Question de Mme CHAUVIN Marie-Christine (Jura - Les Républicains) publiée le 06/09/2018

Mme Marie-Christine Chauvin appelle l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur les conséquences économiques de la sécheresse pour les agriculteurs. La canicule qui s'est installée sur la France à l'été 2018 leur est catastrophique. Très présente en surface malgré les réserves hydriques souterraines reconstituées au cours des mois précédents, cette sécheresse a complétement bloqué la pousse d'herbe. Plusieurs coupes de foin sont d'ores et déjà perdues. Il en résulte que les éleveurs ont dû entamer les stocks de fourrage d'hiver pour nourrir les animaux ou se mettre en grande difficulté financière pour en acheter ou, pire encore, pour vendre une partie de leur cheptel faute de pouvoir le nourrir. À cela s'ajoute le fait que les animaux produisent beaucoup moins. Certes, quelques mesures ont été prises comme le versement de 70 % des aides de la politique agricole commune dès l'automne 2018. Mais cela s'avère nettement insuffisant. Dans le même temps, la surface mise en jachère supporte un couvert qui pourrait dès à présent subvenir à l'alimentation des animaux, que ce soit pour les pâturages ou la récolte. Face à cette situation sans précédent, les professionnels ont demandé la possibilité de récolter tous les fourrages disponibles sur les jachères, ainsi que de modifier les emplacements et compositions des surfaces d'intérêt écologique (SIE). En résumé, il est demandé que les éleveurs aient plus de latitudes, sans contrainte, du moment qu'ils respectent les critères globaux : pas de produits phytosanitaires sur les SIE, et un taux de SIE suffisant à l'échelle de l'exploitation. Il s'agit d'une mesure de bon sens pour que la réglementation ne devienne pas un handicap ! Puis en prévision de l'avenir, la réalisation d'une véritable épargne de précaution sans charges sociales et fiscales, abondée les bonnes années, permettrait de faire face aux aléas climatiques qui ne manqueront pas de se manifester à nouveau. Elle lui demande donc quelles sont les mesures qu'il compte prendre, tant au niveau national qu'auprès de la Commission européenne pour venir en aide aux agriculteurs.

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Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 18/10/2018

Depuis ces derniers mois, certains départements français sont confrontés à un épisode de sécheresse impactant les productions agricoles. S'agissant de la mise en œuvre du régime des calamités agricoles, cette procédure relève de la compétence des préfets de département qui, lorsque les conditions sont remplies, initient la procédure pour les cultures et risques éligibles. Une demande de reconnaissance est alors établie, à l'issue de la campagne de production pour les pertes de récolte, et transmise aux services du ministère de l'agriculture et de l'alimentation. Après instruction, un avis est rendu par le comité national de gestion des risques en agriculture sur le caractère, ou non, de calamité agricole. Le dépôt des demandes des exploitants sinistrés qui ne disposent pas d'une couverture assurantielle peut alors débuter permettant ainsi de procéder à leur indemnisation. Face à la multiplication des intempéries, il est indispensable que les exploitants agricoles puissent assurer plus largement leurs productions à travers le dispositif d'assurance récolte contre les risques climatiques, encouragé par l'État et qui inclut la grêle ou le gel. Ce soutien prend la forme d'une prise en charge partielle des primes ou cotisations d'assurance payées par les exploitants agricoles, pouvant aller jusqu'à 65 %. Les producteurs ont la possibilité de réduire le taux de franchise ou bien encore le seuil de déclenchement, afin de disposer d'un contrat d'assurance adapté à leurs besoins. Par ailleurs, face à cette situation, le Gouvernement a sollicité la Commission européenne dès le mois de juillet 2018 pour la mise en place de mesures exceptionnelles. Le Gouvernement a ainsi obtenu l'augmentation des taux des avances sur les aides de la politique agricole commune (PAC) qui seront versées à partir du 16 octobre 2018, la valorisation des jachères pour la production de fourrage y compris pour subvenir aux besoins d'autres agriculteurs en difficulté, pour l'ensemble du territoire national, ainsi que des mesures dérogatoires pour l'implantation des cultures dérobées en complément de celles déjà prises par l'État début août 2018 dans le cadre de la procédure pour cas de force majeure. La Commission a présenté un projet de décision le 30 août 2018, qui sera publié très prochainement. S'agissant de mesures exceptionnelles qui pourraient être décidées par la Commission européenne, au titre de l'article 221 du règlement 1308/2013, celles-ci ont été sollicitées par plusieurs États membres pour permettre une compensation des pertes de revenus des agriculteurs liées aux difficultés climatiques de cet été. La Commission n'a pas exclu une telle possibilité mais a invité les États membres à lui transmettre par écrit un état de leurs situations nationales et une estimation des pertes de récolte en vue d'une analyse plus approfondie. Le sujet est suivi de près par les services du ministère de l'agriculture et de l'alimentation. Par ailleurs, dans le cadre des travaux sur la future PAC menés actuellement, une réflexion est engagée par les services du ministère de l'agriculture et de l'alimentation pour faire évoluer les dispositifs existants du règlement de l'organisation commune des marchés dédiés à la gestion des crises afin de les rendre plus efficaces et plus réactifs. Plusieurs dispositifs peuvent être mobilisés pour accompagner les exploitants qui connaîtraient des difficultés économiques en cette période : le recours à l'activité partielle pour leurs salariés ; un dégrèvement de la taxe sur le foncier non bâti pour les parcelles impactées ; les mesures de report de cotisations sociales. S'agissant des mesures en matière de cotisations sociales, les exploitants en difficulté peuvent solliciter auprès de leur caisse de mutualité sociale agricole un report de paiement de leurs cotisations sociales, qui prend la forme d'un échéancier accordé à ceux qui se trouvent en situation financière et économique difficile quelle qu'en soit la cause, mais dont la viabilité de l'exploitation ou de l'entreprise est reconnue. Les échéanciers de paiement peuvent porter sur les cotisations et contributions sociales dues pour la protection sociale personnelle obligatoire des chefs d'exploitations ou d'entreprises agricoles, sur les cotisations sociales patronales et les contributions de sécurité sociale dues par les employeurs de main-d'œuvre agricole, et sur les cotisations conventionnelles du régime des non-salariés et salariés agricoles recouvrées pour le compte de tiers. Au-delà de ces dispositifs, le Gouvernement a ouvert un chantier sur la question centrale de la fiscalité agricole pour faire des propositions innovantes en 2018, notamment sur la constitution d'une épargne de précaution. Un groupe de travail, auquel participent des parlementaires ainsi que des représentants de la profession agricole, a été constitué et les travaux ont été lancés le 16 février 2018. Une restitution des travaux a été faite le 20 septembre dernier. Les enjeux de cette réforme visent notamment à encourager la gestion des risques et des aléas. La dotation pour aléas, bien que réformée à plusieurs reprises, n'a pas connu le développement attendu en raison d'une certaine complexité. C'est pourquoi le Gouvernement propose de la remplacer par un dispositif plus souple et plus adapté à la vie économique des exploitations agricoles, en confortant leur viabilité et leur compétitivité. Les évolutions législatives qui en découlent sont présentées dans le cadre du projet de loi de finances 2019. Enfin, pour aider les entreprises à faire face aux situations de crise rencontrées, des cellules d'identification et d'accompagnement des exploitants en difficulté ont été mises en place en ce début d'année au sein de chaque département et selon une organisation rénovée. Ces cellules étudient de manière confidentielle et anonymisée les différentes situations pour orienter les exploitants vers les dispositifs les plus adaptés.

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