Question de M. DÉTRAIGNE Yves (Marne - UC) publiée le 02/05/2019

M. Yves Détraigne appelle l'attention de M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur les actions menées par les États-Unis, au Conseil de sécurité de l'Organisation des Nations Unies (ONU), qui ont, tout en agitant la menace d'un veto, vidé de sa substance un projet de résolution allemand censé intensifier la protection des femmes victimes de violences sexuelles lors des conflits.
Cette référence à la santé sexuelle et reproductive avait pourtant été agréée dans les précédentes résolutions prises en 2009 et 2013. Cette omission est inacceptable et porte atteinte à la dignité des femmes, comme l'a souligné l'ambassadeur français à l'ONU.
Alors que la lutte contre les violences sexuelles a été portée à la connaissance du grand public par le prix Nobel de la paix qui a récompensé en 2018 une jeune Yézidie, persécutée par l'organisation Etat islamique, et un médecin congolais, ce retrait du texte revient sur 25 années d'acquis en faveur des droits des femmes dans des situations de conflits armés.
Ce médecin milite d'ailleurs pour que la communauté internationale rende justice aux victimes et pour que des tribunaux nationaux ou internationaux soient dédiés au jugement des coupables de violences sexuelles dans les conflits.
En conséquence il lui demande quelle mesure le Gouvernement français entend prendre pour que l'accès à la santé sexuelle et reproductive soit explicitement reconnu aux victimes de violences sexuelles, elles qui sont souvent la cible d'atroces exactions et de mutilations barbares.

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Réponse du Ministère de l'Europe et des affaires étrangères publiée le 24/10/2019

La France a été particulièrement mobilisée lors des négociations et l'adoption de cette résolution. Elle s'est attachée, tout au long des discussions sur le texte, à maintenir la référence aux droits et à la santé sexuels et reproductifs. Lors de l'adoption de la résolution, la France s'est déclarée consternée, par la voie de son Représentant permanent, que toute référence à la santé sexuelle et reproductive ait été retirée de la résolution et a déploré que soient ainsi contestés vingt-cinq ans d'acquis en faveur des droits des femmes dans des situations de conflits armés. La position de la France est et restera de garantir que les femmes aient entièrement accès à la santé et aux droits sexuels et reproductifs. Elle s'inscrit dans la continuité de la priorité faite à l'égalité entre les femmes et les hommes, priorité que le Président de la République a érigée en grande cause du quinquennat. La mobilisation de la France se traduit par différents engagements pris au sein de l'Organisation des Nations unies (ONU). À l'Assemblée générale des Nations Unies (AGNU), la France a présenté avec les Pays-Bas en 2018 et comme elle le fait depuis 2006, une résolution sur les violences faites aux femmes. Le texte adopté en novembre 2018 contient pour la première fois au sein de l'AGNU des références reconnaissant le harcèlement, y compris sexuel, comme une forme de violence. Au cours de la précédente session de la Commission sur la condition de la femme en mars 2019, la France s'est fermement opposée à toute tentative visant à affaiblir les dispositions liées aux droits et à la santé sexuels et reproductifs et au plein accès à l'éducation complète à la sexualité des femmes et des hommes, et a obtenu le maintien du langage sur ce sujet. La France a organisé une réunion informelle (« Arria ») concernant la participation significative des femmes dans le Sahel, le 13 mars 2019. Au cours de sa présidence du Conseil de l'Europe, la France a lancé une campagne destinée à promouvoir la convention d'Istanbul visant à lutter contre les inégalités subies par les femmes victimes de violence domestique. Depuis son lancement, l'Irlande a ratifié la Convention et plusieurs États extra-européens envisagent d'adhérer à cet instrument ambitieux pour éliminer toutes les formes de violences à l'égard des femmes. La France a entendu mettre à profit sa présidence du G7 pour adopter la Déclaration de Dinard consacrée à la lutte contre les violences sexuelles. Par cette déclaration, les États du G7 se sont notamment engagés à soutenir les actions destinées à répondre aux besoins médicaux, psychologiques et sociaux des survivants de violences sexuelles, notamment en encourageant les efforts de Mme Nadia Murad et du Dr. Denis Mukwege en vue de créer un fonds volontaire dédié aux personnes survivantes et aux victimes de violences sexuelles. Une contribution pilote de 200 000€ a d'ores et déjà été versée au fonds, tandis qu'une contribution française de 6 millions d'euros a été annoncée par le Président de la République à Biarritz en août 2019. La France a entraîné avec elle d'autres pays et organisations pour soutenir ce fonds : l'Union européenne a annoncé une contribution de 1 million d'euros, le Canada devrait également contribuer à hauteur de 2 millions de dollars canadiens. La France poursuivra son engagement ferme et résolu contre les violences sexuelles en 2020 à l'occasion de l'anniversaire du 20e anniversaire de la résolution 1325 fondant l'agenda Femmes, paix et sécurité et du 25e anniversaire de la Déclaration et de la Plateforme d'action de Pékin. Cet anniversaire sera célébré en France en juillet prochain par l'organisation du Forum « génération égalité », dont l'objectif sera, en rassemblant des acteurs issus des États, de la société civile et du secteur privé au sein de coalitions d'action, de donner une nouvelle dynamique à la mise en œuvre de ces documents et notamment de renforcer la lutte contre les violences sexuelles.

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