Question de Mme JOISSAINS Sophie (Bouches-du-Rhône - UDI-UC) publiée le 06/07/2017

Mme Sophie Joissains attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale sur le projet de décret réformant les statuts de l'école nationale supérieure des arts et métiers (ENSAM). Conformément aux propositions de l'inspection générale de l'administration de l'éducation nationale et de la recherche (IGAENR), les présidents des conseils des centres régionaux, tous membres de la société des anciens, ne siégeront plus au conseil d'administration de l'école d'ingénieurs. Le projet crispe. Le 24 février 2016, le ministère annonçait vouloir modifier le décret statutaire de l'ENSAM « pour permettre un rééquilibrage des pouvoirs au sein de son conseil d'administration ». En cause, l'influence, jugée excessive, de la société des anciens élèves, la « Soce », dans un rapport publié le même jour par l'IGAENR.

Ainsi, les présidents des conseils des centres régionaux, tous membres de la Soce, ne siégeront plus au conseil d'administration (CA). Cette disparition permet de rééquilibrer le nombre de « Gadzarts » en son sein et de diminuer, en fait, leur influence dans les prises de décision stratégiques.

Ces présidents de centres se retrouveront dans un conseil territorial. Cette nouvelle instance n'aura qu'un rôle consultatif.

Autre nouveauté, dix personnalités extérieures à l'établissement siégeront au CA, contre cinq actuellement. Elles seront nommées par des entreprises, des organismes de recherche et des établissements d'enseignement supérieur, eux-mêmes désignés par le ministère, sur proposition du directeur général.

La volonté de la rue Descartes est claire : il faut aller vite.

En un peu moins de trois semaines, le texte aura donc été produit par le ministère puis soumis à l'établissement.

En conséquence, elle lui demande de reporter la publication de ce décret afin de ne pas passer en force cette réforme ; car si les modifications statutaires voulues par le ministère ne sont pas complexes à mettre en œuvre, elles touchent en revanche à un véritable symbole : la place des « Gadzarts » dans la vie de l'école.

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Transmise au Ministère de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation


Réponse du Ministère de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation publiée le 23/11/2017

Le décret n°  2012-1223 du 2 novembre 2012 relatif à l'école nationale supérieure d'arts et métiers (ENSAM) a été modifié par le décret n°  2016-952 du 11 juillet 2016, publié auJournal officiel n°  0162 du 13 juillet 2016. La modification du décret statutaire de l'ENSAM est la conséquence d'un rapport de l'inspection générale de l'administration de l'éducation nationale et de la recherche (IGAENR) remis en février 2016, qui faisait notamment le constat d'un fossé grandissant entre certains administrateurs et la direction de l'établissement, au point de caractériser une véritable crise de gouvernance. Cette situation a notamment été mise à jour à l'occasion des difficultés rencontrées dans la mise en œuvre des recommandations d'un premier rapport de l'IGAENR de février 2015 qui visait à répondre aux dérives et aux pratiques de bizutages relevées dans le cadre de la période dite de « transmission des valeurs ». Cette situation inacceptable est préjudiciable à la réputation de l'école, à l'assiduité des élèves, à la qualité des enseignements et à l'état d'esprit des personnels. Aucune tradition, aucun sentiment d'appartenance, ne sauraient justifier que des actes dégradants et humiliants soient infligés aux nouveaux étudiants sous la pression du groupe. Le bizutage est un délit, qui doit être strictement proscrit dans tous les établissements d'enseignement supérieur. Le changement d'attitude de la société des ingénieurs arts et métiers, dont le président déclarait lors du conseil d'administration (CA) du 28 janvier 2015 « que les anciens s'inscrivent dans la ligne des recommandations IGAENR » avant d'en contester par courrier du 15 mai 2015 la teneur, a contribué à accroître les tensions internes et à freiner la mise en œuvre des propositions d'améliorations pourtant raisonnables qui étaient formulées. L'IGAENR a ainsi pointé l'attitude de certains anciens élèves et de leurs représentants, qui oscille entre la « résistance au changement » et « l'aveuglement ». Dans ce contexte, le ministère a donc fait le choix de donner suite à la proposition de l'IGAENR consistant à rééquilibrer les pouvoirs au sein du CA afin que la direction générale ait les moyens de conduire sa politique. C'est pourquoi le décret du 11 juillet 2016 rapproche la composition du CA de l'ENSAM du modèle rencontré dans la plupart des autres grandes écoles d'ingénieurs. Ainsi, le décret précité fait passer de trente-trois à trente le nombre de membres, en diminuant le poids des présidents des centres d'enseignement et de recherche de l'école qui sont en pratique des anciens élèves et en l'ouvrant à d'autres catégories de personnalités extérieures non impliquées dans son fonctionnement opérationnel. Outre les dix-huit représentants élus des enseignants, des personnels, des élèves ingénieurs et des autres usagers, le CA comprend toujours le président de la société des ingénieurs arts et métiers et le président de la fondation arts et métiers, ainsi que dix personnalités extérieures, soit un doublement par rapport à la situation antérieure, dont un représentant d'un organisme de recherche, deux représentants d'un établissement d'enseignement supérieur (dont un étranger), un représentant d'une entreprise employant au moins cinq cents salariés et six personnalités qualifiées choisies en raison de leur compétence. En tout état de cause, la place de la société des ingénieurs arts et métiers au CA demeurera inchangée, la représentation au CA des acteurs industriels partenaires de l'ENSAM est confortée par le doublement du nombre de personnalités extérieures, choisies notamment en raison de leurs compétences dans le champs industriel, et la voix des territoires sera renforcée dans la gouvernance de l'école par la création d'un conseil territorial composé des présidents et des directeurs des centres d'enseignement et de recherche ainsi que des sept représentants des régions dans lesquelles sont implantés ces centres. Le principe du décret du 11 juillet 2016 a été présenté au CA de l'école le 25 février, il a fait l'objet d'une consultation de son comité technique le 15 mars, d'une consultation de la société des Ingénieurs Arts et Métiers par le cabinet de la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche le 12 avril 2016 et d'un débat en CA le 13 avril. Le texte a par ailleurs recueilli une large approbation du conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche le 18 avril 2016 (32 votes favorables, 18 abstentions, 0 vote défavorable). Cette réforme permet de doter l'ENSAM d'une gouvernance conforme aux standards d'une grande école d'ingénieurs, ouverte sur l'international, à l'écoute de ses partenaires industriels et scientifiques, et riche de la diversité de ses implantations territoriales. Elle est indispensable pour améliorer la qualité de la formation et la réussite des étudiants, pour sortir au plus vite d'une situation de blocage qui dure depuis trop longtemps, et pour rétablir un climat serein au sein de l'établissement. Dans ce contexte, il est à espérer que tous les anciens élèves continueront d'apporter leur contribution à la mise en œuvre d'évolutions qui ont pour seul objectif de servir les intérêts des étudiants et la réputation de l'école à laquelle ils demeurent particulièrement attachés.

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