Question de Mme TAILLÉ-POLIAN Sophie (Val-de-Marne - SOCR) publiée le 15/02/2018

Mme Sophie Taillé-Polian attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur concernant l'application de la circulaire du 25 janvier 2018 et de l'objectif de réduction des bidonvilles dans l'horizon des cinq prochaines années.
Ce sont actuellement 16 000 personnes qui vivent dans les 570 bidonvilles que compte notre pays, dans des conditions qui témoignent d'une indigence que la République ne devrait tolérer.
Durant l'année 2017, ce sont au total 11 039 personnes qui ont été évacuées de force de leurs campements. En l'état actuel des choses, ce sont la moitié des expulsions qui sont réalisées alors même que ne sont envisagées aucunes solutions de relogement. Ces personnes sont ainsi condamnées à se réinstaller dans d'autres camps du même acabit. Ainsi, la politique menée, loinn d'éradiquer les bidonvilles les déplace uniquement. En outre, la trêve hivernale n'est, dans le cadre de ces expulsions, pas respectée, précarisant toujours davantage les familles concernées et alors même que le Gouvernement annonce vouloir s'astreindre à une exigence d'humanité. Par ailleurs, cette politique nuit au maintien des enfants dans la scolarité ainsi qu'au suivi médical des populations concernées, faisant de cet enjeu social un problème sanitaire.
Elle lui demande ainsi comment et sous quelles modalités concrètes il envisage de mettre en place l'objectif de réduction des bidonvilles dicté par ladite circulaire, s'il entend offrir des possibilités de relogement à plus de familles, et lui demande de respecter, pour ces personnes, le principe de la trêve hivernale.

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Transmise au Ministère de la cohésion des territoires


Réponse du Ministère de la cohésion des territoires publiée le 15/03/2018

Par l'instruction du 25 janvier 2018, le Gouvernement a fixé un nouveau cadre pour l'action des pouvoirs publics sur les campements illicites et les bidonvilles. Plus de 15 000 personnes, dont une grande majorité sont ressortissantes de pays d'Europe orientale, habitent près de 570 bidonvilles, dans des conditions indignes et dangereuses, pouvant engendrer des nuisances pour le voisinage. Malgré des évacuations répétées, souvent suivies de réinstallations, cette situation perdure depuis de nombreuses années. Le Gouvernement a décidé de relancer l'action de l'État en affirmant les principes d'humanité et de respect des lois de la République qui doivent la conduire, mais en fixant aussi une exigence d'efficacité, avec un objectif de résorption des bidonvilles. Pour atteindre cet objectif, l'instruction du Gouvernement du 25 janvier 2018 vise à développer des stratégies territoriales partenariales qui ont montré leur efficacité, à l'image de celles qui ont été mises en œuvre par exemple à Toulouse ou à Strasbourg. La nouvelle circulaire demande aux préfets d'engager une action de résorption « le plus tôt possible, si possible dès l'implantation et indépendamment de l'existence ou non de procédures juridiques engagées en vue de son évacuation ». Cette action pourra passer par la sécurisation des conditions de vie, l'encadrement de l'organisation du campement, la mise en place de solutions de sortie des occupants vers le droit commun, et ce jusqu'à la disparition complète du campement. Les solutions de sortie allieront à la fois programmes d'insertion en France dans un cadre contractuel, respect des lois de la République et coopération transnationale avec les pays d'origine des populations. Ces dispositions ne doivent pas faire obstacle à la mise en œuvre d'évacuations décidées sur la base de décisions de justice liées à l'illégalité de l'occupation ou de décisions administratives concernant des campements dangereux. Ces évacuations, comme c'est le cas aujourd'hui, devront respecter la circulaire interministérielle du 26 août 2012 relative à l'anticipation et l'accompagnement des opérations d'évacuation des campements illicites, ainsi que la loi Égalite et Citoyenneté du 27 janvier 2017 qui a étendu à des « lieux habités ou locaux », et donc notamment à des habitats informels, les dispositions des articles L. 412-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution (CPCE) relatives aux délais préalables à l'exécution d'une décision de justice (dispositions relatives à la trêve hivernale en matière d'expulsions), étant entendu que celles-ci ne s'appliquent qu'aux procédures civiles et non aux procédures administratives. Comme en témoigne la signature de l'instruction du Gouvernement du 25 janvier 2018 par 8 ministres (intérieur, justice, Europe et affaires étrangères, cohésion des territoires, solidarités et santé, travail, éducation nationale, égalité entre les femmes et les hommes), l'action devra être globale, c'est-à-dire portant à la fois sur l'accès aux droits (hébergement, logement, soins, école, emploi) mais aussi la protection de l'enfance, les droits des femmes, la lutte contre la délinquance et contre la traite des êtres humains, le respect de l'ordre public et de la régularité du séjour. Elle devra également comporter la prévention des réinstallations. Elle devra accorder une attention toute particulière à la situation des enfants, au respect de leurs droits et de l'obligation scolaire à laquelle ils sont soumis dès 6 ans, quelle que soit leur nationalité, ainsi qu'à celles des femmes, et inclure des actions liées au suivi médical, à l'image de la campagne de vaccination conduite actuellement en Île-de-France par l'Agence régionale de santé dans les campements et bidonvilles. Cette action devra enfin nécessairement impliquer les collectivités territoriales concernées, dont l'engagement est indispensable, comme le montrent les exemples des territoires qui ont réduit significativement le nombre de bidonvilles sur leur territoire. Cette nouvelle instruction du Gouvernement est le fruit d'un travail d'élaboration qui a rassemblé des représentants de collectivités territoriales, des services déconcentrés de l'État, d'associations, des opérateurs, des chercheurs et des acteurs de terrain. Il s'est nourri de l'évaluation des résultats des projets soutenus par l'État dans le cadre de l'application de la circulaire du 26 août 2012. Le suivi de la mise en œuvre de cette circulaire est confié au Délégué interministériel pour l'hébergement et l'accès au logement (DIHAL) qui a d'ores et déjà engagé la mobilisation autour de ce nouveau texte et organisera notamment un événement de sensibilisation à destination des élus le 29 mars prochain à l'Assemblée nationale en partenariat avec Unicef France.

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