Question de Mme FÉRAT Françoise (Marne - UDI-UC) publiée le 17/03/2016

Mme Françoise Férat attire l'attention de Mme la ministre de la culture et de la communication sur l'article L. 542-1 du code du patrimoine qui dispose que : « Nul ne peut utiliser du matériel permettant la détection d'objets métalliques, à l'effet de recherches de monuments et d'objets pouvant intéresser la préhistoire, l'histoire, l'art ou l'archéologie, sans avoir, au préalable, obtenu une autorisation administrative délivrée en fonction de la qualification du demandeur ainsi que de la nature et des modalités de la recherche. ». Certaines associations rencontrent des difficultés et ne reçoivent pas de réponse aux demandes réitérées d'autorisation administrative que ses membres soumettent au préfet, ce qui les empêche de pratiquer cette activité de loisir. Elle lui demande donc de bien vouloir lui donner sa position vis-à-vis des personnes pratiquant la détection de loisir et du rôle qui pourrait leur incomber dans la découverte d'objets ou de monuments ayant un intérêt scientifique.

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Réponse du Ministère de la culture et de la communication publiée le 22/06/2016

Réponse apportée en séance publique le 21/06/2016

Mme Françoise Férat. Lors de mes travaux sur le projet de loi relatif à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine, j'ai été interpellée sur les dispositions de l'article L. 542-1 du code du patrimoine. Celui-ci dispose que « nul ne peut utiliser du matériel permettant la détection d'objets métalliques, à l'effet de recherches de monuments et d'objets pouvant intéresser la préhistoire, l'histoire, l'art ou l'archéologie, sans avoir, au préalable, obtenu une autorisation administrative délivrée en fonction de la qualification du demandeur ainsi que de la nature et des modalités de la recherche ».

De nombreuses associations françaises d'activités de détection de loisir regroupent des passionnés de la détection de métaux. Il leur arrive régulièrement de pratiquer des dépollutions de terrains et des recherches d'objets perdus, à la demande de propriétaires, qu'il s'agisse de personnes privées, d'agriculteurs ou encore de collectivités locales. Il leur arrive même d'intervenir, à la demande d'archéologues, sur des sites archéologiques. Ils sont conscients de la nécessité du respect de ces sites et de leur protection contre tout pillage.

Or les associations habilitées à obtenir les autorisations administratives rencontrent de nombreuses difficultés et ne reçoivent pas de réponse aux demandes réitérées d'autorisation que ses membres soumettent aux préfets, ce qui les empêche de pratiquer cette activité de loisir. Dans les cas où il se révèle nécessaire, un refus motivé permettrait pourtant de poser les limites véritables de celle-ci.

Madame la ministre, aviez-vous connaissance de cette absence systématique de réponse et, le cas échéant, pouvez-vous nous en donner les raisons ? Je crains que cette situation n'ouvre la possibilité de fouilles non validées, au risque que le produit de ces recherches ne soit détourné.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Audrey Azoulay, ministre de la culture et de la communication. En archéologie, l'acte de fouiller entraînant en lui-même la modification, voire la disparition, du site fouillé, il doit être mené avec une grande rigueur, afin que le contexte de découverte de chaque vestige, quelle que soit sa valeur apparente, soit enregistré.

C'est pour cette raison que l'État requiert, pour délivrer l'autorisation d'utiliser un détecteur de métaux à des fins de recherche archéologique, non seulement une compétence scientifique de l'intéressé, mais aussi l'existence d'un projet de recherche raisonné.

Par ailleurs, aucune autorisation de recherche archéologique programmée, avec ou sans détecteur, n'est jamais délivrée à une personne morale, pas plus à une association qu'à un laboratoire du CNRS, par exemple. Les autorisations sont toujours nominatives et délivrées à une personne qui assurera la responsabilité scientifique de l'opération.

La position du ministère de la culture s'agissant de la « détection de loisir » est constante. Si l'archéologie bénévole a toute sa place sur le territoire national, elle ne saurait en rien être assimilée à de la « détection de loisir », terme qui n'a aucun fondement juridique et recouvre souvent en réalité une chasse au trésor, comme en témoignent les dizaines de milliers d'objets issus de trouvailles clandestines vendus en ligne chaque année.

De fait, l'usage du détecteur de métaux n'intervient d'ailleurs qu'à titre exceptionnel et de façon très technique dans la pratique professionnelle de la discipline archéologique. Tout véritable amateur d'archéologie peut se former sur les chantiers dirigés par des professionnels de la discipline, qui offrent chaque année environ 1 500 places réservées aux bénévoles. Le succès des journées nationales de l'archéologie, qui se sont déroulées le week-end dernier, en témoigne.

Je précise que les trouvailles d'objets relevant de l'archéologie réalisées sans autorisation avec un détecteur de métaux ne peuvent être reconnues comme des découvertes fortuites, puisque l'utilisation d'un détecteur suppose l'intention de trouver ce qui n'était pas visible. Elles s'apparentent alors à du pillage et ne relèvent plus du régime de la découverte d'un trésor, lequel prévoit, aux termes de l'article 716 du code civil, un partage entre l'inventeur et le propriétaire du terrain.

Les préfets de région qui instruisent ces dossiers sont donc le plus souvent amenés à refuser les autorisations qui leur sont demandées lorsqu'elles ne s'appuient sur aucun projet ni aucune compétence scientifique. L'absence de réponse dans un délai de deux mois vaut refus implicite de l'administration, mais cette situation n'est pas fréquente.

J'ajoute que l'administration centrale du ministère de la culture reçoit régulièrement différentes associations concernées pour leur expliquer comment protéger le patrimoine archéologique et les orienter vers une pratique d'archéologie bénévole vertueuse.

Mme la présidente. La parole est à Mme Françoise Férat.

Mme Françoise Férat. Je vous remercie, madame la ministre, de cette clarification. Je fais, tout comme vous, la différence entre la détection de loisir et celle qui est pratiquée par les associations habilitées, à la demande, parfois, d'archéologues.

J'entends bien que l'absence de réponse des préfets vaut refus. Je pense néanmoins qu'il vaudrait la peine que ce refus soit explicitement signifié, par exemple par un courrier type. En effet, j'ai pu constater que l'absence de réponse peut au contraire donner à penser aux personnes concernées que l'activité en question est autorisée.

Nous sommes d'accord : la rigueur est de mise, mais une notification systématique de la réponse serait bienvenue ; les associations seraient ainsi obligées de s'y tenir.

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