Question de Mme MICOULEAU Brigitte (Haute-Garonne - Les Républicains) publiée le 24/11/2016

Mme Brigitte Micouleau attire l'attention de Mme la ministre du logement et de l'habitat durable sur le statut des sociétaires-acquéreurs d'un bien immobilier en jouissance à temps partagé.

L'article 1 de la loi n° 86-18 du 6 janvier 1986 créant le statut des société d'attribution d'immeubles en jouissance à temps partagé (SCAIJTP) dispose que ces sociétaires n'ont pas de droit de propriété. Ces derniers ne sont pas non plus considérés comme locataires puisque le droit d'usage n'est pas un bail à loyer au sens de l'article 1711 du code civil.

En achetant des parts d'action au propriétaire foncier de l'immeuble, les sociétaires-acquéreurs financent le projet immobilier en totalité (25 % des parts financent, en règle générale, la totalité du projet). Ils sont soumis aux charges relatives aux parties privatives et communes et payent l'impôt foncier au même titre que les copropriétaires bien que ne disposant pas de ce statut.

Aujourd'hui, ces sociétaires sont de plus en plus nombreux à être tributaires de décisions émanant du propriétaire foncier, et à les vivre comme des injustices.
Du fait de charges trop élevées, dues notamment au vieillissement du bien, certains sociétaires n'ont pas d'autre choix que de vendre leurs parts et pour certains d'entre eux, de tout simplement les abandonner au profit du propriétaire foncier. Ce dernier devenant majoritaire a toute la liberté nécessaire pour placer la société en liquidation, vendre le bien immobilier en partie ou totalité ou encore exiger le paiement de charge exorbitantes.
Faute de moyens, ces sociétaires, souvent aux revenus modestes, n'intentent pas de recours en justice.

Ce déséquilibre entre propriétaire foncier et sociétaires-acquéreurs semble appeler une évolution du statut de ces derniers. Dans ce cadre, l'association des propriétaires acquéreurs de parts en jouissance boucaniers 1&2 propose, par exemple, dans l'objectif de rétablir en partie cet équilibre et de garantir la pérennité de l'ouvrage et de l'objet social, de rendre la SCAIJTP propriétaire du bien immobilier fini ou encore que cette dernière constitue un fonds de roulement.
Aussi, elle la prie de bien vouloir lui faire connaître les dispositions qu'elle entend prendre pour remédier à ce déséquilibre entre propriétaires fonciers et sociétaires-acquéreurs.

- page 5068

Transmise au Ministère de la justice


Réponse du Ministère de la justice publiée le 30/03/2017

La loi du 24 mars 2014, pour l'accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR), a apporté de nombreuses modifications à la loi du 6 janvier 1986, relative aux sociétés d'attribution d'immeubles en jouissance à temps partagé. Ces modifications ont pour finalité d'équilibrer le fonctionnement des sociétés d'attribution et de prévenir la plupart des abus anciennement constatés. Ainsi, en vue d'équilibrer la gestion de ces sociétés,l'article 18 de la loi du 6 janvier 1986 a été modifié afin de renforcer les pouvoirs du conseil de surveillance et d'accroître le contrôle exercé par les associés. Le conseil de surveillance peut désormais prendre connaissance et copie de toute pièce se rapportant à la gestion de la société. Ses membres sont maintenant élus pour une durée maximale de trois ans renouvelables, nonobstant toute disposition contraire des statuts, et le conseil doit rendre compte annuellement de l'exécution de sa mission à l'assemblée générale. Par ailleurs, l'article 13 de la loi du 6 janvier 1986 a été modifié afin que soit reproduite, dans les convocations à l'assemblée générale, la mention selon laquelle tout associé peut obtenir la communication des comptes sociaux et de certaines informations nominatives sur les autres associés. Afin de renforcer les droits des associés lorsque l'immeuble objet du droit de jouissance est inclus dans une copropriété, l'article 17 de la même loi dispose à présent que les sociétés de temps partagé sont représentées à l'assemblée du syndicat par toute personne désignée par l'assemblée générale nonobstant toute disposition contraire des statuts. La personne désignée doit par ailleurs rendre compte des décisions prises par le syndicat des copropriétaires lors de l'assemblée générale postérieure. Enfin, les conditions de retrait des associés ont été assouplies par l'article 19-1 de la loi du 6 janvier 1986, qui prévoit le retrait de droit lorsque les parts sociales ont été transmises par succession depuis moins de deux ans à compter de la demande. En outre, la liste des justes motifs de retrait a été élargie. Le juge peut désormais autoriser le retrait notamment lorsque l'associé est bénéficiaire des minima sociaux ou perçoit une rémunération inférieure au salaire minimum interprofessionnel de croissance. Il est difficile d'évaluer la fréquence de situation de manœuvres frauduleuses engagées par le propriétaire de l'immeuble afin d'augmenter indûment le montant des charges n'avait pas été évoquée par les associations de consommateurs auditionnées. En toute hypothèse, prévoir un transfert de propriété de l'immeuble au profit de la société d'attribution une fois la construction achevée reviendrait à en exproprier le propriétaire. Afin de respecter le statut constitutionnel du droit de propriété, une telle mesure devrait être justifiée par un objectif d'intérêt général, et serait conditionnée par le versement d'une juste et préalable indemnité à la charge de la société. Par ailleurs, la création d'un fonds de roulement ne paraît pas constituer un moyen de protection efficace contre l'accroissement des charges, dès lors que ce fonds devrait être alimenté par les associés eux-mêmes. Il convient en outre de rappeler que la création d'un fonds de travaux est déjà obligatoire dans les conditions prévues par l'article 17-1 de la loi du 10 juillet 1965, fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis lorsque les conditions d'application de ce texte sont réunies. Il apparaît à ce stade nécessaire d'évaluer les effets attendus des modifications du droit positif issues de la loi ALUR avant d'envisager de réformer à nouveau le statut des sociétés civiles d'attribution d'immeubles en jouissance à temps partagé. D'éventuels agissements frauduleux sont par ailleurs susceptibles d'être réprimés sur le fondement de l'article L. 313-1 du code pénal si les éléments constitutifs du délit d'escroquerie sont constitués.

- page 1309

Page mise à jour le