Question de Mme ESPAGNAC Frédérique (Pyrénées-Atlantiques - SOCR) publiée le 29/03/2018

Mme Frédérique Espagnac attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur la vive inquiétude des agriculteurs à propos du danger qui pèse sur le devenir des surfaces pastorales.

Les surfaces pastorales sont des terres agricoles fournissant une alimentation pour les troupeaux : elles permettent une alimentation complémentaire et diversifiée de ceux-ci, apportant une saveur toute particulière à leurs produits et, en période de sécheresse, elles contribuent pleinement à leur alimentation quotidienne. La reconnaissance de ces surfaces est nécessaire au maintien de l'activité pastorale, qui participe à la préservation de la biodiversité, à la lutte contre les incendies, à l'entretien et à la vie de nos territoires.

Mais ces surfaces peuvent avoir moins de 50 % d'herbe (arbres, broussailles...). Or, actuellement, la Commission européenne considère comme surface agricole une surface où il y a au moins 50 % d'herbe et l'unique dérogation réside dans le cadre de « pratiques locales établies » qui doivent être dûment justifiées. En France, la politique agricole commune (PAC) 2015-2020 permet de reconnaître une partie des surfaces avec moins de 50 % d'herbe à la condition qu'elles rentrent dans le cadre de pratiques locales établies. Ces surfaces sont alors dotées d'un prorata.

À la suite d'un audit réalisé par la Commission européenne sur le territoire français concernant les aides surfaces 2015 de la PAC, il a été reproché à la France une déficience dans les contrôles administratifs sur l'admissibilité des parcelles déclarées, obligeant l'État à payer 7% des aides versées aux agriculteurs contrôlés.

Pour se prémunir de sanctions plus lourdes, le ministère de l'agriculture envisage donc de réduire les aides sur les surfaces pastorales à partir de 2018 et de mettre en place une baisse du taux d'admissibilité des tranches de prorata 10-30, 30-50 et 50-80.

Or la demande de la Commission européenne est toute autre : elle demande à la France d'améliorer sa méthode d'évaluation et de contrôle des proratas et non de les modifier.

L'enjeu actuel, pour les agriculteurs français est, à l'inverse, de faire reconnaitre l'existence de ces surfaces sur l'ensemble du territoire français et de les rendre éligibles aux aides. À ces fins, un règlement européen, dénommé « omnibus » est entré en application le 1er janvier 2018. Il offre la possibilité de sécuriser le dispositif français de reconnaissance des surfaces pastorales ainsi que la possibilité de reconnaître les surfaces pastorales qui ne le sont pas à ce jour. L'article 4 permet à la France de reconnaître « les terres qui sont pâturées et où l'herbe ou les fourrages herbacés ne sont pas prédominants ou sont absents » sur tout son territoire ou une partie de son territoire.

Il y a urgence : la France a jusqu'au 31 mars 2018 pour notifier à la Commission européenne les évolutions réglementaires qu'elle souhaite pour les surfaces pastorales.

Aussi espère-t-elle vivement que soient entendues les inquiétudes et demandes du monde paysan. Elle demande au Gouvernement de ne pas modifier les taux d'admissibilité des tranches de prorata et elle encourage le gouvernement français à se saisir du règlement « omnibus » pour sécuriser le dispositif actuel de reconnaissance des surfaces pastorales et étendre la reconnaissance aux surfaces non reconnues.

- page 1432


Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 26/07/2018

Depuis 2015, dans le cadre de la politique agricole commune (PAC), les prairies permanentes sont définies comme des surfaces consacrées à la production d'herbe où l'herbe et les autres plantes fourragères herbacées sont prédominantes. Toutefois, les États membres peuvent ajouter à cette définition des surfaces pour lesquelles l'herbe et les autres plantes fourragères herbacées ne sont pas prédominantes, dès lors que ces surfaces sont adaptées au pâturage et exploitées par des pratiques présentant un caractère traditionnel et couramment mises en œuvre (dites « pratiques locales établies »). À ce titre, la France avait fait le choix de rendre admissibles en tant que prairies permanentes les surfaces pastorales à prédominance ligneuse (SPL) situées au sein de 23 départements des massifs montagneux et du pourtour méditerranéen. À partir de la campagne de la PAC 2018, le nouveau règlement (UE) 2013/2393 du 13 décembre 2017, dit règlement Omnibus, autorise les États membres à reconnaître en sus comme prairies permanentes des surfaces adaptées au pâturage où l'herbe et les autres plantes fourragères herbacées ne prédominent pas ou sont absentes. L'élevage extensif pratiqué sur les SPL contribue à maintenir une activité économique cruciale dans des zones rurales où peu d'alternatives existent et il participe à la préservation des paysages et de la biodiversité de ces zones. L'importance de ces zones a conduit le Gouvernement à mobiliser cette nouvelle possibilité réglementaire pour étendre la prise en compte de ces surfaces. Ainsi, à compter de la campagne de la PAC 2018, l'admissibilité de ces surfaces aux aides de la PAC est reconnue avec l'élargissement à 15 nouveaux départements du zonage existant, le portant ainsi à 38 départements. Par ailleurs, dans un audit récent, la Commission européenne a estimé que la France a pris en compte certaines surfaces admissibles de façon trop importante, ce qui fait peser un risque de refus d'apurement des comptes. La méthode de calcul de la surface admissible des prairies et pâturages permanents utilisée pour la détermination du montant des aides (méthode dite du « prorata  ») a donc été revue à compter de la campagne 2018 ; des précisions supplémentaires ont ainsi été apportées aux différents types de critères qui permettent de déterminer cette surface admissible. La bonne mise en œuvre de la réglementation est essentielle pour sécuriser juridiquement l'admissibilité de ces surfaces aux aides européennes, et promouvoir par ce biais le maintien de l'activité pastorale dans les zones concernées. Afin d'accompagner au mieux les agriculteurs dans leur déclaration de demande d'aides de la PAC, le guide national d'aide à la déclaration du taux d'admissibilité des surfaces de prairies et pâturages permanents a été actualisé en ce sens. Il est disponible depuis l'ouverture de la période de télédéclaration des aides de la PAC, le 1er avril 2018. Lors de la déclaration annuelle du taux d'admissibilité des prairies, il est important que les agriculteurs tiennent compte de ces changements ainsi que de l'évolution paysagère de leurs parcelles, sur l'ensemble du territoire.

- page 3861

Page mise à jour le