Question de Mme PROCACCIA Catherine (Val-de-Marne - Les Républicains) publiée le 28/02/2019

Mme Catherine Procaccia attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur un arrêté du 16 novembre 2018 modifiant la liste des pièces d'identité qui peuvent être présentées pour voter.
Non seulement, dorénavant, les passeports et cartes d'identité acceptés comme justificatifs devront être périmés depuis moins de cinq ans alors qu'auparavant aucune durée n'existait, mais en plus, seuls les nouveaux permis de conduire au format « Union européenne » seront autorisés, alors que la plupart des Français utilisent toujours le permis rose à trois volets, valable jusqu'en 2032. Enfin, même si la carte de famille nombreuse, le livret de circulation et la carte du combattant sans photo ne concernent qu'une minorité de citoyens, ils ont aussi disparu de la liste des pièces acceptées.
Elle s'étonne de cette modification à quelques mois des élections européennes et aimerait savoir ce qui justifie cette décision.
Elle souhaite connaître ce qui compte être fait pour informer rapidement les citoyens, les élus et les bénévoles qui tiennent les bureaux de vote tout en sachant que le délai de renouvellement de la carte d'identité ou du permis peut durer plusieurs semaines.
En outre, elle demande si des dispositions spécifiques pour les personnes âgées vont être décidées puisqu'un grand nombre d'entre elles ne voient pas l'utilité de renouveler leurs documents d'identité dans la mesure où elles ne disposent pas ou ne manipulent pas internet pour effectuer des démarches, sans compter les photos d'identité sécurisées bien compliquées à réaliser dans les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD).
Elle voudrait être informée d'un éventuel refus d'accès à ces personnes à l'isoloir ou aux procurations en mai 2019.

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Réponse du Secrétariat d'État auprès du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse publiée le 20/03/2019

Réponse apportée en séance publique le 19/03/2019

Mme Catherine Procaccia. Monsieur le secrétaire d'État, ma question porte sur l'arrêté du 16 novembre dernier modifiant la liste des pièces d'identité qui peuvent être présentées pour voter.

Dorénavant, non seulement les passeports et cartes d'identité devront être périmés depuis moins de cinq ans, mais en outre seuls les nouveaux permis de conduire, au format « Union européenne », seront acceptés, alors que la plupart des Français n'utilisent que le permis rose à trois volets, pour le remplacement duquel, d'ailleurs, on leur permet d'attendre 2032.

Que comptez-vous faire pour informer rapidement les citoyens, les élus et les bénévoles, très nombreux, qui tiennent les 70 000 bureaux de vote ?

Surtout, allez-vous prendre des dispositions spécifiques pour les personnes âgées ? Un grand nombre d'entre elles ne voient pas l'utilité de remplacer leur carte d'identité et manipulent très mal internet, où se prennent les rendez-vous. Sans parler de celles qui vivent en Ehpad, pour lesquelles il est quasiment impossible, en tout cas financièrement, de faire réaliser une photographie sécurisée.

Enfin, s'agissant des cartes nationales d'identité, le délai de cinq ans court-il à compter de la date d'expiration portée sur la carte ou de la fin de la période de validité, désormais allongée de cinq ans ?

Je m'étonne de cette décision prise à quelques mois des élections européennes et de manière unilatérale : monsieur le secrétaire d'État, par quels motifs est-elle justifiée ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Gabriel Attal, secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse. Madame la sénatrice Catherine Procaccia, vous soulevez une question effectivement très importante ; élu local moi aussi – je l'ai été avant d'être déput頖, ancien assesseur dans des bureaux de vote, je mesure l'importance de l'enjeu, s'agissant notamment des personnes âgées, ainsi que la nécessité de règles claires et d'une bonne communication, notamment en direction des élus locaux.

La mise en place du répertoire électoral unique nécessitait une révision de l'arrêté du 12 décembre 2013 précisant les pièces permettant de justifier de son identité au moment du vote, ainsi que celles qui sont admises pour l'inscription sur les listes électorales.

S'agissant de la pièce justificative de l'identité de l'électeur, il a été jugé essentiel que le titre traditionnellement autorisé comporte une photographie, afin de permettre un contrôle effectif par le président du bureau de vote.

Le même objectif de lutte contre la fraude a conduit à fixer à cinq ans la limite de péremption des cartes nationales d'identité et des passeports, suivant la règle qui prévaut généralement pour les réglementations édictées par le ministère de l'intérieur.

Pourront donc voter les électeurs munis d'une carte d'identité délivrée, au plus, vingt ans avant le scrutin, ou d'un passeport délivré, au plus, quinze ans plus tôt. Il sera toutefois demandé aux maires d'appliquer cette règle avec discernement, notamment lorsque les traits de la personne figurant sur le document d'identité sont aisément reconnaissables.

En ce qui concerne le permis de conduire, l'arrêté se borne à reprendre la terminologie européenne prévue par le décret du 9 novembre 2011 transposant la directive européenne du 20 décembre 2006 relative au permis de conduire. Au moment du vote, l'électeur pourra continuer de présenter un permis de conduire en carton rose jusqu'en 2033 – ce qui laisse un peu de marge…

Ces précisions figureront expressément dans la circulaire qui sera prochainement diffusée aux maires en vue de l'organisation des élections européennes.

Ainsi, ces nouvelles dispositions ne remettent pas en cause l'équilibre visant à offrir à l'électeur un nombre important de moyens de justifier de son identité, dans le but de favoriser sa participation, tout en garantissant un juste contrôle de cette identité, afin de limiter les risques de fraude en matière électorale.

De plus, le décret paru le 16 novembre dernier, en même temps que le corpus réglementaire nécessaire à la mise en œuvre du répertoire électoral unique, laisse à tous les acteurs du processus électoral un temps d'adaptation raisonnable.

Madame la sénatrice, j'espère vous avoir apporté les précisions que vous souhaitiez de la manière la plus claire possible.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour répondre à M. le secrétaire d'État.

Mme Catherine Procaccia. Monsieur le secrétaire d'État, vous parlez d'une nouvelle circulaire : pourquoi ne pas abroger l'ancienne ?

Par ailleurs, vous dites : nous aurons le temps. Mais savez-vous combien de temps il faut pour obtenir une pièce d'identité ? En région parisienne, parfois un mois, voire un mois et demi !

Pour ce qui est des personnes âgées, vous ne m'avez pas répondu, si bien que je m'interroge : ces dispositions prises sans que l'on sache pourquoi ne sont-elles pas destinées à « éliminer » un certain nombre de personnes âgées, très mécontentes des décisions du Gouvernement, notamment au sujet de la CSG ? (M. le secrétaire d'État s'exclame.)

En matière d'information, des villes, comme Saint-Maur-des-Fossés, diffusent déjà des renseignements pratiques.

Vous parlez de vingt ans, mais, dans la circulaire, il est question de cinq ans : la confusion est totale… Quant à laisser le président du bureau de vote décider si la photographie représente bien l'électeur ou non, c'est discriminatoire : ce sera le droit de vote à la tête du client !

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