Question de Mme LIENEMANN Marie-Noëlle (Paris - SOC) publiée le 02/04/2015

Mme Marie-Noëlle Lienemann attire l'attention de Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie sur la situation du site de stockage de déchets chimique à Wittelsheim (Haut-Rhin).
Ce site est géré par la société StocaMine et le devenir des déchets enfouis pose de graves interrogations en termes de sécurité sanitaire et environnementale.
En 1997, StocaMine a été autorisée à exploiter un stockage souterrain de déchets industriels. Depuis un grave incendie en 2002, elle n'accepte plus de déchets. À 500 mètres sous la surface gisent 44 000 tonnes de déchets, notamment cyanurés, arséniés, chromiques, mercuriels ou encore amiantés, présentant un haut degré de toxicité.
Le projet devait sauver l'emploi dans le bassin potassique et être réversible (principe de réversibilité imposé par la loi n° 92-646 du 13 juillet 1992 relative à l'élimination des déchets ainsi qu'aux installations classées pour la protection de l'environnement).
Les associations locales, soutenues par des élus locaux, se mobilisent depuis pour obtenir la fermeture de ce site et son déstockage, soulignant le risque de l'éventualité d'un confinement définitif des déchets pour la nappe phréatique.
La décision prise par le Gouvernement, en décembre 2012, de débloquer la somme de 100 M€ pour le déstockage partiel du site était une première étape, positive.
Cette décision contrastait avec l'immobilisme antérieur. Elle n'emporte pourtant l'adhésion ni des élus locaux concernés ni des associations. Tous craignent que l'extraction sélective de 4 700 tonnes de déchets, sur 44 000 tonnes, ne présente pas les garanties nécessaires à la préservation de la nappe phréatique. Ils doutent de l'usage de bentonite pour confiner définitivement 90 % des déchets.
Cette solution représente un pari hasardeux, fondé sur l'espoir que le site ainsi étanchéifié restera sûr jusqu'à ce que les matières stockées soient devenues inertes dans 100 ou 150 ans, sans que cela puisse être démontré.
Le choix du déstockage partiel implique le déplacement des déchets les plus dangereux vers un autre site de stockage en Allemagne, à Sondershausen. Cependant, il serait trop simple de considérer que le problème le plus grave est réglé parce que nous l'aurions éloigné du territoire national. Les questions qui se posent aujourd'hui à Wittelsheim ne manqueront pas de se poser à Sondershausen.
Tant que la solution pour éliminer les déchets ultimes se résume à les enfouir pour la modique somme de 260 € la tonne à Herfa-Neurode (principal site mondial de stockage de déchets dangereux), et de 180 € la tonne à l'époque de StocaMine, il n'est pas étonnant que la recherche de procédures et technologies permettant de recycler ces déchets afin d'en extraire tous ces métaux lourds toxiques et précieux reste secondaire. Il n'est plus possible, aujourd'hui, que l'État sous-traite la gestion des déchets à des entreprises pour lesquelles le traitement des déchets est une banale activité lucrative sans se soucier de leur devenir.
Ainsi, ré-évaluer le coût dérisoire du stockage ou de l'enfouissement en mines devrait inciter les producteurs de déchets, l'État et les collectivités à investir dans la recherche pour la détoxication et le recyclage des déchets. Nous ne pouvons plus nous contenter d'enfouir des déchets toxiques, quelle que soit la profondeur, et d'en laisser aux suivants la charge ! Au-delà de la difficulté présente, le site StocaMine est bien le révélateur d'une gestion dépassée des déchets ultimes.
Face à ce constat, elle lui demande comment les pouvoirs publics comptent traiter cette problématique dans une perspective de développement durable. Quelles sont les mesures engagées ou envisagées par le Gouvernement pour favoriser la recherche en termes de recyclage des déchets ultimes et de dépollution des sites, qui pourraient enfin déboucher sur des solutions innovantes et potentiellement créatrices d'emplois ?

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Transmise au Ministère de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargé des relations internationales sur le climat


Réponse du Ministère de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargé des relations internationales sur le climat publiée le 09/02/2017

La ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, souhaite tout d'abord confirmer l'importance qu'elle attache à ce que les opérations de déstockage des déchets de MDPA STOCAMINE et de fermeture du stockage se déroulent dans la plus grande transparence, en particulier sur la nature des déchets. Elle souligne l'inaction des gouvernements précédents, qui avait d'ailleurs été critiquée par la Cour des Comptes dans un récent rapport. C'est à l'issue d'une concertation, menée entre novembre 2013 et février 2014 sous le contrôle d'un garant désigné par la commission nationale du débat public (CNDP), qu'elle a demandé à ce que soit opéré un déstockage plus important que celui initialement prévu. Au regard des conditions d'accès et des risques pour les travailleurs, l'objectif de retrait des déchets avant fermeture a alors été porté de 56 % à 93 % du mercure contenu. De plus, le dossier de demande de prolongation pour une durée illimitée de l'autorisation de stockage souterrain de produits dangereux déposé en janvier 2015 a fait l'objet d'une tierce-expertise dont les conclusions ont été présentées lors de la commission de suivi de site (CSS) réunie le 8 juin dernier. Elles sont également disponibles sur le site internet de la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL). À la suite d'une vérification exhaustive de la composition des déchets par un laboratoire indépendant et de l'utilisation d'une technique d'analyse plus performante que celle utilisée lors de l'acceptation des déchets, le tiers expert a confirmé le caractère dimensionnant du mercure dans la perspective d'une fermeture définitive. Le mercure est finalement présent dans une quantité correspondant environ à la moitié de celle précédemment estimée. La tierce expertise confirme, de plus, le caractère prudent des hypothèses retenues dans le dossier de l'exploitant. Au regard des éclairages apportés par la tierce-expertise, et pour répondre aux observations de l'autorité environnementale (AE) du conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD), les services du ministre ont demandé à l'exploitant de compléter son dossier de demande de fermeture définitive. Le dossier complété a fait l'objet d'un nouvel examen par l'autorité environnementale du CGEDD, qui a rendu un nouvel avis le 7 septembre 2016, puis d'une enquête publique du 7 novembre au 15 décembre 2016. Il a également fait l'objet d'une présentation à la commission de suivi de site réunie le 7 décembre 2016. Il fera ensuite l'objet d'un avis du conseil départemental de l'environnement et des risques sanitaires et technologiques (CODERST) et du conseil supérieur de la prévention des risques technologiques (CSPRT) début 2017. C'est seulement à l'issue de cette procédure qu'une décision sera prise sur les conditions de cessation d'activité du stockage. Concernant les enjeux économiques, une fiscalité au travers de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) est actuellement mise en œuvre sur les déchets depuis plusieurs années et le stockage de déchets dangereux et non dangereux y est assujetti afin d'inciter à la valorisation lorsque c'est possible. Le poids de cette fiscalité sur l'élimination est en constante progression depuis sa mise en place et cette tendance pourrait se poursuivre jusqu'en 2025. Par ailleurs, la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte (LTECV) adoptée en 2015 témoigne de la volonté politique forte de favoriser le recyclage et de réduire au minimum l'élimination des déchets, un élément très structurant de son titre IV relatif à l'économie circulaire étant la division par deux du stockage de déchets à horizon 2025. Enfin, dans le cadre des investissements d'avenir, un appel à manifestations d'intérêt recyclage et valorisation des déchets existe pour promouvoir le recyclage. Cet appel à manifestations d'intérêt vise à soutenir le développement d'innovations et de solutions industrielles afin d'augmenter la réutilisation, le recyclage et la valorisation de matières issues de déchets.

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