore plus la visibilité et la reconnaissance de l'entreprise par d'éventuels commanditaires.

Les salariés de STX Lorient connaissent leur potentiel de production. Ils demandent non pas des moyens inconsidérés pour sauvegarder leur outil de travail, mais simplement une reconnaissance de leurs compétences, qui peuvent être plus qu'utiles dans la bataille de la compétitivité industrielle à laquelle notre pays est confronté.

Ainsi, les salariés portent un projet alternatif au plan social de l'entreprise, axé sur l'anticipation des travaux sur les bateaux, la formation professionnelle pour accroître la polyvalence des compétences, le prêt de personnels ou encore la construction de panneaux armés pour les paquebots ou d'une barge. Ce dernier projet rapporterait à lui seul 15 000 heures de travail et coûterait moins cher à mettre en œuvre que le plan social.

Le chantier STX de Lorient est important pour l'ensemble du Morbihan, car 250 sous-traitants dépendent également de la pérennité de ses activités. La région Bretagne, consciente du potentiel de l'entreprise, est prête à accorder des moyens à la formation professionnelle, après avoir déjà investi 50 millions d'euros pour le port de Lorient, dont 5 millions d'euros spécifiquement pour STX avec l'aménagement du quai de transport de chalands de débarquement, sur la rive gauche du Scorff.

Par ailleurs, les autres chantiers seraient à saturation, ce qui prouve que, si l'on s'en donnait les moyens, des solutions et des perspectives existeraient.

Après la rencontre avec une délégation du personnel le 8 janvier dernier à Matignon et au ministère de la défense, il serait opportun de s'interroger sur les dispositions que l'État pourrait prendre pour venir en aide à toutes les entreprises qui, à l'image de STX Lorient, possèdent un dispositif aguerri de production, malheureusement ralenti par un manque de projets ou de commandes.

Madame la secrétaire d'État, quels engagements concrets pouvez-vous prendre aujourd'hui afin d'apporter un peu d'espoir aux salariés de STX Lorient ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Axelle Lemaire,secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du numérique. Monsieur le sénateur, je vous prie tout d'abord d'excuser M. le ministre de l'économie, qui est actuellement mobilisé sur le projet de loi pour la croissance et l'activité, en discussion à l'Assemblée nationale. Il m'a chargée de vous transmettre sa réponse.

La société STX France Lorient est une filiale de STX France SA. Elle est spécialisée dans la construction navale, notamment de patrouilleurs militaires et de petits ferries, et emploie 94 salariés, dont 4 personnes en détachement de STX France SA ou mises à disposition par un groupement d'employeurs.

Depuis la création de STX France Lorient en 1993, ce sont plus de 30 navires qui sont sortis des cales de cette entreprise. Le site combine à la fois la taille humaine, la flexibilité, l'écoute du client. C'est la raison pour laquelle il a pu devenir une référence pour certains segments du marché, notamment les patrouilleurs et les prototypes. Ce résultat s'explique aussi par l'excellence de ses travailleurs, que vous avez eu raison de souligner.

Le chantier fait toutefois face depuis plusieurs années à des difficultés financières, avec des prises de commandes insuffisantes sur un marché très concurrentiel. Aucune commande n'a été engrangée depuis juillet 2013, en dépit des annonces concernant le plan de charge de STX. Celui-ci se limite à la construction d'un patrouilleur pour la marine du Sénégal, dont la livraison était prévue en janvier dernier, et la fabrication de cheminées pour STX France SA, qui doivent être livrées en mai 2015.

Dans ce contexte, l'adaptation d'une stratégie industrielle et la restructuration paraissent indispensables pour éviter le pire. La chaudronnerie et la fabrication de coques en sous-traitance vont ainsi aider à améliorer la remise en situation du chantier, qui a bénéficié d'apports en liquidités de la part de sa maison mère à hauteur de 18 millions d'euros au début de l'année 2014.

Cette stratégie implique malheureusement la suppression de 47 postes chez STX Lorient. Tout sera toutefois mis en œuvre pour en limiter les effets, notamment en travaillant sur le reclassement interne, qui devra limiter au maximum le nombre de licenciements effectifs.

La société a répondu à un appel d'offres passé par le conseil général du Morbihan pour la construction d'un navire de desserte de l'île de Groix. La réponse est prévue en mars 2015. Si l'État ne peut pas interférer dans la commande publique d'une collectivité, il sait le conseil général du Morbihan, autorité en matière de transport maritime, soucieux de l'enjeu industriel lié à cette commande.

M. le président. La parole est à M. Michel Le Scouarnec.

M. Michel Le Scouarnec. Madame la secrétaire d'État, vous n'avez pas vraiment apporté de réponse à la question que j'ai posée. Je suis déçu que la qualité et la compétence de la main-d'œuvre ne soient pas davantage prises en compte.

S'agissant de la commande du conseil général du Morbihan, je suis déjà intervenu l'an dernier auprès de cette collectivité pour lui demander d'accélérer le dossier. Néanmoins, il n'est pas certain que STX Lorient remporte le marché. Les travailleurs n'ont donc aucune certitude que le licenciement de personnels, que vous reconnaissez être très bien formés, performants et compétents, puisse être limité.

La situation est extrêmement douloureuse. Ces travailleurs auraient voulu des assurances pour leur avenir ; ils n'en ont pas aujourd'hui. Le reclassement n'est pas une solution, car cela revient à des pertes d'emploi. Alors que, comme vous l'avez rappelé, 30 navires ont été construits depuis 1993 et que STX a été reconnue comme une entreprise de qualité, à taille humaine, 47 suppressions de poste sont prévues.

Les travailleurs de STX Lorient ne peuvent qu'avoir peur du lendemain, alors que d'autres chantiers débordent de commandes. L'État n'a-t-il pas comme mission de sauver des entreprises ? En tout cas, je le redis, le reclassement n'est pas une solution.

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