Question de M. CAPUS Emmanuel (Maine-et-Loire - Les Indépendants) publiée le 30/05/2019

M. Emmanuel Capus attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur la demande d'inscription dans la Constitution de la langue des signes française.
En effet, la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées a officiellement reconnue la langue des signes française dans son article 75 : « La langue des signes française est reconnue comme une langue à part entière. Tout élève concerné doit pouvoir recevoir un enseignement de la langue des signes française. »
Malheureusement, malgré les avancées de cette loi, la fédération nationale des sourds de France constate que des personnes sourdes rencontrent encore des difficultés d'accès à l'éducation, à la santé, au travail, à la justice ou à la culture en langue des signes française. Aussi, elle estime que seule la reconnaissance de celle-ci dans la Constitution permettrait une égalité réelle entre sourds et entendants.
C'est pourquoi il souhaite connaître les intentions du Gouvernement sur le sujet, et savoir plus précisément s'il envisage d'inscrire la langue des signes française dans le futur projet de loi constitutionnelle.

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Réponse du Ministère de la justice publiée le 28/05/2020

La loi constitutionnelle du 25 juin 1992 a inscrit à l'article 2 de la Constitution la langue française comme langue de la République. En application de cette disposition, l'utilisation de la langue française s'impose aux personnes morales de droit public et aux personnes morales de droit privé dans l'exercice d'une mission de service public. Ce principe n'apparait pas pour autant comme un obstacle à la reconnaissance et à l'utilisation d'autres langues sur le territoire de la République. Ainsi, d'autres langues parmi lesquelles la langue des signes française, ont connu une reconnaissance à travers une consécration législative. La loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées a consacré la langue des signes française comme langue « à part entière ». Le Code de l'éducation consacre la liberté de choix des jeunes sourds entre une communication bilingue (langue des signes et langue française) et une communication en langue française (Art. – L.112-3). Par ailleurs, devant les juridictions françaises, il est prévu que toute personne sourde puisse bénéficier d'un dispositif de communication adapté à son handicap, tel que l'assistance d'un interprète en langue des signes lors des audiences (Art. – 23-1 du code de procédure civile). Bien que la langue des signes française ne soit pas inscrite dans la Constitution, des exigences constitutionnelles imposent également au législateur de faciliter l'intégration des personnes en situation d'handicap, à travers notamment le respect des droits et libertés fondamentaux. Le Conseil d'Etat a rappelé que l'exigence relative à l'utilisation d'un dispositif de communication adapté au handicap d'un justiciable lors des audiences devant les juridictions administratives est une garantie du principe relatif au caractère contradictoire de la procédure et des droits de la défense (Conseil d'Etat, 15 mars 2019, n° 414751). Le principe d'égalité impose également une égalité d'accès aux services publics ou aux emplois publics entre tous les citoyens. Le Conseil constitutionnel a reconnu, à travers les principes énoncés par le Préambule de la Constitution de 1946, l'existence d'exigences constitutionnelles imposant au législateur la mise en œuvre d'une politique de solidarité nationale en faveur des personnes handicapées, libre à lui d'en choisir les modalités concrètes qui paraissent appropriées pour atteindre ces exigences (Conseil Constitutionnel, 15 novembre 2018, n° 2018-772 DC).

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