Question de M. MAUREY Hervé (Eure - UDI-UC) publiée le 15/10/2015

M. Hervé Maurey attire l'attention de M. le ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique sur l'applicabilité des dispositions relatives aux contrats d'assurance vie en déshérence et aux comptes bancaires inactifs votées par le Parlement depuis 2013.
Depuis une dizaine d'années, la problématique des contrats d'assurance vie en déshérence, puis celle des comptes bancaires inactifs, ont été mises à l'agenda parlementaire, essentiellement du fait d'initiatives émanant de députés et de sénateurs.
En 2013, la Cour des comptes avait estimé à 1,2 milliard d'euros l'encours des comptes inactifs et à 2,76 milliards celui des contrats d'assurance sur la vie non réclamés - montant estimé depuis à 4,6 milliards par l'autorité de contrôle prudentiel et de résolution -, et formulé dix-sept propositions pour renforcer la protection des épargnants.
Depuis 2013, plusieurs initiatives parlementaires (amendements ou propositions de loi) ont permis de traduire dans la loi l'essentiel de ces recommandations.
Toutefois, comme le craignait la Cour des comptes dans son rapport annuel public pour 2015, les nombreux textes d'application se font attendre, hypothéquant ainsi la mise en œuvre des nouveaux dispositifs.
La loi n° 2013-672 du 26 juillet 2013 de séparation et de régulation des activités bancaires a prévu, dans son article 75, la publication annuelle, par les mutuelles et les compagnies d'assurance, du bilan des recherches effectuées pour identifier les bénéficiaires de contrats d'assurance-vie en déshérence et, notamment, le nombre et l'encours des contrats d'assurance sur la vie dont les capitaux ou les rentes dus n'ont pas été versés au bénéficiaire.
Or, l'arrêté du ministre chargé de l'économie, censé préciser les critères des contrats devant faire l'objet d'une publication, n'a pas été pris à ce jour.
De même, la loi n° 2014-617 du 13 juin 2014 relative aux comptes bancaires inactifs et aux contrats d'assurance-vie en déshérence a fortement renforcé la protection des épargnants en prévoyant notamment la consultation, par les notaires qui ont à régler une succession, du fichier des contrats d'assurance vie (FICOVIE), la revalorisation post mortem des contrats, le plafonnement des frais de gestion, le renforcement des contrôles de l'autorité de contrôle prudentiel et de résolution mais, aussi et surtout, le transfert des sommes dues par une compagnie d'assurance ou un établissement de crédit mais non réclamées dans un délai de dix ans à la caisse des dépôts et consignations puis leur acquisition par l'État au terme d'un délai de vingt ans.

L'essentiel de ces dispositions est applicable au 1er janvier 2016. Or, aucune des mesures réglementaires prévues par la loi n'a été prise par le Gouvernement. Dix mesures législatives sont ainsi en attente des décrets ou arrêtés nécessaires à leur application.

Aussi l'interroge-t-il sur les raisons de ce retard et lui demande-t-il sous quel calendrier le Gouvernement entend prendre les dispositions nécessaires à l'application de ces textes votés par le Parlement.

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Transmise au Ministère des finances et des comptes publics


Réponse du Secrétariat d'État, auprès du ministère de la ville, de la jeunesse et des sports, chargé des sports publiée le 27/01/2016

Réponse apportée en séance publique le 26/01/2016

M. Hervé Maurey. Je voudrais, une fois encore, interroger le Gouvernement sur la question des contrats d'assurance vie non réclamés.

Le sujet est important. L'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, l'APCR, a en effet estimé que l'encours des contrats d'assurance vie non réclamés représenterait 4,6 milliards d'euros, et non quelques centaines de millions, comme l'ont très longtemps affirmé les professionnels de l'assurance, tentant ainsi d'en minimiser l'importance.

Ce sujet a donné lieu à plusieurs dispositions d'initiative parlementaire depuis 2005.

J'ai moi-même fait adopter en 2010 une proposition de loi à l'unanimité du Sénat, dont l'essentiel des dispositions a été repris dans la loi du 26 juillet 2013 de séparation et de régulation des activités bancaires et dans la loi du 13 juin 2014 relative aux comptes bancaires inactifs et aux contrats d'assurance vie en déshérence.

Malgré ces avancées législatives considérables, et comme le craignait la Cour des comptes dans son rapport annuel public de 2015, les textes d'application ne sont que partiellement pris.

Ainsi, la loi de 2013 a prévu - c'est très important - la publication annuelle d'un bilan permettant d'évaluer le montant des contrats d'assurance vie non réclamés ainsi que les démarches entreprises par les assureurs pour rechercher leurs bénéficiaires, comme je le demandais depuis 2009.

Malheureusement, l'arrêté du ministre de l'économie, censé définir ce qui doit être considéré comme un contrat non réclamé n'a toujours pas été publié, rendant inopérante cette obligation élémentaire de transparence. Quand cet arrêté sera-t-il signé, monsieur le secrétaire d'État ?

