Question de Mme MÉLOT Colette (Seine-et-Marne - Les Indépendants) publiée le 18/10/2018

Mme Colette Mélot attire l'attention de Mme la ministre des solidarités et de la santé sur le douloureux parcours des femmes enceintes vivant dans la rue.
Deux sans domicile fixe sur cinq sont des femmes. Même s'il est difficile d'obtenir des statistiques exactes, on observe une augmentation de leur nombre depuis une dizaine d'années et parmi elles de femmes enceintes dont un grand nombre sont sans couverture maladie.
Par méconnaissance ou par crainte de voir un médecin, ces femmes mettent du temps avant de consulter lorsqu'elles consultent. Par ailleurs, nombre d'entre elles présentent un retard de suivi de grossesse et un manque de soins prénataux. Les pathologies de grossesses sont donc courantes avec trois fois plus de naissances prématurées que dans la population, deux fois plus de nouveau-nés de faible poids et deux fois plus de césariennes en urgence.
Sorties de l'hôpital, leur situation n'est guère meilleure. Appeler le 115 ne garantit pas d'avoir un toit. Faute de solution, les hôpitaux essaient parfois de prolonger leur prise en charge. Mais ce n'est pas là le rôle de l'hôpital déjà surchargé.
Il n'est pas possible aujourd'hui, en France, d'accepter de voir remettre des nourrissons sur le trottoir avec des risques sanitaires évidents. L'accès aux soins minima ne peut pas être réalisé dans de bonnes conditions quand une femme est à la rue avec son nouveau-né.
Ces situations dramatiques appellent l'ouverture de centres d'hébergement adaptés à l'accueil des femmes enceintes sans-abri leur offrant, d'une part, un suivi de grossesse et, d'autre part, l'assurance de l'hébergement post-natal et des soins au nourrisson.
Elle lui demande donc la mise à l'étude, en concertation avec les collectivités territoriales (échelons de proximité les mieux à même de les recenser), les associations, de l'ouverture de centres d'hébergement dédiés à l'accueil des femmes enceintes en grande précarité pendant et après leur grossesse.

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Réponse du Ministère des solidarités et de la santé publiée le 24/01/2019

La prise en charge des femmes sans abri enceintes et/ou isolées avec des enfants en bas-âge est une préoccupation majeure du gouvernement même si cette question relève de la compétence des départements au titre de l'aide sociale à l'enfance dès lors qu'elles ont besoin d'un soutien matériel et psychologique et sont confrontées à des difficultés risquant de mettre en danger l'enfant. Le code de l'action sociale et des familles (4° de l'article L. 222-5) prévoit que sont prises en charge par le service de l'aide sociale à l'enfance : « les femmes enceintes et les mères isolées avec leurs enfants de moins de trois ans qui ont besoin d'un soutien matériel et psychologique, notamment parce qu'elles sont sans domicile ». En effet, la prise en charge et l'accompagnement de nourrissons ainsi que le soutien à la parentalité en situation de détresse sociale sont des compétences exercées à titre principal par les conseils départementaux (grâce aux centres de protection maternelle et infantile notamment). Des partenariats sont souvent liés avec les services de l'État pour organiser au mieux cette prise en charge. L'État assume toute sa charge, au titre de l'aide sociale de l'État, des familles sollicitant un accueil dans un centre d'hébergement et de réinsertion sociale ou des familles en détresse sollicitant le 115 au titre de l'hébergement d'urgence prévu à l'article L. 345-2-2 du code de l'action sociale et des familles. La politique de l'hébergement et de l'accès au logement a bénéficié ces dernières années de dotations budgétaires en augmentation croissante pour s'établir à 1,95 Mds€ en loi de finances pour l'année 2018 soit une augmentation de plus de 200 M€ par rapport à la loi de finances initiale 2017. Ce budget finance notamment un parc d'hébergement généraliste qui a augmenté de façon très significative pour atteindre plus de 136 889 places au 31 décembre 2017 (selon l'enquête sur les capacités d'accueil, d'hébergement et d'insertion réalisée par la direction générale de la cohésion sociale), soit une augmentation de 46 % depuis fin 2013. Malgré cet accroissement du parc d'hébergement, celui-ci reste insuffisant pour couvrir tous les besoins des publics vulnérables. Dans ce contexte, les femmes seules, ou les familles monoparentales sans domicile constituent un public particulièrement vulnérable. Dans le cadre du plan quinquennal de lutte contre le sans-abrisme et pour le logement d'abord, la préférence pour le logement est clairement affirmée. Cela passe par la création de 40 000 nouvelles places de logement adapté (particulièrement l'intermédiation locative en ce qui concerne les femmes avec enfants), l'accélération de la construction et de l'accès au logement social et la prévention des expulsions, qui peut amener à la rue des femmes cheffes de famille monoparentales. Par ailleurs, dans le cadre du 5ème plan en faveur des femmes victimes de violence et couvrant la période 2017-2019, l'objectif est de pouvoir faire bénéficier de 2 000 places supplémentaires d'hébergement avec un accompagnement adapté aux femmes victimes de violence. La mesure 9 annoncée à l'occasion du comité interministériel à l'égalité entre les femmes et les hommes qui s'est tenu le 8 mars 2018 prévoit de garantir 5 000 places ou solutions d'hébergement aux femmes victimes de violence et en accompagnement adapté dans le cadre du plan « logement d'abord ». À ce jour, l'objectif fixé a été atteint voire dépassé puisque 2 238 places ont été créées pour les femmes victimes de violence. Au total, il existe au 30 juin 2018 5 176 places d'hébergement ou de logement adapté (résidences sociales, pensions de famille, intermédiation locative). Cent places d'hébergement devraient être créées d'ici 2019 pour accueillir les jeunes filles entre 18 et 25 ans. Enfin, pour répondre à la situation des femmes en situation de précarité et parce que la lutte contre la pauvreté doit s'inscrire dans une logique d'égalité des chances, et c'est tout le sens de la stratégie de prévention et de lutte contre la pauvreté des enfants et des jeunes, qui a été annoncée le 13 septembre 2018. La précarité des femmes et des enfants fait l'objet d'une attention particulière de la part du Gouvernement, qu'il s'agisse de soutien à la parentalité ou de lutte contre la grande exclusion. Dans ce cadre une enveloppe de 125 M€ dont 20 M€ dès 2019 sera dédiée notamment à adapter l'offre d'hébergement aux besoins des familles avec enfants, que ce soit en centre d'hébergement ou à l'hôtel, solution souvent utilisée à défaut pour les femmes avec famille.

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