Question de M. RAYNAL Claude (Haute-Garonne - SOCR) publiée le 31/01/2019

M. Claude Raynal attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse sur les conséquences de la mise en place du protocole « parcours professionnels, carrières et rémunérations » pour les anciens instituteurs.
En effet, les anciens instituteurs dans la cadre de ce protocole ne sont plus éligibles aux rendez-vous de carrière qui permettent d'accéder à la hors classe de professeur des écoles. Voilà que quinze ou vingt ans d'une vie professionnelle au service de l'État sont rayés pour calculer les possibilités d'avancement.
La méritocratie républicaine, dont ils sont les premiers gardiens, ne trouverait pas à s'appliquer pour eux. L'idéal de la fonction publique, basé sur la promotion interne, le plus souvent par concours, se trouve mis à mal par des règles comptables.
Cette inégalité de traitement s'accompagne de conséquences à long terme, notamment sur le montant des retraites. Voilà que des fonctionnaires catégorie A qui ont, par vocation, consacré leurs vies à l'intérêt général, se retrouvent avec des retraites de facto limitées.
Au-delà de l'aspect purement financier, se trouve aussi un problème humain. Car ces professeurs des écoles, qui ont gravi tous les échelons, ressentent cette situation comme témoignant d'un profond mépris, et d'une séparation entre les « vrais professeurs des écoles » et ceux arrivés plus tardivement.

Il souhaite connaître les solutions envisagées pour remédier à cette situation.

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Réponse du Ministère de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales – Collectivités territoriales publiée le 03/07/2019

Réponse apportée en séance publique le 02/07/2019

Mme Marie-Pierre Monier. Cette question a été préparée en collaboration avec mon collègue Claude Raynal. Nous avons été alertés, depuis des mois, sur les conséquences de la mise en place du protocole Parcours professionnels, carrières et rémunérations, pour les anciens instituteurs devenus professeurs des écoles. En effet, dans le cadre de ce protocole, les anciens instituteurs ne sont plus éligibles, dans les faits, aux rendez-vous de carrière qui permettent d'accéder à la hors classe de professeur des écoles. Voilà donc quinze ou vingt ans d'une vie professionnelle au service de l'État rayés du calcul des possibilités d'avancement !

Cette situation perdure. Dans le bulletin officiel paru le 21 mars 2019 relatif au passage à la hors classe des professeurs des écoles, il apparaît que, concernant l'avis émis par les inspecteurs, l'ancienneté générale de service n'est toujours pas un critère. Ainsi, la méritocratie républicaine, dont ils sont les premiers gardiens, ne s'applique pas à eux ! L'idéal de la fonction publique basé sur la promotion interne, le plus souvent par concours, se trouve mis à mal par des règles comptables.

En outre, il semblerait que la prise en compte des années en tant qu'instituteur dans la détermination de l'avis permettant le passage à la hors classe diffère en pratique selon les académies. La rupture d'égalité en fonction du parcours se trouve dès lors renforcée par des inégalités territoriales.

Ces inégalités de traitement s'accompagnent de conséquences à long terme, notamment sur les retraites. Voilà des fonctionnaires qui ont, par vocation, consacré leur vie à l'intérêt général avec des retraites inférieures à celles de leurs collègues.

Au-delà de l'aspect purement financier, se trouve aussi, et peut-être avant tout, un problème humain, car ces professeurs des écoles qui ont gravi tous les échelons ressentent cette situation comme témoignant d'un profond mépris et d'une séparation entre les « vrais » professeurs des écoles et ceux arrivés plus tardivement – et avec plus d'expérience – à cette fonction.

Je souhaiterais connaître les solutions envisagées par l'administration pour remédier à cette situation.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Sébastien Lecornu, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé des collectivités territoriales. Madame la sénatrice, il se trouve que vous posez cette question au nom de Claude Raynal et que je vous réponds au nom de Jean-Michel Blanquer ; l'exercice est ainsi complet. (Sourires.)

La création du corps des professeurs des écoles s'est accompagnée de l'intégration progressive des instituteurs. Ces derniers, agents de catégorie B recrutés au niveau du baccalauréat, ont donc rejoint, par la voie du concours interne ou d'une liste d'aptitude, un corps de catégorie A.

Les services des instituteurs sont repris à l'occasion de leur intégration, en tenant compte du changement de catégorie induit. Une année de service effectuée dans le corps des instituteurs n'est donc pas reprise à hauteur d'une année entière.

Toutefois, ces règles ne conduisent pas à pénaliser les anciens instituteurs. En effet, ils sont éligibles à la hors classe, et les instituteurs qui intégreront à l'avenir le corps des professeurs des écoles pourront être promus dès leur intégration.

Depuis l'intervention du protocole Parcours professionnels, carrières et rémunérations, connu sous l'acronyme PPCR, au 1er septembre 2017, les conditions d'accès à la hors classe des différents corps des personnels enseignants, d'éducation et psychologues ont été modifiées. Désormais, le vivier des agents « promouvables » a été resserré, mais, en parallèle, le taux de promotion a été considérablement augmenté, passant de 5,5 % pour 2017 à 13,2 % pour 2018, afin de maintenir le nombre de promotions. Ce taux sera porté à 15,1 % en 2019 pour atteindre, à terme, la convergence avec les enseignants du second degré.

L'ensemble des anciens instituteurs pouvant être promus hors classe dès la mise en œuvre du PPCR en 2017, ils bénéficient directement de ces nouvelles modalités de promotion.

S'agissant de leur évaluation professionnelle, les ex-instituteurs « promouvables » à la hors classe qui n'avaient pu bénéficier d'un rendez-vous de carrière ont reçu, lors de la campagne 2018, une appréciation sur leur valeur professionnelle fondée sur l'avis des inspecteurs. Ils ont donc été intégrés à l'exercice de promotion à la hors classe, qui repose sur l'examen de deux critères : l'appréciation professionnelle et l'ancienneté.

Enfin, les instituteurs devenus professeurs des écoles peuvent également accéder au troisième grade créé par le PPCR, dénommé « classe exceptionnelle ». Les conditions de passage sont favorables aux professeurs des écoles ex-instituteurs : lors de la campagne de promotion 2018, ils constituaient, en effet, moins d'un tiers du vivier des « promouvables », mais représentaient plus de la moitié des promus.

Ainsi, les instituteurs qui ont intégré le corps des professeurs des écoles ont un déroulement de carrière qui leur permet de partir à la retraite dans des conditions plus favorables que celles qui auraient été les leurs dans le corps des instituteurs.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre Monier, pour la réplique.

Mme Marie-Pierre Monier. Monsieur le ministre, j'entends vos arguments, mais j'ai reçu des instituteurs dans mon département, et je peux vous dire que, sur le terrain, les choses ne se passent pas comme vous les présentez. Vous avez parlé de l'appréciation des inspecteurs ; il y aurait beaucoup à dire à ce sujet, et le processus manque de lisibilité.

Aujourd'hui, il n'y a pas d'équité dans le processus de promotion au grade « hors classe ». Or notre République promeut l'égalité de traitement entre tous les individus. Elle se doit donc de la réaliser pour son personnel. Il faudrait vraiment que le ministère de l'éducation nationale se penche concrètement sur ce qui se passe sur le terrain.

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