Question de Mme MICOULEAU Brigitte (Haute-Garonne - Les Républicains) publiée le 16/11/2017

Mme Brigitte Micouleau attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur sur les « rodéos » de deux-roues et de quads.

Élus locaux et habitants des métropoles comme des communes situées en milieu péri-urbain ou rural ne cessent, à juste titre, de faire part de leur exaspération face à ce phénomène récurrent, voire en augmentation, générant des nuisances sonores, mais également un réel sentiment d'insécurité pour les riverains et autres usagers de l'espace public. Ce type d'agissements a même déjà été dans notre pays à l'origine de véritables drames se soldant par des décès.

À Toulouse, la police nationale (Direction départementale de la sécurité publique – DDSP), placée sous l'autorité du préfet et rattachée au ministère de l'intérieur, à qui il appartient d'assurer la sécurité des personnes et des biens, avoue se trouver dépourvue devant ce fléau.

En effet, en l'état actuel du droit, les forces de l'ordre ne peuvent que dresser des contraventions en cas de non-port du casque, circulation sur trottoir ou piste cyclable, non respect de la signalisation routière (cédez le passage, stop ou feux rouges, etc). Cependant l'interpellation des conducteurs en infraction s'avère extrêmement difficile pour les agents, car toute course-poursuite présente un risque élevé d'accident pour le conducteur, les forces de l'ordre, mais également pour la population présente dans l'espace public à ce moment-là, à tel point que certains syndicats de policiers évoquent même des notes de service interdisant purement et simplement toute poursuite de véhicule.

Par ailleurs, même dans les cas où des individus peuvent être identifiés, notamment grâce à la vidéo-protection, il est aujourd'hui impossible de les interpeller a posteriori car leurs agissements ne relèvent que de la contravention.

Il est à noter que si ces faits pouvaient être requalifiés en délit, les forces de l'ordre auraient alors la possibilité d'interpeller les conducteurs et leurs complices chez eux, sans les risques liés à une course-poursuite en flagrance.

Aussi, elle lui demande quelles mesures le Gouvernement compte prendre pour durcir l'arsenal répressif face à ces phénomènes de rodéos et enfin permettre à nos forces de l'ordre de disposer de moyens juridiques renforcés et efficaces pour combattre ces agissements inacceptables.

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Transmise au Ministère de l'intérieur


Réponse du Ministère de l'intérieur publiée le 24/01/2019

La pratique dite des « rodéos-motos » ou « cross-bitume » est un phénomène rencontré depuis plusieurs années, principalement au printemps et en été. Il est très présent dans les villes mais se généralise également en milieu rural. Il engendre un trouble à l'ordre public, de fortes nuisances sonores et un sentiment d'insécurité dans l'espace public. Après une légère inflexion en 2016, le phénomène est en pleine explosion. Afin de mieux lutter contre cette forme de délinquance, le Gouvernement a fortement soutenu la proposition de loi devenue loi n° 2018-701 du 3 août 2018 renforçant la lutte contre les rodéos motorisés, adoptée à l'Assemblée nationale le 4 juillet 2018 et au Sénat, à une très large majorité, le 26 juillet 2018. Ce vote montre le large consensus qui a présidé à l'élaboration de ce texte fixant désormais un cadre juridique adapté et dissuasif pour prévenir et réprimer ces agissements dangereux suscitant de plus en plus l'exaspération de la population et l'inquiétude des élus. Cette loi permet d'inscrire dans le code de la route une définition d'un délit spécifique. Ainsi, le fait d'adopter, au moyen d'un véhicule terrestre à moteur, une conduite répétant de façon intentionnelle des manœuvres constituant des violations d'obligations particulières de sécurité ou de prudence prévues par le code de la route, dans des conditions qui compromettent la sécurité des usagers de la route ou qui troublent la tranquillité publique, est puni d'un an d'emprisonnement et 15 000 euros d'amende. La loi réprime également l'incitation et l'organisation de rodéos motorisés : le fait d'inciter directement autrui à commettre ce type d'infraction ; le fait d'inciter, de promouvoir, d'organiser un rassemblement destiné à permettre la commission de ces infractions, sont punies quant à elles de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende. Des peines allant jusqu'à cinq ans d'emprisonnement pourront désormais être prononcées si l'infraction est commise par un conducteur sous l'empire de l'alcool, de produits stupéfiants ou n'est pas titulaire du permis de conduire. La confiscation du véhicule ayant servi à commettre l'infraction, en tant que peine complémentaire, sera obligatoire si la personne en est le propriétaire ou, sous réserve des droits du propriétaire de bonne foi, si elle en a la libre disposition. L'existence de cette peine complémentaire obligatoire permet aux préfets de décider de l'immobilisation et de la mise en fourrière du véhicule pendant une durée de sept jours en application de l'article L. 325-1-2 du code de la route. Le procureur de la République décidera par la suite de prolonger l'immobilisation afin de permettre la confiscation effective du véhicule. La lutte contre les rodéos motorisés s'inscrit pleinement dans le cadre de la police de sécurité du quotidien (PSQ), lancée le 8 février 2018 par le ministre de l'intérieur, symbole de l'engagement fort de l'État pour répondre aux attentes de la population. La circulaire NOR INTK1820252 du 9 août 2018 a donné aux préfets de département les instructions nécessaires à l'application de cette loi afin qu'ils définissent, en associant les procureurs de la République, une stratégie d'action associant la police et la gendarmerie nationales, les polices municipales et l'ensemble de leurs partenaires permettant une prise en compte adaptée de ces comportements. Au niveau national, un regain de l'engagement des forces de l'ordre pour lutter contre les rodéos motorisés est constaté en s'appuyant sur : la multiplication de dispositifs d'interception et de contrôles coordonnés notamment avec le renfort de moyens aériens ou des polices municipales ; la mise en place progressive, sous l'égide des préfets, de plans d'action départementaux de lutte contre les rodéos motorisés ; l'usage de la vidéo-protection qui permet d'identifier les auteurs et de procéder ultérieurement à leurs interpellations ; la recherche du renseignement avec l'identification des aires propices aux rodéos et l'intensification de la surveillance des parkings et zones commerciales, l'implication des citoyens et des gérants de station-essence, des patrouilles avec moyens banalisés, la veille des réseaux sociaux et la sensibilisation des auto-écoles ; une meilleure communication avec les bailleurs sociaux qui signalent les véhicules deux roues motorisés entreposés dans les locaux communs et qui sont utilisés pour commettre ces délits. Entre août et novembre 2018, plus de trois cents personnes ont été interpellées par la police et la gendarmerie nationales, donnant lieu à plus de cent-cinquante procédures judiciaires, et plus d'une soixantaine de véhicules saisis. Par ailleurs, de nombreuses actions de prévention et de communication ont été engagées par la police et la gendarmerie nationales telles que la sensibilisation à la conduite des deux roues motorisés dans les écoles et structures accueillant des jeunes, la réalisation de clips relatifs aux rodéos, les conseils auprès des collectivités via le référent sûreté afin d'aménager l'espace public pour limiter ce phénomène. Enfin, la médiatisation des interpellations est systématique notamment en s'appuyant sur les réseaux sociaux.

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