Question de M. BOURQUIN Martial (Doubs - SOCR) publiée le 09/05/2019

M. Martial Bourquin attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur la problématique de la fabrication détachée.

En effet, les marchés publics les plus importants sont traités en entreprise générale. Souvent, les entreprises générales répondent aux appels d'offres sans préciser les noms des entreprises sous-traitantes.

Une fois les marchés obtenus auprès des acteurs publics, les entreprises sous-traitent à des entreprises étrangères européennes à bas coûts sociaux (souvent en Espagne, au Portugal ou en Pologne). C'est ce qui arrive par exemple pour le lot de la construction métallique.

Or, l'acheteur public n'a pas connaissance des noms des sous-traitants, et donc d'une sous-traitance à l'étranger et il utilise pour cela les deniers publics. Aussi et surtout, la sous-traitance entraîne une perte de recettes fiscales pour la France puisque cela signifie absence de cotisation sociale et de taxe locale. Cette privation de recettes fiscales correspondrait à un montant de 10 % de la valeur du marché sous-traité.

Cette pratique fragilise le secteur de la construction métallique en mettant à mal son savoir-faire mais aussi en alimentant le chômage dans cette filière.

Aussi lui demande-t-il de légiférer en faveur de la production sur notre territoire et des emplois français.

À l'exemple du Luxembourg, il s'agirait d'imposer aux entreprises générales d'indiquer dans leur offre les noms des entreprises sous-traitantes avec lesquelles elles se sont associées afin de répondre aux appels d'offres, avec l'obligation de conserver ces mêmes entreprises après avoir remporté le marché. Cela permettrait ainsi aux acheteurs publics de décider en connaissance de cause.

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Réponse du Secrétariat d'État auprès du ministre de l'économie et des finances publiée le 03/07/2019

Réponse apportée en séance publique le 02/07/2019

M. Martial Bourquin. Madame la secrétaire d'État, je voudrais attirer votre attention sur la problématique de la fabrication détachée. En effet, les marchés publics les plus importants sont traités en entreprises générales, qui répondent souvent répondent aux appels d'offres sans préciser les noms des entreprises sous-traitantes.

Une fois les marchés obtenus auprès des acteurs publics, les entreprises sous-traitent à des entreprises étrangères européennes à bas coûts sociaux – fréquemment situées en Espagne, au Portugal ou en Pologne –, ce qui explique, par exemple, les difficultés actuelles de la construction métallique.

Or l'acheteur public n'a pas connaissance des noms des sous-traitants et, donc, d'une éventuelle sous-traitance à l'étranger, alors même que de l'argent public est dépensé.

En outre, point majeur, une telle sous-traitance entraîne une perte de recettes fiscales pour la France, puisque ni cotisations sociales ni taxes locales ne seront perçues. Cette privation de recettes fiscales s'élèverait à environ 10 % de la valeur du marché sous-traité.

Cette pratique fragilise, entre autres, le secteur de la construction métallique en mettant à mal son savoir-faire, mais aussi en alimentant le chômage dans cette filière.

Aussi, madame la secrétaire d'État, je demande au Gouvernement de légiférer en faveur de la production sur notre territoire et des emplois français.

À l'exemple du Luxembourg, nous pourrions imposer aux entreprises générales d'indiquer, dans leurs offres, les noms des entreprises sous-traitantes avec lesquelles elles se sont associées afin de répondre aux appels d'offres. Elles auraient, bien sûr, l'obligation de conserver comme partenaires ces mêmes entreprises après avoir remporté le marché. Cela permettrait aux acheteurs publics de décider en toute connaissance de cause.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances. Monsieur le sénateur Bourquin, vous m'interrogez sur les conditions de recours à la sous-traitance dans les marchés publics. Aussi, je tenais à préciser plusieurs points.

Les dispositions existantes permettent déjà aux acheteurs de connaître les sous-traitants d'un marché. La loi relative à la sous-traitance, récemment codifiée dans le code de la commande publique, impose en effet aux titulaires de marchés publics de faire accepter par l'acheteur chacun de leurs sous-traitants. Elle leur impose également de faire agréer par l'acheteur les conditions de paiement de chaque contrat de sous-traitance.

Ainsi, lorsqu'une entreprise envisage d'avoir recours à des sous-traitants pour l'exécution d'un marché, elle doit déclarer, soit au moment du dépôt de son offre, soit en cours d'exécution du contrat, la nature des prestations sous-traitées, le nom et l'adresse du sous-traitant, le montant maximal des sommes à lui verser et les conditions de paiement prévues dans le sous-traité. En cas de sous-traitance occulte, l'acheteur a au demeurant l'obligation de mettre en demeure son cocontractant de régulariser la situation de son sous-traitant.

Les dispositions existantes permettent également aux acheteurs de lutter d'ores et déjà contre la sous-traitance pratiquée à des prix anormalement bas. C'est très important pour répondre à votre attente, monsieur le sénateur. Lorsque le montant des prestations sous-traitées est anormalement bas, l'acheteur peut ainsi exiger que le sous-traitant justifie son prix ou les coûts proposés dans le sous-traité. À défaut de justification suffisante, ou s'il est établi que la sous-traitance est anormalement basse parce qu'elle contrevient à la réglementation applicable en matière environnementale et sociale, ou encore au droit du travail, l'acheteur est tenu de refuser le sous-traitant concerné.

Ainsi, le droit de la commande publique en vigueur permet déjà aux acheteurs publics de s'assurer que le recours à la sous-traitance dans les marchés publics n'est pas susceptible de créer des situations de concurrence déloyale, notamment à l'égard des PME françaises, ou de compromettre la bonne exécution du marché.

J'estime qu'il faut à présent que de telles dispositions soient mise en œuvre dans leur plénitude afin de répondre pleinement aux situations que vous signalez, qui sont effectivement anormales.

Quant à l'idée d'imposer au titulaire d'un marché public de conserver les entreprises sous-traitantes présentées dans son offre initiale, si elle paraît intéressante, sa mise en pratique se heurterait à la réalité de l'exécution. On rencontre des changements dans la vie des entreprises. L'exécution d'un contrat peut se heurter à de nombreux aléas, qui imposent que les relations d'affaires entre entreprises bénéficient d'une certaine souplesse. Il serait embêtant de devoir repasser un marché public parce que l'un des sous-traitants initialement proposés ferait défaillance.

Je peux en tout cas vous assurer, monsieur le sénateur, que le Gouvernement est très attentif à la question de la sous-traitance. Ce sujet sera examiné lors des prochains travaux menés par l'Observatoire économique de la commande publique. J'assisterai d'ailleurs personnellement à ces travaux le 4 juillet prochain.

M. le président. Madame la secrétaire d'État, je vous prie de vous montrer, dans vos prochaines réponses, plus attentive au respect de votre temps de parole.

La parole est à M. Martial Bourquin, pour la réplique.

M. Martial Bourquin. Ce problème est reconnu par l'ensemble des entreprises et des filières professionnelles. Les mesures adoptées par le Luxembourg sont conformes au droit européen : on fait figurer dans les marchés publics leur titulaire, mais aussi ses sous-traitants.

J'ai assisté à un très grand chantier public, à l'hôpital de Belfort-Montbéliard, où deux grandes entreprises générales françaises ont délégué leurs tâches à des dizaines d'entreprises européennes ; à côté de cela, nos PME restaient sans travail ! Il faut prendre ce problème à bras-le-corps et le régler : ce qu'a fait le Luxembourg, je pense que nous pouvons le faire !

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