Question de M. BABARY Serge (Indre-et-Loire - Les Républicains) publiée le 07/03/2019

M. Serge Babary attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, sur les demandes de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle déposées par de nombreuses communes d'Indre-et-Loire à la suite des périodes de sécheresse de ces dernières années.

Le département d'Indre-et-Loire est fortement touché par les risques liés au phénomène de retrait-gonflement des argiles. Des milliers de propriétaires du département ont constaté, sur leur lieu d'habitation, la déshydratation des sols qui entraîne l'affaissement et la déstructuration progressive des murs qui se fissurent gravement. Certaines habitations sont aujourd'hui inhabitables.

Or, depuis 2011, aucune commune d'Indre-et-Loire n'a été reconnue en état de catastrophe naturelle. Quelques-unes l'ont bien été en 2017 en raison de la sécheresse, mais cela ne représentait qu'un infime pourcentage des communes alors demanderesses.

Les refus répétés de l'État de reconnaître cet état de catastrophe naturelle ont conduit trente-deux communes du département à se regrouper au sein d'une association, l'association des communes en zone argileuse, afin de coordonner des recours contentieux communs contre les arrêtés refusant la reconnaissance « catastrophe naturelle » pour les années 2015, 2016, 2017. Une association de particuliers s'est également constituée. Elle regroupe aujourd'hui plus de 305 particuliers victimes sur le territoire de cinquante-trois communes du département.

Le régime de catastrophe naturelle est fixé aux articles L. 125-1 et suivants du code des assurances, et n'a pas encore donné lieu, à ce jour, à l'adoption de dispositions réglementaires. La méthode scientifique de mise en œuvre et d'évaluation des deux critères révélant l'intensité anormale de l'agent naturel à l'origine des dégâts, qui n'ont aucune existence légale ou réglementaire, reste inconnue.

Au fil des sécheresses, il apparaît que le système mis en place pour reconnaitre l'état de catastrophe naturelle et permettre aux personnes sinistrées d'être indemnisées manque de transparence et de pertinence. Le nombre de sinistrés non indemnisés en témoigne.

Il y a un an, en mars 2018, la ministre chargée des collectivités territoriales indiquait que des réflexions étaient en cours pour définir réglementairement les modalités d'instruction des dossiers de reconnaissance en catastrophe naturelle.

Aussi, il lui demande où en sont les réflexions menées par le Gouvernement pour définir un cadre réglementaire précis et pertinent permettant aux sinistrés d'être enfin indemnisés. Il invite également le Gouvernement à examiner chacune des demandes des communes d'Indre-et-Loire et à leur accorder le bénéfice de catastrophe naturelle au titre de 2018.

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Transmise au Ministère de l'intérieur


Réponse du Secrétariat d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire publiée le 10/04/2019

Réponse apportée en séance publique le 09/04/2019

M. Serge Babary. Madame la secrétaire d'État, je souhaiterais attirer votre attention sur le refus de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle dont ont fait l'objet, ces dernières années, les communes du département d'Indre-et-Loire, fortement touché par les risques liés au phénomène de retrait-gonflement des argiles.

Chaque année, des milliers de propriétaires constatent l'affaissement et la déstructuration progressive des murs qui se fissurent gravement, rendant impossible l'occupation de certaines habitations.

Or, depuis 2011, aucune commune d'Indre-et-Loire n'a été reconnue en état de catastrophe naturelle, sauf un infime pourcentage en 2017. Les refus répétés de l'État ont conduit 35 communes de mon département à se regrouper au sein d'une association, l'association des communes en zone argileuse.

En outre, une association de particuliers regroupe aujourd'hui plus de 305 personnes qui ont été victimes de ce phénomène sur le territoire de 53 communes du département.

Pour décider de la reconnaissance d'une commune en état de catastrophe naturelle, la commission interministérielle se prononce non sur l'importance des dégâts eux-mêmes, mais sur l'intensité normale de l'agent naturel à l'origine des dégâts.

