Question de M. MAUREY Hervé (Eure - UC) publiée le 25/10/2018

M. Hervé Maurey attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, sur les mesures mises en œuvre au niveau territorial afin de lutter contre la prolifération des frelons asiatiques.
Si aucun bilan n'a été encore dressé, il semble que le frelon asiatique s'est particulièrement développé sur le territoire français cette année. À titre d'exemple, dans l'Eure, certains professionnels du secteur estiment que le nombre d'interventions pour la destruction de nids a été multiplié par trois ou quatre par rapport à l'année dernière.
Dans de nombreux départements, les pompiers n'intervenant plus que dans les situations où ils sont tenus de le faire – c'est-à-dire en cas de réelle urgence dans les lieux publics et de carence avérée de professionnels dans le domaine privé – il est nécessaire de faire appel à des entreprises spécialisées pour des coûts d'intervention allant jusqu'à 200 euros. Le niveau de ces tarifs conduit certains particuliers à renoncer à faire détruire un nid.
Face à cette situation, les maires se trouvent très souvent désemparés. En cas de danger avéré pour la sécurité publique, ils sont contraints de faire procéder à la destruction d'un nid, même s'il est situé sur un terrain privé, au titre de leurs pouvoirs de police, et à leurs frais, ce qui représente une charge importante pour une petite commune.
Depuis 2017, la réglementation prévoit que « le préfet de département […] est l'autorité administrative compétente pour procéder ou faire procéder, en vertu de l'article L. 411-8, à la capture, au prélèvement, à la garde ou à la destruction de spécimens d'une espèce figurant sur l'une des listes établies en application des articles L. 411-5 et L. 411-6 » (décret n° 2017-595 du 21 avril 2017 relatif au contrôle et à la gestion de l'introduction et de la propagation de certaines espèces animales et végétales).
Le frelon asiatique est cité par l'arrêté du 14 février 2018 relatif à la prévention de l'introduction et de la propagation des espèces animales exotiques envahissantes sur le territoire métropolitain pris en application des articles L. 411-5 et L. 411-6. Il appartient donc désormais au préfet de procéder ou de faire procéder à la destruction des nids.
Il apparaît que cette obligation se traduit dans un certain nombre de départements par la mise en place d'un « guichet unique » pour recevoir et orienter les signalements de nids et la réalisation d'un état des lieux du marché des entreprises spécialisées actives dans le territoire.
La traduction au niveau territorial de ce décret parait bien insuffisante au regard de l'envergure du phénomène. En particulier, aucune mesure de prise en charge financière de la destruction des nids n'est prévue.
Aussi, il lui demande quelles mesures il compte mettre en œuvre afin de remédier à cette situation.

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Réponse du Ministère de la transition écologique et solidaire publiée le 13/12/2018

Les espèces exotiques proliférantes ayant un impact sanitaire au sens large (« santé » de l'environnement, santé des cultures et des élevages, santé humaine) sont susceptibles d'être réglementées par les ministères chargés de ces problématiques respectives (ministère de la transition écologique et solidaire, ministère de l'agriculture et de l'alimentation, ministère des solidarités et de la santé). Dans le cas du frelon asiatique (Vespa velutina nigrithorax), apparu accidentellement en Aquitaine en 2004 et ayant connu une expansion rapide, deux réglementations concourent à la lutte contre cette espèce. Au niveau européen, le frelon asiatique figure dans la liste des espèces exotiques envahissantes (EEE) préoccupantes pour l'Union européenne qui a été adoptée au niveau communautaire le 13 juillet 2016 (règlement d'exécution (UE) 2016/1141), conformément aux dispositions du règlement (UE) nº 1143/2014 du 22 octobre 2014 du Parlement européen et du Conseil du 22 octobre 2014 relatif à la prévention et à la gestion de l'introduction et de la propagation des espèces exotiques envahissantes. Au niveau national, la loi du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages a complété le code de l'environnement pour intégrer les dispositions législatives permettant d'agir contre les EEE (articles L. 411-5 et suivants du code de l'environnement). L'article L. 411-6 du code de l'environnement indique qu'au regard d'intérêts de préservation du patrimoine biologique, des milieux naturels et des usages associés, sont interdits l'introduction sur le territoire national, la détention, le transport, le colportage, l'utilisation, l'échange, la mise en vente, la vente ou l'achat de tout spécimen vivant d'EEE, dont la liste est fixée par l'arrêté ministériel du 14 février 2018 co-signé par le ministère de l'agriculture et de l'alimentation et le ministère de la transition écologique et solidaire. Cette liste comprend le frelon asiatique. Les opérations de lutte sont définies par l'article L. 411-8 du code de l'environnement : dès constat de la présence dans le milieu d'une espèce figurant dans les arrêtés ministériels EEE, l'autorité administrative, c'est-à-dire le préfet de département désigné par le décret nº 2017-595, peut « procéder ou faire procéder (…) à la capture, au prélèvement, à la garde ou à la destruction de spécimens » d'EEE. Cette rédaction ne mentionne en aucun cas une prise en charge financière par l'État des opérations de lutte, mais concerne leurs conditions de réalisation, établies par arrêté préfectoral. Les préfets pourront notamment ordonner la destruction de nids sur des propriétés privées. Le financement des opérations de lutte (exigeant des moyens humains et techniques) contre le frelon nécessitent des crédits locaux qui peuvent être complétés avec des crédits européens. Dans le cadre de la réglementation sur les dangers sanitaires, mise en œuvre par le ministère de l'agriculture et de l'alimentation, le frelon asiatique est classé au niveau national dans la liste des dangers sanitaires de deuxième catégorie pour l'abeille domestique Apis mellifera sur tout le territoire français (arrêté du 26 décembre 2012). Cela implique que l'élaboration et le déploiement d'une stratégie nationale de prévention, de surveillance et de lutte est de la responsabilité de la filière apicole, l'État pouvant apporter son appui sur le plan réglementaire (article L. 201-1 du code rural et de la pêche maritime - CRPM) notamment en imposant des actions de lutte aux apiculteurs (article L. 201-4 du CRPM) pour favoriser la réussite de la stratégie. Au regard des dispositions de l'article L. 201-8 du CRPM, ces opérations, réalisées par les organismes à vocation sanitaire, sont à la charge des apiculteurs. Une note de service du 10 mai 2013, relative aux mesures de surveillance, de prévention et de lutte permettant de limiter l'impact du frelon asiatique sur les colonies d'abeilles domestiques sur le territoire national, a défini le rôle des différents partenaires et des services de l'État. Le constat qu'il n'y a actuellement aucune stratégie collective contre ce frelon qui soit reconnue efficace a été partagé avec les membres du comité d'experts apicole du conseil national d'orientation de la politique sanitaire animale et végétale. Ainsi, le ministère de l'agriculture et de l'alimentation subventionne des actions de recherche visant à valider des méthodes de lutte sur le plan de leur efficacité et de leur innocuité sur l'environnement. Une fois que des méthodes auront été validées, une stratégie nationale pourra être mise en place et s'appuyer, si nécessaire, sur une base réglementaire en application de l'article L. 201-4 du CRPM. Dans l'attente, aucune mesure obligatoire ne peut être imposée. Concernant enfin la santé humaine, le frelon asiatique ne présente pas un danger supérieur par rapport à d'autres hyménoptères (frelon européen, guêpes, etc.), de par son comportement ou la puissance de son venin. De fait, l'espèce n'est pas réglementée au titre des espèces nuisibles pour la santé humaine par le ministère de la santé et des solidarités.

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