Question de Mme BILLON Annick (Vendée - UC) publiée le 12/04/2018

Mme Annick Billon attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur les limites du projet d'augmentation des seuils obligatoires de contrôle légal des entreprises. Envisagée à l'issue d'une mission d'évaluation menée par l'inspection générale des impôts, cette préconisation s'inscrirait dans le projet de loi du plan d'action pour la croissance et la transformation des entreprises (Pacte) qui ambitionne de donner aux entreprises les moyens d'innover, de se transformer, de grandir et de créer des emplois. Or, en se passant de l'expertise du commissaire aux comptes, les petites entreprises ne bénéficient plus de la garantie de la sincérité des comptes, argument essentiel pour asseoir les ambitions d'innovations, de transformation, de croissance auprès des organismes financiers et des acteurs publics, pour permettre ces mêmes ambitions voulues par le projet de loi. À défaut de créer des emplois, cette mesure en supprimerait même. Avec le relèvement des seuils, de nombreux commissaires aux comptes indépendants seront contraints de cesser leur activité puisque les grosses structures font appel majoritairement à des cabinets spécialisés. Impact majeur sur la profession qui trouvera écho auprès de la filière en raison de la suppression de débouchés. L'Italie, dont le tissu économique est comparable à la France, a récemment baissé les seuils d'audit à des niveaux proches des nôtres afin de réduire les risques menaçant les entreprises. Cette décision a également permis la diminution des fraudes et un meilleur recouvrement de l'impôt. Appliquée en Suède depuis 2010, l'augmentation des seuils est remise en question car elle a permis l'augmentation de la criminalité économique et fragilisé la croissance des petites entreprises. Aussi, avant d'opérer une évolution qui pourrait s'avérer contre-productive, elle demande au ministre de reconsidérer la question des seuils obligatoires de contrôle légal des entreprises et d'envisager de manière concertée avec la profession les aménagements acceptables et profitables aux ambitions du projet de loi « Pacte ».

- page 1692


Réponse du Ministère de l'économie et des finances publiée le 19/07/2018

Dans le cadre du plan d'action pour la croissance et la transformation des entreprises (PACTE), le Gouvernement souhaite alléger les obligations pesant sur les petites entreprises, afin de faciliter leur développement. Parmi les mesures envisagées à cet effet, le relèvement de certains seuils réglementaires et fiscaux constitue une orientation importante pour réduire les charges administratives qui leur sont applicables. Dans ce cadre, le Gouvernement envisage, en effet, de relever les seuils de certification légale des comptes par un commissaire aux comptes au niveau prévu par le droit européen, c'est-à-dire 8 M€ de chiffres d'affaires, 4 M€ de bilan et 50 salariés. Une analyse, conduite par l'inspection générale des finances, a en effet démontré que la pertinence de seuils d'audit légal plus faibles que ceux fixés par le droit européen n'est pas établie, tant du point de vue de la qualité des comptes des petites entreprises, que de leur accès au financement. Le rapport de l'inspection générale des finances démontre en outre que les coûts supportés par les petites entreprises françaises qui ne sont pas visées par l'obligation européenne de certification légale des comptes sont élevés (de l'ordre de 600 millions d'euros, soit en moyenne 5 511 € par an pour une entreprise située sous les seuils européens). Pour cette raison, il semble pertinent, au regard des enjeux financiers limités associés, de rendre facultative l'intervention d'un commissaire aux comptes dans les petites entreprises, alors que 75 % d'entre elles recourent en parallèle aux services d'un expert-comptable, qui concourt, d'ores et déjà, à la qualité comptable dans ces structures. Cette démarche est conforme à l'objectif fixé par le Premier ministre, dans la circulaire du 26 juillet 2017 relative à la maîtrise des flux réglementaires et de leur impact, d'identifier et d'éliminer les surtranspositions du droit européen dans notre droit national, alors qu'un nombre significatif d'États membres ont fixé des seuils identiques ou supérieurs à ceux prévus par le droit européen. Elle est également pleinement cohérente avec les orientations du Gouvernement visant à établir un nouveau contrat avec les entreprises fondé la restauration de liens de confiance mutuelle entre l'État et les acteurs économiques, et ainsi, une diminution du poids des contrôles et une responsabilisation individuelle accrue, comme en témoigne la création d'un droit à l'erreur, prévu par le projet de loi pour un État au service d'une société de confiance. Le relèvement des seuils d'audit constitue un défi pour la profession de commissaires aux comptes, impliquant une évolution en profondeur de son activité. Afin d'étudier, de manière précise, les conséquences de cette réforme et d'envisager les mesures d'accompagnement nécessaires, l'appui d'une mission présidée par Patrick de Cambourg, président de l'Autorité des normes comptables, a été sollicitée sur l'avenir de la profession. Cette mission aura notamment pour objectif d'identifier des missions nouvelles, légales ou non, pouvant être confiées aux commissaires aux comptes ; de rechercher les moyens pour renforcer l'attractivité de cette profession et de permettre le maintien d'un maillage territorial suffisant de la profession dans les territoires ; de proposer des mesures d'aide aux professionnels les plus touchés par la réforme ; enfin, de formuler des propositions visant à favoriser le développement de l'expertise comptable et à enrichir ses missions d'appui et de conseil aux entreprises ne disposant pas d'un commissaire aux comptes. Les conclusions de cette mission permettront au Gouvernement d'adopter, d'ici à l'été 2018, un plan d'action visant à accompagner la mise en œuvre du relèvement des seuils d'audit.

- page 3599

Page mise à jour le