Elle analyse l'intensité des mouvements de terrain différentiels au regard de deux critères : un critère géotechnique, la nature du sol d'assises des constructions doit être sensible au phénomène de retrait-gonflement ; et un critère climatologique, les niveaux d'humidité des sols superficiels doivent faire état d'une sécheresse des sols particulièrement marquée.

La méthode scientifique de mise en œuvre et d'évaluation de ces deux critères, qui n'a aucune existence légale, reste inconnue.

En mars 2018, Mme la ministre Gourault a indiqué à notre collègue Nicole Bonnefoy que le caractère normal ou non de l'intensité de l'épisode de sécheresse était apprécié au regard des épisodes de sécheresse ayant précédemment touché le même département.

Aussi, alors que le caractère argileux d'un territoire est parfaitement connu et reconnu, la multiplication d'épisodes de sécheresse a nécessairement pour conséquence de normaliser le phénomène. Cette situation est injuste.

Mme Gourault a précisé que des réflexions étaient en cours pour définir réglementairement les modalités d'instruction des dossiers de reconnaissance en catastrophe naturelle.

En l'absence d'avancée, le Sénat a, il y a quelques semaines, constitué une mission d'information pour identifier les difficultés liées à l'indemnisation des sinistres résultant des aléas naturels de forte intensité et proposer des solutions.

Aussi, je souhaiterais savoir où en sont les réflexions pour définir un cadre réglementaire précis et pertinent permettant aux sinistrés d'être indemnisés. J'invite également le Gouvernement à examiner chacune des demandes des communes d'Indre-et-Loire et à leur accorder le bénéfice de l'état de catastrophe naturelle au titre de 2018.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire. Monsieur le sénateur Babary, un épisode de sécheresse des sols a touché le territoire métropolitain au cours du second semestre 2018, notamment dans le nord-est du pays.

Au 1er avril 2019, plus de 3 500 demandes communales de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle au titre de la sécheresse 2018 ont été déposées. La préfecture d'Indre-et-Loire a reçu 88 demandes.

Pour décider de la reconnaissance d'une commune en état de catastrophe naturelle, l'autorité administrative se prononce, comme vous l'avez signalé, non sur l'ampleur des dégâts, mais sur l'intensité anormale de l'agent naturel à l'origine des dégâts. Ensuite, compte tenu de la cinétique lente qui caractérise l'aléa sécheresse et des connaissances scientifiques disponibles à ce jour, deux critères cumulatifs sont mis en œuvre pour caractériser son intensité : premièrement, une condition géotechnique, un sol d'assise des constructions constitué d'argile sensible aux phénomènes de retrait et/ou de gonflement ; deuxièmement, une condition de nature météorologique, une sécheresse du sol d'intensité anormale.

Ce modèle permet à l'autorité administrative d'instruire l'ensemble des demandes sur le fondement de données techniques présentant les mêmes qualités et, ainsi, de s'assurer d'une égalité de traitement des dossiers.

L'instruction effective des dossiers déposés au titre de l'année 2018 interviendra au cours du printemps 2019, Météo-France et les services de l'État concernés ayant été sensibilisés à la nécessité de traiter ces demandes dans des délais rapides.

S'agissant de la simplification de la procédure, elle aboutira dans les prochaines semaines. Les nouveaux critères seront d'ailleurs utilisés dès cette année pour analyser les demandes au titre de l'épisode de sécheresse des sols de l'année 2018.

Ces travaux visent deux objectifs : d'abord, prendre en compte l'amélioration des connaissances scientifiques relatives au phénomène, notamment les modalités techniques de traitement des données météorologiques permettant d'établir le niveau d'humidité des sols superficiels par Météo-France ; ensuite, rendre plus lisibles pour les responsables communaux et les sinistrés les critères mis en œuvre et, à cet égard, un effort de simplification de leur présentation sera réalisé.

Par cette réforme, nous améliorons la qualité des critères tout en rendant plus simple et compréhensible leur mise en œuvre.

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