Question de M. BÉRIT-DÉBAT Claude (Dordogne - SOCR) publiée le 13/06/2019

M. Claude Bérit-Débat attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur les problématiques de prédation des troupeaux que subissent aujourd'hui les éleveurs ovins et bovins en Dordogne.
Depuis plusieurs mois, des éleveurs du Périgord vert sont confrontés à des attaques répétées la nuit sur de jeunes veaux qu'ils retrouvent à moitié dévorés dans leurs pâtures. Ils estiment que ces attaques pourraient être l'œuvre du loup. Les services sanitaires et de l'État ne confirment pas cette thèse sans pour autant apporter de réponse précise et de solutions. Aussi, les éleveurs touchés expriment leur colère et leur incompréhension face à l'inertie de l'administration concernée et viennent de créer une association visant à les protéger de la prédation des troupeaux. Ce qui est en jeu, c'est surtout l'absence d'indemnisation suffisante face à ces attaques qu'il s'agisse du loup ou d'un autre canidé.
Dans ce contexte, chacun a bien noté les propos du ministre de l'agriculture concernant ce dossier. Cependant, la seule réponse à ce problème ne peut résider dans l'augmentation du prélèvement sur l'espèce.
Si les abattages peuvent être employés, les privilégier par rapport à l'indemnisation n'est pas la solution. Certes, cela a un coût et les agriculteurs ne travaillent pas pour être indemnisés mais face au principe de réalité, ils doivent pouvoir être épaulés financièrement.
La question est de savoir comment concilier aujourd'hui activité humaine et présence du loup sur notre territoire. Canis lupus ne connait pas les frontières administratives territoriales et les services de l'État doivent d'ores et déjà ne pas minorer la forte probabilité que le loup s'installe en Dordogne et sur l'ensemble du territoire national.
Aussi, il lui demande si le Gouvernement souhaite mettre en place un système de réponse plus adapté et réactif aux éleveurs et aux autres acteurs du monde rural, face aux prédateurs tels que le loup, mais surtout des indemnisations plus conséquentes en cas de pertes de bétails. Cette problématique doit être prise en compte pour soutenir une filière bovine et ovine de qualité telle qu'elle existe en Dordogne.

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Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 03/07/2019

Réponse apportée en séance publique le 02/07/2019

M. Claude Bérit-Débat. Je suis heureux de pouvoir interroger le ministre de l'agriculture et de l'alimentation, qui, lorsqu'il siégeait sur les mêmes travées que moi, en tant que président du groupe socialiste, a posé plusieurs fois des questions sur la problématique du loup aux différents ministres qui se sont succédé dans cet hémicycle. Il connaît donc bien la question.

Nous sommes confrontés depuis quelques mois en Dordogne à des attaques répétées d'un prédateur, dans un rayon de trente kilomètres, notamment sur les communes de Saint-Priest-les-Fougères, Mialet et Jumilhac-le-Grand. Chaque fois, c'est le même scénario : des veaux sont tués et laissés sur place, à moitié dévorés. On dénombre aujourd'hui une trentaine d'attaques.

Les éleveurs, qui se sont organisés en association de défense contre les prédateurs, sont très en colère : ils ne reçoivent pas de réponse pour leur indemnisation, car on ne peut pas catégoriquement mettre en cause le loup dans ces attaques. Ils sont surtout inquiets, car les dispositifs mis en œuvre dans d'autres régions, notamment les piedmonts pyrénéens et alpins, sont différents. Le préfet a toutefois réactivé la cellule « loup » et mis en place des référents.

Monsieur le ministre, que comptez-vous faire pour mieux prévenir ces attaques et indemniser les éleveurs qui y font face ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Didier Guillaume, ministre de l'agriculture et de l'alimentation. Monsieur le sénateur Bérit-Débat, je suis engagé depuis des années sur la question du prédateur.

Avant toute chose, je tiens à réaffirmer – vous ne l'avez pas fait, mais c'est important – que tous les élus et tous les parlementaires sont favorables à la biodiversité, indispensable dans notre pays. Ce rappel permet d'engager un débat aussi apaisé que possible.

C'est la première fois qu'un ministre de l'agriculture annonce que le loup n'est plus une espèce en voie de disparition, avec plus de 500 individus présents sur le territoire français. Ces déclarations ne me valent pas que des louanges, mais j'assume cette réalité. Nous avons donc élaboré un nouveau plan Loup : nous avons décidé de porter les prélèvements de 10 % à 17 % ; quant aux indemnités dont vous avez parlé, elles s'élèvent à près de 30 millions d'euros. Or je peux vous dire que ces 30 millions d'euros pourraient être facilement utilisés ailleurs, parce que les éleveurs ne veulent pas être indemnisés : ils préféreraient pouvoir faire leur métier et que leurs troupeaux ne soient pas attaqués.

En Dordogne, la question de la responsabilité des attaques se pose effectivement. S'agit-il de loups, d'animaux hybrides ou de chiens errants ? Le préfet coordonnateur Pascal Mailhos travaille beaucoup sur ce sujet, et je pense que des avancées interviendront dans les semaines à venir.

Sachez que le Gouvernement et moi-même sommes pleinement mobilisés pour faire en sorte que les éleveurs puissent continuer à exercer leur profession en toute tranquillité. Un éleveur ne peut pas sans cesse être à l'affût, stressé pour son troupeau.

Je suis pour la défense du bien-être animal et du bien-être des éleveurs, et nous allons poursuivre nos efforts de gestion du prédateur, mais, comme je l'ai dit à plusieurs reprises, entre l'éleveur et le prédateur, je choisirai toujours l'éleveur. C'est ce que je fais à la tête de ce ministère, et j'ai plutôt l'impression que les choses avancent.

M. le président. Je vous remercie d'avoir été présent à cette séance de questions, monsieur le ministre.

La parole est à M. Claude Bérit-Débat, pour la réplique.

M. Claude Bérit-Débat. Je suis le porte-parole de ce groupe d'éleveurs du nord de la Dordogne et de la Haute-Vienne qui sont confrontés, fait relativement nouveau, à l'entrée du loup sur leur territoire. Pour l'instant, ils ne trouvent pas d'interlocuteurs pour leur indemnisation, car le loup n'est pas formellement mis en cause, même s'il a été identifié dès 2015 dans un village de la Dordogne – il avait alors été abattu par un brave grand-père dans son poulailler. Les éleveurs sont très « remontés » sur cette question, si vous me passez l'expression, mes chers collègues.

Le problème de la prévention se pose également. En Dordogne, on ne peut pas, comme dans les Alpes ou les Pyrénées, utiliser les chiens patous.

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