Question de M. RAMBAUD Didier (Isère - LaREM) publiée le 27/10/2017

Question posée en séance publique le 26/10/2017

M. Didier Rambaud. Ma question s'adresse à M. le secrétaire d'État chargé du numérique. Elle concerne plus particulièrement le sujet de la taxation des géants de l'internet, les fameux GAFA.

Aujourd'hui, il est facile aux entreprises du numérique de transférer artificiellement leurs bénéfices hors du pays où elles tirent un revenu grâce aux prix de transfert. Le tribunal administratif de Paris a ainsi jugé, en juillet dernier, que Google, n'ayant pas d'établissement stable en France, n'avait pas à subir de redressement fiscal.

L'heure est venue en Europe de taxer les GAFA, régulièrement accusés de faire de l'optimisation fiscale grâce à des montages financiers qui minimisent leur impôt. Ces géants peuvent transférer leurs bénéfices dans des paradis fiscaux, en y rémunérant des actifs incorporels et en profitant de conventions fiscales. La commissaire européenne à la concurrence a récemment préconisé de fiscaliser les GAFA.

Derrière leur dynamisme se cache une révolution qui peut provoquer de sérieux dommages collatéraux. Prenons l'exemple d'Amazon, qui, à chiffre d'affaires égal, emploie cinq fois moins de salariés que Carrefour ou Casino. La progression d'Amazon est fulgurante, mais reste encore marginale dans l'alimentaire. On vient d'apprendre que ce géant américain cherche un cheval de Troie pour assurer sa conquête du marché français. Carrefour, Casino, Intermarché, Système U auraient été approchés pour servir de tremplin à cette firme, pour l'instant sans succès, mais nous savons ce développement inéluctable.

Pas question de faire la fine bouche sur la nature des emplois créés ni de construire une impossible ligne Maginot pour protéger nos grandes enseignes nationales ! Pour autant, dérouler le tapis rouge sans conditions à ces nouveaux prédateurs de la distribution, comme on l'a fait jusqu'à présent, pose question.

Dans un autre domaine, ces firmes, aux moyens gigantesques,…


M. le président. Votre question !


M. Didier Rambaud. … veulent attaquer le marché des droits de diffusion du sport à la télévision, jusqu'ici détenus par nos chaînes de télévision payantes et les opérateurs de télécommunications. Aussi, monsieur le secrétaire d'État, au-delà de la taxation des GAFA, que compte faire le Gouvernement pour que ces entreprises soient soumises aux mêmes conditions que les nôtres ? (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)

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Réponse du Secrétariat d'État, auprès du Premier ministre, chargé du numérique publiée le 27/10/2017

Réponse apportée en séance publique le 26/10/2017

M. Mounir Mahjoubi, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé du numérique. Monsieur le sénateur, vous avez raison, les plateformes, depuis quelques années, jouent un rôle majeur de transformation de notre économie, à tel point que cela pose une question essentielle : comment nos innovateurs – nos start-up, nos PME, nos industriels, nos entreprises partout sur le territoire – peuvent-ils jouer à égalité avec ces grands groupes ? Je pense que la réponse tient en trois points.

Le premier concerne la fiscalité, que vous avez abordée. Ce sont les citoyens qui nous demandent cette réforme fiscale. Les citoyens, les patrons de PME constatent tous les jours cette inégalité et trouvent bizarre de verser autant d'argent à ces plateformes et de les voir, en échange, contribuer si peu à la solidarité nationale.

C'est ce soutien populaire de tous les peuples d'Europe qui a fait que nous avons pu, avec le Président de la République et Bruno Le Maire, proposer aux autres pays d'aller plus vite que l'agenda international porté au sein de l'OCDE, pour lequel nous restons un acteur mais dont le processus peut durer encore quelques années, et plus vite encore que l'agenda européen, avec la directive ACCIS, qui n'aboutira pas non plus avant plusieurs années.

Nous avons proposé une solution avec cette taxe d'égalisation, qui, nous l'espérons, doit aboutir dans les vingt-quatre prochains mois.

Mais, sur ce sujet, il faut que nous parvenions à réunir des majorités. Aujourd'hui, on parle déjà de dix-neuf pays qui nous soutiennent. On a dit que d'autres ne nous soutenaient pas, mais, voilà deux jours, au conseil Télécoms de l'Union européenne, ces mêmes pays ont rappelé leur engagement à trouver une solution pour cette taxation. Je crois que toutes les conditions sont aujourd'hui réunies. Encore une fois, c'est grâce aux peuples d'Europe, aux citoyens qui se sont mobilisés que nous sommes prêts à avancer.

Le deuxième sujet essentiel est celui de la transparence et de la loyauté. C'est pourquoi Bruno Le Maire et moi-même avons signé, au début du mois d'octobre, les décrets de la loi pour une République numérique, qui apporteront à tous les citoyens plus de transparence dans les résultats affichés aujourd'hui par ces plateformes.

J'en viens au troisième et dernier pilier, qui est aussi une invitation que je vous lance.

Nous avons passé l'après-midi d'hier ensemble, avec certains d'entre vous, à débattre assez longuement de l'intelligence artificielle.

M. le président. Il faut conclure !

M. Mounir Mahjoubi, secrétaire d'État. La question qui se pose est celle de nos instruments juridiques en matière de concurrence et même de notre cadre de pensée.

Je vous invite à venir participer à cet échange. En effet, nous sommes aujourd'hui dans un jeu du prisonnier, ces plateformes, pour charmantes qu'elles soient, attirent les prisonniers-citoyens et les enferment dans des systèmes qui empêchent nos entreprises d'agir.

M. le président. S'il vous plaît !

M. Mounir Mahjoubi, secrétaire d'État. Je vous invite à participer à cette réflexion. (Marques d'impatience sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.) C'est ce troisième pilier qui nous permettra de préparer l'avenir. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)

M. le président. J'invite chacun à respecter les deux minutes qui lui sont imparties, y compris sur internet ! (Sourires.)

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