Question de Mme BONNEFOY Nicole (Charente - SOCR) publiée le 12/04/2018

Mme Nicole Bonnefoy attire l'attention de M. le ministre de l'action et des comptes publics sur la situation fiscale à caractère exceptionnel des « Américains accidentels ». Il s'agit de tous ces Franco-Américains qui bénéficient de la double nationalité du seul fait d'être nés sur le sol américain et qui n'ont, pour leur très grande majorité, jamais résidé ou encore moins travaillé outre-Atlantique et sont aujourd'hui imposés en France.
Ces citoyens se voient pourtant appliquer comme tout citoyen américain le principe de la « citizen based taxation » (taxation de la citoyenneté). Ce système impose à tout individu possédant la nationalité américaine, y compris la double nationalité franco-américaine, de déclarer ses revenus annuellement auprès de l'administration fiscale américaine, et ce même s'il vit et travaille à l'étranger. Ce principe a été renforcé dans son application lors de la promulgation de la loi dite « FATCA » d'août 2014 autorisant l'accord franco-américain pour la mise en œuvre par les banques françaises, de la réglementation américaine baptisée « foreign account tax compliance act ». L'objectif de « FATCA » est louable puisqu'il s'agit de traquer les « mauvais payeurs », des Américains vivant à l'étranger et omettant de déclarer leurs revenus auprès de l'administration fiscale américaine. Malheureusement, l'application de cette loi a mis de nombreux « Américains accidentels » dans des situations critiques, ceux-ci se voyant notifier du jour au lendemain par leurs banques une obligation de régularisation vis-à-vis de l'administration fiscale américaine, se retrouvant ainsi soumis à deux législations fiscales différentes. La procédure de renoncement à la nationalité américaine implique par ailleurs une mise en conformité fiscale préalable et le paiement d'une taxe, qui rend ce processus très coûteux pour ceux qui souhaiteraient l'entamer. Considérés comme des contribuables américains, ces binationaux se trouvent aujourd'hui confrontés à des situations souvent difficiles, notamment auprès des banques, qui n'hésitent pas à refuser l'ouverture de comptes, en clôturer d'office, ou encore à bloquer des successions, si ces derniers ne s'enregistrent pas auprès du fisc américain. C'est pourquoi elle lui demande si le Gouvernement entend prendre des mesures dans ce sens pour mettre un terme à cette situation.

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Transmise au Ministère de l'économie et des finances


Réponse du Ministère de l'économie et des finances publiée le 17/05/2018

En matière de fiscalité, les États-Unis appliquent le principe de l'imposition sur la base de la citoyenneté, celle-ci pouvant s'acquérir par la seule naissance sur le sol américain. Les citoyens français qui ont aussi la nationalité américaine sont ainsi tenus, par le droit américain, de procéder à une déclaration de leurs revenus auprès des services fiscaux de ce pays et d'acquitter les impôts dus sous réserve de franchises applicables. Il en va d'ailleurs de même pour tous les citoyens américains résidant en France. Il s'agit là d'un principe ancien. Une convention fiscale bilatérale ayant été conclue entre la France et les États-Unis en vue d'éviter les doubles impositions, ce n'est que dans les cas où l'impôt français est inférieur à celui dû aux États-Unis ou que certains revenus ne sont pas imposés de façon effective en application du droit fiscal français et sont par ailleurs taxables selon la législation des États-Unis qu'une imposition complémentaire peut être demandée par les autorités fiscales américaines. Le 14 novembre 2013, la France a signé un accord intergouvernemental, dit « accord FATCA (Foreign Account Tax Compliance Act) », relatif au respect des obligations fiscales concernant les comptes étrangers. Entré en vigueur le 14 octobre 2014, cet accord fixe un cadre pour l'échange automatique et réciproque d'informations fiscales entre la France et les États-Unis. À défaut, la loi « FATCA » que les États-Unis ont adoptée en 2010 aurait obligé tous les établissements financiers à transmettre directement à l'administration fiscale américaine des informations détaillées sur les comptes détenus directement ou indirectement par des contribuables américains. Ainsi, l'administration américaine dispose d'informations plus exhaustives sur l'ensemble des ressortissants américains, dont les « Américains accidentels », c'est-à-dire certains citoyens français ayant également la nationalité américaine, notamment du fait de leur naissance sur le sol américain, mais n'ayant pas de liens particuliers avec les États-Unis. Cette administration considère qu'en application de la législation des États-Unis, les Américains accidentels auraient dû accomplir les démarches déclaratives incombant à tout ressortissant américain. Cette problématique ne concerne pas les seuls binationaux français : le Mexique et le Canada sont particulièrement concernés, de même que d'autres États, notamment européens. Le Gouvernement, par le biais du ministère de l'Europe et des Affaires étrangères, a sollicité l'attention des autorités américaines sur ces situations particulières et plaidé en faveur d'une renonciation facilitée à la nationalité américaine pour ces « Américains accidentels », étant entendu que les conditions d'octroi de la nationalité et le principe de l'imposition sur la base de la citoyenneté relèvent de la compétence souveraine des États-Unis. Un courrier a également été adressé au secrétaire au Trésor américain, le 8 mai 2017, par la présidence de l'Union européenne, appelant son attention sur les difficultés concrètes rencontrées par certains citoyens européens ayant également la nationalité américaine. Les représentants de l'administration fiscale française ont par ailleurs engagé des contacts et un dialogue avec les services fiscaux américains pour proposer que dans les situations où, comme c'est le cas pour les « Américains accidentels », les liens avec les États-Unis sont ténus, la procédure de renonciation à la nationalité soit rendue plus simple et moins coûteuse au regard des obligations fiscales qui en découlent. La France est, à cet égard, l'un des États les plus mobilisés et espère des avancées concrètes de la part des autorités américaines. C'est pourquoi le dialogue sera poursuivi. Enfin, le Gouvernement reste vigilant quant au respect par les banques de leurs obligations à l'égard des personnes de nationalité américaine, afin que le droit au compte leur soit reconnu et soit appliqué de manière effective. À cet égard, il est rappelé qu'il existe une procédure de recours devant la Banque de France permettant de contraindre une banque à accepter l'ouverture d'un compte, l'établissement étant alors désigné par la Banque de France.

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