Question de Mme LOISIER Anne-Catherine (Côte-d'Or - UDI-UC-R) publiée le 05/03/2015

Mme Anne-Catherine Loisier attire l'attention de Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes sur la situation d'urgence à laquelle sont confrontés les territoires ruraux, en matière d'accès à la médecine générale.

Lors d'une récente séance de questions cribles thématiques (Journal officiel débats Sénat 20 février 2015) portant sur la médecine libérale, la ministre a été interpellée sur l'état de la médecine générale en France et la carence de médecins généralistes en zone rurale a été soulignée.

En effet, notre système de santé tend à favoriser les disciplines médicales spécialisées, au détriment de la qualification de généraliste, dissuadant ainsi les jeunes praticiens d'opter pour une discipline pourtant nécessaire et recherchée dans les territoires ruraux.

Le manque de vocations, conjugué aux départs en retraites, crée dans ces territoires, des situations dramatiques où l'accès aux soins n'est plus garanti.

En Haute Côte-d'Or, chaque semaine, elle est interpellée par des élus qui voient avec anxiété partir les derniers médecins ruraux, sans perspective de remplacement. En outre, avec le départ des généralistes, les autres professionnels de santé, tels que les pharmaciens rencontrent aussi des difficultés pour trouver des remplaçants, quand ils ne quittent pas eux-mêmes le territoire.

Les citoyens des zones rurales subissent aujourd'hui la « double peine » : carence de médecins et de professionnels de santé. Elle juge vital de réagir. Face à ces réalités, des solutions pour un aménagement médical du territoire ont déjà été évoquées : l'installation obligatoire sur une durée de cinq ans après obtention du diplôme ou encore la convention entre le futur praticien et les élus locaux.

Elle souhaiterait connaître ses intentions à ce sujet et les mesures qu'elle compte prendre face à la désertification médicale en milieu rural.

Plus généralement, elle interroge le Gouvernement sur la politique de santé qu'il compte mener pour préserver un égal accès aux soins, pour garantir notamment des outils aux élus locaux et enfin apporter des réponses concrètes aux inquiétudes et au sentiment d'abandon des populations rurales.

- page 465


Réponse du Secrétariat d'État, auprès du ministère des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargé de la famille, de l'enfance, des personnes âgées et de l'autonomie publiée le 24/06/2015

Réponse apportée en séance publique le 23/06/2015

Mme Anne-Catherine Loisier. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, ma question porte sur les difficultés d'accès à la médecine générale en zone rurale.

Le département de la Côte-d'Or, que vous connaissez bien pour vous y être encore rendue récemment, madame la secrétaire d'État, connaît, à l'image de l'ensemble du territoire national, de fortes inégalités en matière de répartition des professionnels de santé, notamment des médecins généralistes.

Ainsi, la densité de médecins généralistes libéraux par habitant en Bourgogne est de 88,5 pour 100 000 habitants, un chiffre inférieur à la moyenne nationale, qui s'établit à 96,4 médecins pour 100 000 habitants. Le manque de vocations, conjugué aux départs en retraite, crée dans ces territoires des situations dramatiques, l'accès aux soins n'étant plus garanti.

Une étude menée conjointement par la MSA Services Bourgogne-Franche-Comté et l'Agence régionale de santé de Bourgogne, en partenariat avec le conseil régional de l'ordre des médecins, démontre que la Haute Côte-d'Or représente le territoire où le nombre de médecins généralistes installés est le plus faible de la région.

Les élus de ce territoire m'interpellent régulièrement, car ils voient avec anxiété partir les derniers médecins en activité, sans perspective de remplacement. En outre, le départ de ces généralistes emporte souvent des conséquences pour les autres professionnels de santé, dont la continuité de l'activité sur le territoire est remise en cause. Ces professionnels, en particulier les pharmaciens, connaissent souvent eux-mêmes des difficultés pour trouver des remplaçants.

Nos concitoyens de zones rurales subissent donc une double peine, qui se caractérise par une carence, non seulement de médecins généralistes, mais aussi de professionnels de santé au sens large.

Face à ces réalités, madame la secrétaire d'État, il est vital de réagir, et ce de diverses manières.

On pourrait ainsi prévoir des installations plus encadrées, sur une durée restant à définir après l'obtention du diplôme, mais aussi l'établissement de conventions entre le futur praticien généraliste et les élus locaux. Vous avez déjà exploré ces pistes, je le sais, mais elles demeurent pour l'instant sans réel impact sur le territoire.

