Question de M. PLACÉ Jean-Vincent (Essonne - Écologiste) publiée le 19/11/2015

M. Jean-Vincent Placé attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement sur la découverte du caractère probablement cancérogène de la consommation de « viandes rouges » et de « viandes transformées ».

Une étude du centre international de recherche contre le cancer (CIRC) publiée le 26 octobre 2015 a révélé que la consommation de « viandes rouges » et de « viandes transformées » est à l'origine du développement du cancer colorectal et favoriserait également les cancers du pancréas et de la prostate. Le CIRC qualifie effectivement la « viande rouge » de « probablement cancérogène » pour l'homme tandis que la « viande transformée » est classée dans le groupe 1 des produits cancérogènes avec le tabac et l'amiante, même si en l'occurrence les risques de développement du cancer ne sont pas aussi élevés que pour ces deux autres produits.
Ces résultats rejoignent ceux attestés par l'institut national du cancer (INCa) en juin 2015.

Selon l'institut, une augmentation des risques du cancer colorectal est due à la consommation de viande rouge. Elle représente une hausse de 14 % pour le cancer colorectal, de 25 % pour le côlon et 31 % pour le rectum pour une alimentation composée de « viandes rouges » ou de « viandes transformées » de 100 grammes par jours. Ces statistiques permettent selon l'organisme de conclure à un niveau de preuve « convaincant » tandis que ce niveau n'est que « suggéré » concernant les cancers du pancréas et de la prostate.

Il note que ces risques sont extrêmement liés à la quantité de viande qui est consommée par jour par personne et rappelle que l'industrie de la viande est une des plus importantes sources de pollution des sols et des eaux.

Il souhaite alors connaître les intentions du Gouvernement en matière de sensibilisation à la modération de la consommation de la viande, pour permettre aux citoyens d'être renseignés sur la qualité des produits qu'ils achètent et les conséquences de leur production.

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Réponse du Ministère de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt publiée le 17/12/2015

Les conclusions du centre international de recherche sur le cancer (CIRC) confirment le lien épidémiologique établi depuis une décennie entre certains cancers et la consommation de viande rouge ou de charcuterie. Ces conclusions rejoignent en effet celles du world cancer research fund (WCRF) (rapport publié en 2007 sur la prévention du cancer), de l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) (rapport d'expertise collective de 2011 « nutrition et cancer ») et de l'institut national du cancer (INCa - juin 2015) qui classaient déjà les viandes rouges et les charcuteries dans la liste des « facteurs de risque augmentant le risque de cancer et évitables », le niveau de preuve étant « convaincant pour le cancer colorectal, cancer fréquent ». Cependant, le classement du CIRC permet de caractériser le danger intrinsèque de certains produits ou substances, mais pas l'appréciation du risque. Ce dernier dépend en effet également de l'exposition des consommateurs. Dans son rapport de 2007, le WCRF indique que le niveau de consommation moyen doit se situer en-dessous du seuil de 500 g par semaine de viande rouge cuite, ce qui revient à ne pas en consommer plus de 70 g/jour. Ces éléments sont en accord avec la position de l'Anses et de l'INCa qui, en ce qui concerne les charcuteries, conseillent de plus d'en limiter le plus possible la consommation (sans seuil quantifié). Le risque de cancer associé à une augmentation de 100 g de viande n'est ainsi démontré que chez les gros consommateurs de viande (plus de 500 g/semaine) et en aucun cas pour une augmentation de 100 g de viande partant d'une consommation nulle. Il convient donc de ne pas laisser entendre aux consommateurs que la consommation de viande présente un risque de santé publique dès la première bouchée de viande consommée. En France, avec 373 g en moyenne par semaine et par personne, la consommation de viande rouge est bien inférieure à ce seuil [centre de recherche pour l'étude et l'observation de conditions de vie (CREDOC), enquêtes 2004 et 2007]. La tendance est même à la diminution constante depuis une vingtaine d'années (enquêtes INCA 1999 et 2007 de l'AFSSA, études 2004 et 2007 du CREDOC). Par ailleurs, ces données ne doivent pas faire oublier l'intérêt nutritionnel des viandes, reconnu par le programme national nutrition santé. Par ses qualités nutritionnelles, la viande contribue aux apports en micronutriments d'intérêt tel que le fer, dont la couverture des besoins est loin d'être optimale pour certaines catégories de la population comme les jeunes enfants, les adolescents, les femmes en âge de procréer et les femmes enceintes. C'est également une source importante de protéines particulièrement bien assimilées par notre organisme, et qui lui sont essentielles. Elles jouent notamment un rôle important dans la prévention de la dénutrition chez les personnes âgées. De plus, en France, la viande n'est généralement pas consommée seule, mais au sein d'un plat incluant légumes et féculents, lui-même consommé dans le cadre d'un repas permettant d'associer tous les groupes d'aliments. De ce fait, la viande contribue naturellement au maintien de repas structurés, satiétogènes et nutritionnellement équilibrés, qualité non négligeable lorsqu'on sait que la déstructuration des repas est à l'origine de nombreux déséquilibres. C'est dans cet esprit que les règles nutritionnelles en restauration scolaire imposent notamment une fréquence de consommation des viandes non hachées de bœuf, veau ou agneau, ou d'abats de boucherie de quatre repas sur vingt repas successifs au minimum. Cette disposition appuie le développement en restauration collective d'une offre en viande de boucherie diversifiée et de bonne qualité culinaire, favorable au maintien de l'indispensable éducation au goût.

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