Question de M. RETAILLEAU Bruno (Vendée - Les Républicains) publiée le 14/07/2016

M. Bruno Retailleau attire l'attention de M. le secrétaire d'État, auprès du ministre de la défense, chargé des anciens combattants et de la mémoire sur la situation des orphelins de pères « malgré-nous ».

Les décrets n° 2000-657 du 13 juillet 2000 instituant une mesure de réparation pour les orphelins dont les parents ont été victimes de persécutions antisémites et n° 2004-751 du 27 juillet 2004 instituant une aide financière en reconnaissance des souffrances endurées par les orphelins dont les parents ont été victimes d'actes de barbarie durant la Deuxième Guerre mondiale ont reconnu le drame vécu par certains pupilles de la Nation et ont, à travers eux, consacré le souvenir des victimes des crimes nazis.

Toutefois, les orphelins de pères incorporés de force dans l'armée nazie en sont notamment exclus, au motif que ces derniers auraient été les victimes « d'un strict conflit entre États ». Or leur situation n'est en rien comparable à celle de soldats mobilisés de manière régulière par leur pays.

Étant donné, entre autres, les menaces de représailles ou les représailles effectivement exercées sur eux ou sur leurs familles, les « malgré-nous » apparaissent bel et bien comme des victimes de la barbarie nazie.

Dans ce contexte, il lui demande de bien vouloir lui indiquer les intentions du Gouvernement en la matière et les mesures qu'il entend prendre afin d'accorder aux orphelins de pères « malgré-nous » la même reconnaissance et le même traitement que ceux accordés aux orphelins des autres victimes de la barbarie nazie.

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Réponse du Secrétariat d'État, auprès du ministère de la défense, chargé des anciens combattants et de la mémoire publiée le 01/09/2016

L'annexion de fait de l'Alsace et de la Moselle par le IIIème Reich a comporté notamment l'incorporation forcée de jeunes Français dans l'armée allemande. Le secrétaire d'État chargé des anciens combattants et de la mémoire mesure pleinement l'étendue du drame vécu par ces militaires et leurs familles au cours de la Seconde Guerre mondiale et souhaite rappeler que la France a reconnu leur situation. En effet, l'article L. 231 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre (CPMIVG) dispose que les anciens militaires alsaciens et lorrains de la guerre 1939-1945, Français, soit par filiation, soit par réintégration, en vertu de la loi du 5 août 1914, soit en exécution du traité de Versailles, bénéficient, ainsi que leurs ayants cause, de la législation sur les pensions militaires d'invalidité pour les services accomplis dans les armées de l'Allemagne ou de ses alliés. L'article L. 232 du même code précise que ces anciens militaires, incorporés de force par voie d'appel, ainsi que leurs ayants cause, ont droit à pension dans les conditions fixées par le livre Ier du CPMIVG et, éventuellement, à toutes allocations, indemnités, majorations et suppléments de majorations pour infirmité résultant de blessures reçues, d'accidents survenus, de maladies contractées ou aggravées par le fait ou à l'occasion du service. Ainsi, les orphelins des « Malgré-nous » ont pu prétendre à un droit à réparation conformément aux dispositions de l'article L. 232 du CPMIVG. Par ailleurs, les ayants cause des Alsaciens et Mosellans réfractaires à l'incorporation forcée dans l'armée allemande ont également pu se voir accorder un droit à pension en application de l'article L. 301 du CPMIVG. Il convient d'ajouter que tous les orphelins de guerre, quel que soit leur âge, sont ressortissants de l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre et peuvent bénéficier, à ce titre, de l'assistance de cet établissement public, dispensée notamment sous la forme d'aides ou de secours en cas de maladie, absence de ressources ou difficultés momentanées. Cependant, il est souligné que l'indemnisation mise en place par les décrets n°  2000-657 du 13 juillet 2000 instituant une mesure de réparation pour les orphelins dont les parents ont été victimes de persécutions antisémites et n°  2004-751 du 27 juillet 2004 instituant une aide financière en reconnaissance des souffrances endurées par les orphelins dont les parents ont été victimes d'actes de barbarie durant la Deuxième Guerre mondiale est plus particulièrement destinée aux victimes de l'extrême barbarie nazie, qui renvoie à une douleur tout à fait spécifique, celle d'avoir perdu un père ou une mère, ou parfois les deux, dans un camp d'extermination. En effet, c'est fondamentalement le caractère particulièrement insoutenable d'extrême barbarie nazie propre à ces disparitions spécifiques à la Seconde Guerre mondiale, le traumatisme dépassant le strict cadre d'un conflit entre Etats, qui est à l'origine de ce dispositif réservé aux enfants dont les parents, résistants ou ayant fait l'objet de persécutions antisémites ou raciales, sont décédés en déportation ou ont été exécutés dans les circonstances définies aux articles L. 274 et L. 290 du CPMIVG. Ce dispositif doit rester fidèle à sa justification essentielle qui est de consacrer solennellement le souvenir des victimes de la barbarie nazie, à travers leurs enfants mineurs au moment des faits. C'est pourquoi le Gouvernement a décidé de maintenir cette spécificité pour ne pas porter atteinte à la cohérence de ces décrets. Au-delà de cette analyse, il a été constaté que l'examen de plusieurs dossiers a laissé apparaître la difficulté d'appliquer des critères stricts permettant de distinguer des situations extrêmement proches. La mise en œuvre de ces critères doit donc s'opérer de manière éclairée, afin de donner aux deux décrets leur pleine portée, dans le respect de leur ambition initiale d'indemniser la souffrance des orphelins dont les parents ont été frappés par cette barbarie. Aussi, le Gouvernement s'est engagé en faveur d'un réexamen au cas par cas des dossiers en cause, afin de garantir une égalité de traitement, tout en confirmant la nécessité de préserver le caractère spécifique de cette indemnisation dont l'extension à tous les orphelins de guerre ne saurait être envisagée. C'est ainsi que, en application des conclusions de la commission nationale de concertation mise en place en 2009 à la suite du rapport du préfet honoraire Jean-Yves Audouin, 663 dossiers ont été réexaminés dont 200 ont trouvé une issue favorable.

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