Question de Mme PUISSAT Frédérique (Isère - Les Républicains) publiée le 16/11/2017

Mme Frédérique Puissat attire l'attention de M. le Premier ministre sur la question de la prise en charge par les départements des mineurs non accompagnés (MNA).

Les départements, en effet, ont la charge d'accueillir ces mineurs dans le cadre d'un dispositif national de mise à l'abri, d'évaluation et d'orientation encadré par la loi n° 2016-297 du 14 mars 2016 relative à la protection de l'enfance. Lorsque l'évaluation conclut à la minorité et l'isolement du jeune, celui-ci est pris en charge par le département au titre de l'aide sociale à l'enfance (ASE).

Aujourd'hui cependant, le fait est que les départements, déjà confrontés à l'explosion des dépenses sociales liée au financement du revenu de solidarité active (RSA), ont les plus grandes difficultés à remplir leurs obligations en raison du nombre croissant de mineurs nécessitant d'être accueillis, plus particulièrement des MNA arrivés dans notre pays et dont le nombre a considérablement augmenté ces dernières années avec la crise migratoire.

Ce flux massif aboutit à une situation de saturation qui conduit inévitablement à rallonger le temps d'évaluation fixé à cinq jours (le seul temps remboursé par l'État via le fonds national de financement de la protection de l'enfance) mais qui désormais se prolonge quasi systématiquement sur deux ou trois mois. Cette situation oblige les départements bien souvent à continuer à loger des individus devenus entretemps majeurs, qui ne sont pas en danger et dont le cas relève bien plutôt du 115.

Ainsi, à titre d'exemple, le département de l'Isère s'est trouvé contraint d'augmenter fortement son budget consacré aux MNA, lequel est passé de 2,6 millions d'euros en 2015 à 9 millions d'euros en 2017, et de créer, dans l'urgence, 270 places supplémentaires d'accueil ainsi que de mettre en place une deuxième équipe d'évaluation.

Ont été annoncées en septembre 2017 des mesures qui prévoient un abondement budgétaire dès cette année de 6,5 millions d'euros consacrés au remboursement par l'État aux départements de la période d'évaluation. Il n'y a rien toutefois en ce qui concerne un remboursement des dépenses supplémentaires liées à la prise en charge des MNA par les départements durant les années antérieures.

Le Gouvernement par ailleurs s'est engagé auprès de l'assemblée des départements de France (ADF) sur un financement exceptionnel équivalent à 30 % du coût correspondant à la prise en charge des MNA supplémentaires en 2017 sans que toutefois les bases d'une telle prise en charge ne soient suffisamment précisées.

Enfin, le discours du Gouvernement devant l'assemblée des départements de France semble en complet décalage avec celui du président de la République, lequel dans le cadre de ses engagements avait indiqué que l'accueil des jeunes migrants était de l'entière responsabilité de l'État et devait être distingué de l'aide sociale à l'enfance.

Aussi, elle lui demande de bien vouloir lui préciser si parmi les pistes qui seront considérées dans le cadre de la concertation avec les départements annoncée en septembre 2017 et qui devrait déboucher sur un plan d'action pour le début 2018, figurent les modalités de remboursement des dépenses supplémentaires engagées au titre des MNA avant 2017 par les collectivités ainsi que la possibilité et les conditions d'un transfert du département vers l'État de la prise en charge des MNA.

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Réponse du Premier ministre publiée le 18/01/2018

Le Gouvernement porte une grande attention aux difficultés actuellement rencontrées par les conseils départementaux pour assurer l'accueil des mineurs non-accompagnés (MNA). Il a d'ailleurs tiré une conclusion claire des différentes sollicitations adressées par les présidents des conseils départementaux : si la protection de l'enfance constitue une compétence essentielle des départements, la situation des mineurs non-accompagnés, liée au contexte migratoire, ne peut être convenablement traitée sans que l'État y prenne toute sa part. C'est en ce sens que le Premier ministre a annoncé, le 20 octobre 2017 au congrès de l'Assemblée des départements de France (ADF), conformément aux engagements du Président de la République, que l'État assumerait l'évaluation et l'hébergement d'urgence des personnes se déclarant mineures entrant dans le dispositif, jusqu'à ce que leur minorité soit confirmée. C'est en effet le rôle de l'État d'accueillir dignement une personne étrangère sur notre territoire, de lui assurer la protection correspondant à son statut, de s'assurer que les titres qu'elle présente sont authentiques – et de déterminer son âge. Pour mettre en œuvre cette décision, le Gouvernement a décidé, d'un commun accord avec le président de l'ADF, M. Dominique Bussereau, d'engager une mission d'expertise composée à la fois de représentants des corps d'inspection de l'État et de cadres supérieurs des conseils départementaux. Cette mission doit identifier les solutions opérationnelles les plus pertinentes pour améliorer l'efficacité, la cohérence et la soutenabilité de la phase d'évaluation et de mise à l'abri de la politique publique mise en œuvre au profit des mineurs non-accompagnés. Il s'agira notamment de définir des améliorations des modalités de l'évaluation, de renforcer le pilotage de cette procédure, mais aussi d'éviter qu'une même personne puisse être évaluée à plusieurs reprises dans différents départements. Des décisions seront prises au début de l'année 2018. Enfin, il faut souligner que la loi de finances pour 2018 prévoit des crédits supplémentaires, à hauteur de 132 millions d'euros, pour accompagner la hausse du nombre de mineurs concernés et prendre en charge, à titre exceptionnel, une partie des surcoûts de l'aide sociale à l'enfance liés à la hausse du nombre de mineurs non-accompagnés.

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