Vous le savez, madame la secrétaire d'État, l'angoisse des populations rurales face à la désertification médicale grandit. Dans ce contexte, il me semble donc important de connaître vos propositions.

Madame la secrétaire d'État, quelles sont les intentions de votre ministère et, plus largement, du Gouvernement à ce sujet ? Quelles mesures comptez-vous prendre pour stopper cette désertification médicale en zone rurale ?

Plus généralement, quelle politique de santé le Gouvernement entend-il mener pour préserver un égal accès aux soins et pour accompagner efficacement les élus locaux qui tentent de trouver des solutions et d'apporter des réponses concrètes au sentiment d'abandon des populations rurales ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Laurence Rossignol,secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, de l'enfance, des personnes âgées et de l'autonomie. Madame la sénatrice, améliorer l'accès aux soins de proximité et réduire les inégalités entre les territoires sont en effet des priorités du Gouvernement. C'est d'ailleurs dans ce cadre que Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes a lancé, fin 2012, le « pacte territoire-santé »,auquel vous faites référence.

Composé de douze engagements, ce pacte repose sur une approche pragmatique et mobilise tous les leviers, de la formation aux conditions d'exercice. Il exclut la mise en œuvre de mesures coercitives.

Où en sommes-nous aujourd'hui ? Le bilan, deux ans après la mise en œuvre du pacte, confirme bien qu'une nouvelle dynamique est lancée.

Le contrat d'engagement de service public s'adresse aux jeunes en formation, futurs médecins ou dentistes. Il leur permet de bénéficier d'une bourse en contrepartie d'une installation en zone fragile, pour une durée équivalente à celle de l'aide. Depuis sa création, 1 278 jeunes se sont engagés dans le dispositif, et plus de 400 contrats ont été signés rien que sur la campagne 2014-2015 !

Les contrats de praticiens territoriaux de médecine générale, les PTMG, permettent de sécuriser l'installation des jeunes médecins au cours de leurs deux premières années d'installation. Ce contrat a permis l'installation de 411 professionnels dans des territoires manquant de médecins. Dans votre département, le déploiement du « pacte territoire-santé » a ainsi permis de recruter de nouveaux médecins et de favoriser leur implantation, notamment à Auxonne, à Semur-en-Auxois, à Aiserey ou à Pouilly-en-Auxois.

Par ailleurs, les projets d'exercice coordonné sont en plein essor, confirmant ainsi qu'ils répondent aux attentes des professionnels de santé : il y avait 174 maisons de santé pluriprofessionnelles ; il devrait y en avoir plus de 800 en fonctionnement fin 2015 ! Le département de la Côte-d'Or n'échappe pas à ce mouvement puisque, à ce jour, quatre maisons de santé pluriprofessionnelles sont d'ores et déjà en activité, dont une dans votre ville, Saulieu, adossée au centre hospitalier. Et je sais combien vous avez œuvré pour que celle-ci ouvre rapidement. Une autre ouvrira ses portes en septembre, et d'autres projets sont en très bonne voie de concrétisation, signe d'une mobilisation de tous les acteurs concernés.

Tous ces exemples montrent bien qu'une véritable impulsion a été donnée.

Nous devons donc aujourd'hui poursuivre dans cette voie et conforter ces résultats. L'implication de tous, agences régionales de santé, collectivités territoriales, professionnels de santé, est, bien sûr, un élément clef du succès de notre politique. Il faut poursuivre notre mobilisation.

C'est pourquoi Marisol Touraine a souhaité inscrire le pacte territoire-santé dans le projet de loi de modernisation de notre système de santé, qui sera prochainement examiné par la Haute Assemblée.

M. le président. La parole est à Mme Anne-Catherine Loisier.

Mme Anne-Catherine Loisier. Nous voyons en effet l'efficacité de ces mesures dans nos territoires.

J'aimerais toutefois insister sur la nécessité de liens étroits entre les ARS et les responsables locaux, en particulier les maires, afin que les postes vacants de médecins soient mieux référencés et qu'un travail commun puisse être effectué pour offrir un meilleur accueil à ces professionnels, qu'il s'agisse notamment de leur logement ou de la scolarisation de leurs enfants.

Nous devons mettre en place des mesures plus incitatives. Vous évoquiez la maison de santé de ma bonne commune de Saulieu, madame la secrétaire d'État : celle-ci a malheureusement perdu son médecin, et nous ne parvenons pas à en retrouver un pour l'instant malgré l'attractivité du dispositif.

Il importe donc, je le répète, de renforcer les liens entre les ARS et les collectivités locales.

- page 6607

Page mise à jour le