Question de M. LAURENT Daniel (Charente-Maritime - Les Républicains) publiée le 12/07/2018

M. Daniel Laurent attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur la reconnaissance de la saliculture comme activité agricole. La définition de l'activité agricole à l'article L. 311-1 du code rural et de la pêche maritime, telle que rédigée en 1988, fait obstacle à la reconnaissance de la saliculture comme activité agricole alors que ce même code rural s'applique à cette activité et à ses producteurs. En effet, sont considérées comme activités agricoles au titre de cet article « toutes activités correspondant à la maîtrise et à l'exploitation d'un cycle biologique de caractère végétal ou animal » auxquelles s'ajoutent des dérogations (cultures marines, préparation et entraînement des équidés domestiques...). Les effets de la reconnaissance de la saliculture comme une activité agricole sont donc assez divers et leur application à la saliculture est partielle et incertaine. De telles incertitudes sont préjudiciables à la prévisibilité de la conduite d'une exploitation et d'une activité. Les saliculteurs ne maîtrisent pas leur statut professionnel faute d'avoir une connaissance complète de leurs droits et obligations, alors que l'activité salicole est liée à la nature, à l'environnement et à la biodiversité spécifique des marais salants. En conséquence, il lui demande quelles sont les propositions du Gouvernement, dans un objectif de simplification, de clarté et de reconnaissance de cette activité comme agricole.

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Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 01/08/2018

Réponse apportée en séance publique le 31/07/2018

M. Daniel Laurent. Monsieur le ministre, ma question porte sur la reconnaissance de la saliculture comme activité agricole.

Sur l'initiative de M. Bruno Retailleau, nous avons été nombreux à nous associer à la proposition de loi n° 508 du 12 avril 2017 tendant à reconnaître la saliculture comme activité agricole.

Si l'exploitation du sel marin issu des marais salants est considérée comme une activité agricole dans de nombreux domaines - foncier, exploitation agricole, production, statut professionnel -, force est de reconnaître que les effets de la reconnaissance de la saliculture comme activité agricole sont assez divers, cette reconnaissance étant partielle et incertaine.

En effet, la définition de l'activité agricole qui figure à l'article L. 311-1 du code rural et de la pêche maritime fait actuellement obstacle à cette reconnaissance, alors que ce même code s'applique à cette activité et à ses producteurs.

Les saliculteurs ne maîtrisent donc pas pleinement leur statut professionnel, faute d'avoir une connaissance complète de leurs droits et obligations.

Monsieur le ministre, en février dernier, dans votre correspondance sur le statut des saliculteurs, vous m'indiquiez être prêt à soutenir les propositions législatives visant à simplifier et à mettre en cohérence la réglementation nationale.

Forts de cette réponse, nous pensions que le projet de loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous était le bon vecteur. Or les amendements déposés au sein de ce texte ont été déclarés irrecevables, soit au titre de l'article 40 de la Constitution, soit comme cavaliers législatifs. Dont acte !

Les sauniers sont actuellement en pleine récolte de sel et de cueillette de fleur de sel. J'espère que nous pourrons enfin leur annoncer une bonne nouvelle.

Elle est d'autant plus attendue que les sauniers de l'Atlantique sont particulièrement inquiets à la suite du feu vert donné par l'Institut national de l'origine et de la qualité, l'INAO, à l'indication géographique protégée « Fleur de sel de Camargue ». La méthode de production du groupe industriel Salins et la nature de ses produits ne sont pourtant en rien comparables à celles des producteurs artisanaux de nos marais salants. Depuis plus de dix ans, les sauniers sollicitent une protection de l'appellation. Si cette décision de l'INAO devait être entérinée, elle mettrait à mal la démarche de spécialité traditionnelle garantie en cours et pourrait encourager concurrence déloyale et autres contrefaçons.

En conséquence, monsieur le ministre, quelles réponses pouvez-vous nous apporter pour conforter le renouveau de la saliculture artisanale, tant du point de vue de la viabilité économique que de celui de la reconnaissance d'un produit de terroir de qualité ? La saliculture, comme activité agricole, a besoin d'une réponse ferme et définitive !

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation.

M. Stéphane Travert, ministre de l'agriculture et de l'alimentation. Monsieur le sénateur Daniel Laurent, vous avez parfaitement raison : il nous faut avancer sur cette question.

La situation présente peut effectivement poser des difficultés dans plusieurs domaines que vous connaissez bien, tels que la sécurisation de l'activité salicole au sein des coopératives agricoles et la reconnaissance en organisation de producteurs. La pratique administrative assimile néanmoins déjà les saliculteurs à des agriculteurs du point de vue social, du fait de leur affiliation à la MSA, mais aussi fiscal, puisqu'ils sont soumis à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices agricoles.

Une modification de l'article L. 311-1 du code rural et de la pêche maritime sécuriserait la situation de fait des coopératives et des sociétés de forme agricole exerçant une activité salicole.

Cette reconnaissance comme activité agricole n'aurait pas de conséquence pour l'accès aux aides européennes, puisque le sel ne figure pas à l'annexe I du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne. Outre une sécurisation juridique et une simplification pour les administrés, cette reconnaissance permettrait aux saliculteurs d'être éligibles à certains programmes du Fonds national de gestion des risques en agriculture, le FNGRA, en contrepartie d'une contribution des saliculteurs.

Vous avez rappelé que des amendements ont été déposés à cette fin au sein du projet de loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous. Ces amendements n'ont pu être examinés, car ils constituaient des cavaliers législatifs.

En revanche, j'ai souhaité qu'une réflexion parlementaire soit mise à contribution sur ce sujet pour répondre rapidement aux questions et aux légitimes préoccupations des saliculteurs concernant une activité économique qui s'exerce sur bien des territoires.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Laurent, pour répondre à M. le ministre.

M. Daniel Laurent. Monsieur le ministre, vous m'aviez fait la même réponse devant la commission des affaires économiques et par courrier.

Vous savez ce qui vous reste à faire : les saliculteurs n'ont pas besoin simplement d'une réflexion parlementaire, mais d'une vraie réponse ! Cette réponse ne saurait venir dans deux ou trois ans : eux, ils travaillent, ils sont tous les jours au turbin ! Si vous voulez que des jeunes s'installent et conservent l'ambition de faire perdurer cette profession, il faut les protéger et les soutenir, réellement et non virtuellement !

Je vous remercie, monsieur le ministre, de prendre en considération cette demande et de vous montrer très actif et réactif.

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