Le décret d'application de la loi de 2014 a bien été publié le 28 août dernier. Il permet la mise en œuvre des dispositions législatives. Pouvez-vous m'indiquer si les professionnels ont anticipé ce nouveau cadre législatif censé s'appliquer depuis 1er janvier ?

À cet égard, je m'étonne que la Caisse des dépôts et consignations ait prévu de mettre à la disposition du public son service de recherche en ligne seulement le 1er janvier 2017, alors qu'elle va bénéficier, dès cette année, du transfert des avoirs non réclamés. Pourquoi ce délai ?

En 2014, le Gouvernement n'a pas souhaité étendre l'obligation de recherche des bénéficiaires aux comptes inactifs, alors qu'elle existe pour les bénéficiaires de contrats d'assurance vie. Il n'a pas prévu non plus de transparence sur les coffres-forts inactifs. Le Gouvernement compte-t-il modifier sa position sur ce sujet à l'avenir ?

À ma connaissance, enfin, la problématique des NPAI, c'est-à-dire des destinataires qui n'habitent pas à l'adresse indiquée, n'a pas été abordée dans ce décret, contrairement aux engagements contractés ici même par le ministre le 7 mai 2014.

Plus largement, j'aimerais savoir quelles mesures le Gouvernement entend mettre en œuvre pour assurer une meilleure transparence et une plus grande protection des épargnants.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Thierry Braillard, secrétaire d'État auprès du ministre de la ville, de la jeunesse et des sports, chargé des sports. Monsieur le sénateur Maurey, les mesures réglementaires d'application prévues par la loi du 13 juin 2014, entrée en vigueur le 1er janvier 2016, ont pour l'essentiel été prises dans l'année 2015.

J'ai cru comprendre que vous m'interrogiez sur l'absence de mesures prises en 2015. Je vous rappelle pourtant que le décret relatif aux comptes bancaires inactifs et aux contrats d'assurance vie en déshérence date du 28 août 2015. Il contient les éléments nécessaires à l'application des points les plus importants de la loi, s'agissant notamment des contrats d'assurance vie, la revalorisation des frais de gestion et le plafonnement des frais post mortem.

L'arrêté du 21 septembre 2015 a été pris en application de l'article R. 312-19 du code monétaire et financier. Il a fixé le niveau de plafonnement de chacune des catégories de comptes bancaires inactifs identifiées au IV de cet article.

Deux arrêtés restent à prendre, d'une portée accessoire : l'un sera relatif aux avoirs contenus dans des coffres-forts, l'autre précisera les contenus des bilans devant être publiés annuellement par les entreprises d'assurance, sur leur site internet, et par les fédérations professionnelles, à destination du ministre chargé de l'économie.

Les parties prenantes disposeront prochainement de ces textes pour remplir les obligations assignées par la loi au titre de l'année 2016.

La loi n'a pas prévu de mesures réglementaires spécifiques pour la consultation de l'administration fiscale, par les notaires mandatés à cet effet, au sujet des informations contenues dans le fichier central des contrats d'assurance vie, le FICOVIE, pouvant intéresser les héritiers et ayants droit.

M. le président. La parole est à M. Hervé Maurey.

M. Hervé Maurey. Monsieur le secrétaire d'État a eu la gentillesse de rappeler un certain nombre d'éléments que j'avais moi-même mentionnés, notamment la publication du décret du 28 août 2015. En revanche, je ne sais pas s'il s'agit d'un point qu'il considère comme accessoire, mais je n'ai pas obtenu d'information sur la date à laquelle nous disposerons enfin de l'arrêté définissant les comptes qui doivent être considérés comme non réclamés ou inactifs.

En l'absence d'un tel arrêté, les mesures que nous avons fait adopter dans la loi, fruits d'un combat mené durant de nombreuses années et devant permettre de faire enfin la lumière sur les stocks, c'est-à-dire sur le montant des assurances vie non réclamées, sur le nombre de contrats non réclamés et, surtout, sur les efforts qui sont déployés, chaque année, par les sociétés d'assurance et les banques, seront inopérantes. C'est très regrettable.

Je n'ai pas obtenu de réponse non plus sur le non-respect, par le Gouvernement, de l'engagement pris ici même le 7 mai 2014 sur la question du traitement des NPAI, ces courriers mal adressés qui reviennent à l'envoyeur. Aujourd'hui, les sociétés d'assurances ne font aucun effort pour en retrouver leurs destinataires.

J'attends donc avec impatience le rapport qui doit être rendu par l'autorité de contrôle avant le mois de mai, pour y trouver une information sur les efforts réels effectués par les sociétés.

Une fois de plus, il reviendra donc au Parlement d'être non seulement vigilant et actif, mais également force de proposition. Comme je le rappelais précédemment, toutes les avancées sur ce sujet, très important pour les épargnants, ont été obtenues sur l'initiative du Parlement, et singulièrement du Sénat.

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