Question de M. DUPONT Jean-Léonce (Calvados - UDI-UC) publiée le 16/07/2015

M. Jean-Léonce Dupont attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement sur les conséquences, pour les éleveurs, de l'effondrement des prix de la viande bovine. Cette filière possède le cheptel le plus important en Europe et l'élevage bovin occupe la moitié des espaces agricoles français. Le prix d'entrée des animaux à l'abattoir ne couvre pas le prix de revient d'un animal engraissé, il manque en effet 60 centimes par kilo pour avoir une exploitation équilibrée. C'est pourquoi il lui demande de bien vouloir lui indiquer quelles mesures il compte prendre pour répondre aux graves inquiétudes des éleveurs bovins.

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Réponse du Ministère de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt publiée le 24/09/2015

Les filières d'élevage traversent une période très difficile. Les prix à la production fortement dégradés ne permettent plus la rémunération des éleveurs et grèvent les trésoreries des exploitations, parfois déjà fragilisées depuis plusieurs années. Cette situation s'explique en partie par des tensions sur les marchés européens et mondiaux, mais elle trouve sa source également dans les difficultés structurelles d'organisation pour les filières viandes et dans la « guerre des prix » qui ne permet plus des relations équilibrées entre les différents acteurs de la filière alimentaire. Plusieurs tables rondes se sont tenues ces dernières semaines avec les représentants des filières bovine (lait et viande) et porcine, qui sont les plus touchées. Le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement a tenu à présider ces réunions, prenant toute la part de la responsabilité qui lui incombe dans cette crise afin de faire en sorte que les différents acteurs des filières s'accordent sur le constat de la difficulté de la situation des éleveurs et sur la nécessité d'en tenir compte dans le cadre de leur négociation commerciale. Depuis plusieurs semaines, en France, la chute des cours de la viande bovine a été stoppée, et les cours se redressent progressivement, atteignant des niveaux plus acceptables par les producteurs, dans un contexte pourtant baissier sur les marchés européens. Le ministre en charge de l'agriculture a présenté un plan de soutien à l'élevage, adopté lors du conseil des ministres du 22 juillet 2015. Il comprend des mesures d'urgence et des outils de moyen terme pour les 200 000 éleveurs français mais aussi les centaines de milliers de salariés qui travaillent dans les filières viandes et produits laitiers. Ces mesures viennent s'ajouter à l'ensemble de l'action du Gouvernement menée en soutien à l'élevage depuis 2012. Des mesures d'urgence ont en effet déjà été mises en œuvre en ce début d'année au sein des cellules d'urgence départementales que le ministre en charge de l'agriculture a demandé aux préfets de mettre en place dès le 20 février 2015. Plusieurs médiations sur les prix dans les principales filières avaient déjà abouti ces dernières années. Enfin, des mesures d'ordre structurel ont également été prises, notamment au travers de la réforme de la politique agricole commune (PAC) afin de réorienter les aides vers l'élevage ou encore la loi relative à la consommation, et la loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt. Le plan de soutien à l'élevage français s'articule notamment autour des axes suivants : les prix : la grande distribution s'est engagée à appliquer une hausse des prix pour certains produits, les industriels se sont engagés à répercuter ces hausses aux prix payés aux éleveurs, et la mobilisation de tous les acteurs de la restauration commerciale hors-foyer se poursuit. Cette revalorisation des prix au producteur est indispensable à la résolution de la crise, et c'est une priorité du Gouvernement. Le travail est engagé, le suivi des évolutions de prix et des comportements des différents acteurs est continu, notamment grâce à la mobilisation du médiateur des relations commerciales agricoles. Dans ce cadre, il est également indispensable que la grande distribution, la transformation, et toute la restauration commerciale hors domicile utilisent au maximum et mettent en valeur au mieux l'origine française des produits qu'ils vendent ou servent ; la restructuration de la dette : l'État prendra en charge une partie des intérêts d'emprunt des éleveurs à travers la mobilisation exceptionnelle du fonds d'allégement des charges pour les prêts courts/moyens et longs termes. La mise en place par BPIFrance d'un fonds de garantie dédié aux éleveurs permettra d'accompagner la restructuration par les établissements de crédit des dettes des éleveurs et l'allongement de leur maturité. Ce dispositif contribuera à assainir la situation financière des éleveurs les plus en difficultés de manière durable, à des conditions négociées avec les établissements bancaires, en mettant l'accent en particulier sur les jeunes installés et les récents investisseurs ; l'allègement des charges fiscales et sociales : les éleveurs les plus en