Question de Mme SCHILLINGER Patricia (Haut-Rhin - Socialiste et républicain) publiée le 07/07/2016

Mme Patricia Schillinger attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères et du développement international sur la ratification prochaine du traité d'accord économique et commercial global (dit aussi CETA pour « comprehensive economic and trade agreement ») par le Parlement français, et la nécessité que toute application provisoire dudit traité soit refusée d'ici là.
À ce jour, le statut « mixte » de l'accord, garantissant le droit des parlements nationaux des 28 États-membres d'adopter ou de rejeter le CETA, n'est pas confirmé officiellement. De plus, quand bien même l'accord serait « mixte », il est prévu que le CETA soit appliqué de façon dite « provisoire », avant même que les parlements nationaux et les citoyens soient consultés. Le CETA et son application provisoire devraient être adoptés par les ministres des États-membres lors d'un vote en septembre 2016.
Or, cet accord comporte de nombreux volets extrêmement sensibles qui méritent d'être soumis au débat public comme le règlement des différends entre investisseurs et États (RDIE), la coopération réglementaire, ou encore l'absence de garantie du principe de précaution dans le texte du traité.
Étant donnée la nécessité d'un débat public sur les dispositions de cet accord et leur impact sur nos futures politiques publiques, il semble peu opportun que tout ou partie de celui-ci soit appliqué avant sa ratification.
Ainsi, elle lui demande de bien vouloir préciser la position du Gouvernement sur l'accord commercial entre l'Union européenne et le Canada, notamment concernant une éventuelle mise en application provisoire du traité.

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Transmise au Ministère des affaires étrangères et du développement international


Réponse du Ministère des affaires étrangères et du développement international publiée le 29/12/2016

Le CETA est un accord de commerce équilibré avec un allié important. Les demandes de la France ont été prises en compte. Les résultats de la négociation sont satisfaisants tant sur les aspects tarifaires (droits de douane), que sur un accès amélioré aux marchés publics, la reconnaissance des indications géographiques (173 européennes dont 42 françaises) ainsi que le remplacement du mécanisme d'arbitrage privé investisseurs - États par l'instauration d'une Cour de justice publique. Sur ce point, la reprise par le gouvernement de Justin Trudeau de la proposition européenne de cour permanente publique portée par la France depuis 2015, rompt avec les tribunaux privés qui étaient tendanciellement favorables aux investisseurs et garantit le droit à réguler des États. Concernant le processus de ratification, la position de la France portée par le secrétaire d'État chargé du commerce extérieur a toujours été que le CETA est un accord « mixte », c'est-à-dire qu'il couvre des domaines relevant des compétences de l'Union européenne et de ses États membres. En conséquence, les parlements nationaux doivent impérativement être saisis. Grâce à la mobilisation de la France notamment, la Commission européenne a finalement, conformément à son annonce du 5 juillet 2016, soumis au Conseil une proposition de signature du CETA en tant qu'accord mixte, confirmant la nécessité pour les parlements nationaux d'autoriser la ratification de l'accord. La France reste toutefois vigilante sur le périmètre précis des compétences nationales que proposera la commission au regard des traités. Suite à sa signature à l'occasion du sommet UE-Canada le 30 octobre 2016, l'accord doit désormais être approuvé par le Parlement européen, ce qui ouvrira la voie à son application provisoire. La France a été très vigilante pour que le champ de cette application provisoire soit établi dans le respect de la répartition des compétences entre l'Union et ses Etats membres. Les parlementaires nationaux auront ensuite à se prononcer par un vote sur la ratification de l'accord afin de permettre son application complète. Au-delà du processus de ratification, le Gouvernement est attaché au contrôle démocratique sur la politique commerciale, en soutenant une transparence approfondie : dialogue renforcé avec l'ensemble des élus et de la société civile au sein du Comité de suivi stratégique (CSS) de la politique commerciale, information continue du Parlement, multiplication des débats publics, politique de mise en ligne de documents, lancement de groupes de travail. Le Canada a qualifié cet accord d'historique et souhaite que le CETA puisse entrer en vigueur. La France partage cette appréciation. L'UE doit être reconnue comme un partenaire fiable pour faire entendre sa voix.

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