difficulté bénéficieront d'un allègement de ces charges pour un montant de 600 M€, dont 100 M€ d'annulation et 500 M€ de report. Un ensemble de mesures (prises en charge et reports jusqu'à 3 ans du paiement des cotisations MSA, effacement de charges par le FAC, remises gracieuses de la taxe sur le foncier non bâti, report d'échéance de l'impôt sur le revenu et sur les sociétés, mensualisation (ou trimestrialisation au choix de l'éleveur) sans pénalité du remboursement de la TVA) est mis en œuvre sans délai, via les cellules d'urgence départementales regroupant tous les acteurs impliqués, sous l'égide des préfets ; la contractualisation : elle sera améliorée dans la filière lait et sera érigée comme principe dans les filières viandes bovine et porcine pour donner plus de visibilité à tous les acteurs de la filière sur leurs marges et leurs rémunérations. Un travail de fond sera engagé dès la rentrée sur la base de rapports d'inspection initiés au printemps et qui seront finalisés en septembre, et ce en lien étroit avec la profession agricole. Si des ajustements réglementaires ou législatifs s'avéraient nécessaires, le ministre chargé de l'agriculture s'est d'ores et déjà engagé à mener ces réformes. Une première réunion sur la rénovation des relations commerciales, en particulier à travers le développement de la contractualisation, dans la filière porcine s'est tenue le 27 août 2015 ; l'exportation : elle sera encore encouragée et une meilleure valorisation sur les marchés export, indispensable compte-tenu du poids qu'ils représentent dans les débouchés français, sera recherchée. À ce titre, le Gouvernement est mobilisé pour soutenir les démarches des professionnels dans tous les pays identifiés comme marchés prioritaires. Des initiatives sont prises en direction des grands pays émergents, en particulier en Asie, pour promouvoir nos produits. La constitution d'une plate-forme commune export se poursuit, afin que l'ensemble des acteurs s'organisent davantage pour adapter l'offre française en viandes et ainsi répondre au mieux à la demande extérieure. Enfin, 10 M€ supplémentaires sont mis à disposition des professionnels, via FranceAgriMer, pour mettre en place des mesures de promotion, sur le marché intérieur comme sur les marchés extérieurs ; la transition énergétique : le Gouvernement entend diversifier le revenu des éleveurs en les faisant participer à la transition énergétique. Les tarifs de rachat de l'électricité produite par les installations de méthanisation agricole seront adaptés afin d'accroître leur rentabilité. Le photovoltaïque dans les élevages, en privilégiant l'installation sur les toits des bâtiments d'élevage, sera également soutenu en agissant notamment sur les coûts de raccordement au réseau. Les exonérations fiscales applicables, depuis la loi de finances pour 2015 aux nouveaux méthaniseurs agricoles, seront désormais étendues aux installations de méthanisation agricole dites « pionnières », déjà en fonctionnement ; cette mesure était très attendue par les agriculteurs-méthaniseurs. La diversification des revenus des agriculteurs et leur bonne inclusion dans le développement de l'économie circulaire sont primordiales pour l'avenir de l'économie agricole de notre pays à moyen-long terme, au titre de la préservation de notre environnement, mais également pour diminuer l'exposition des agriculteurs aux risques, pour faire baisser leurs coûts de production, et donc pour améliorer leur compétitivité. Les filières d'élevages pourront poursuivre leur modernisation afin d'améliorer leur compétitivité, d'assurer leur développement et leur pérennité, en se saisissant des outils d'ores et déjà mis à leur disposition, notamment le soutien à l'investissement au travers du programme des investissements d'avenir (45 M€ par an), du plan de compétitivité et d'adaptation des exploitations (200 M€ par an) ou encore des possibilités offertes par la mesure permettant le suramortissement des investissements productifs annoncée par le Premier ministre au printemps 2015. L'ensemble du Gouvernement veille, en lien avec les services déconcentrés de l'État, à la bonne mise en œuvre, sans délai, de l'ensemble des mesures annoncées dans le plan de soutien à l'élevage français. Des instructions ont d'ores et déjà été données et les différents services chargés de sa bonne mise en œuvre sont pleinement mobilisés. Le ministre en charge de l'agriculture restera également particulièrement attentif dans les prochaines semaines au respect des engagements de l'ensemble des acteurs concernés par le plan de soutien et pris dans le cadre des tables rondes. Enfin, dans ce contexte, le ministre a alerté la Commission européenne, ainsi que ses homologues dans les autres États membres, sur la crise que traversent actuellement les filières d'élevage, et a obtenu la tenue d'un conseil agriculture exceptionnel le 7 septembre 2015. Le ministre en charge de l'agriculture reste pleinement mobilisé pour obtenir la mise en œuvre de mesures complémentaires au niveau européen.

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