Question de M. DECOOL Jean-Pierre (Nord - Les Indépendants-A) publiée le 11/07/2019

M. Jean-Pierre Decool attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur les conséquences de l'article 83 de la loi n° 2018-938 du 30 octobre 2018 pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous. Celles-ci peuvent être considérables pour un site de production situé à Gravelines, auquel de nombreux emplois directs et indirects sont associés.

L'article 83 prévoit que : « IV.- Sont interdits à compter du 1er janvier 2022 la production, le stockage et la circulation de produits phytopharmaceutiques contenant des substances actives non approuvées pour des raisons liées à la protection de la santé humaine ou animale ou de l'environnement conformément au règlement (CE) n° 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 précitée, sous réserve du respect des règles de l'organisation mondiale du commerce. »

Le Sénat avait identifié les conséquences économiques et sociales majeures de cette disposition et le fait qu'elle ne contribuerait en rien à l'objectif de réduction des produits phytopharmaceutiques attendu par la société. Aussi, lors des débats sur le projet de loi relative à la croissance et la transformation des entreprises (PACTE), le Sénat avait dans sa grande sagesse porté un amendement de suppression de cette disposition.

Le conseil des sages a cependant estimé, dans sa décision du 16 mai 2019, que la rédaction de compromis qui avait été trouvée lors de la nouvelle lecture du projet de loi PACTE, en accord avec la filière, le Gouvernement et les parlementaires tombait sous le joug de l'article 45 de la Constitution. Cette décision implique ainsi l'entrée dans le droit commun de l'article 83 précédemment mentionné.

Des conséquences industrielles majeures s'annoncent donc pour 2022. Selon les estimations de la filière concernée, la mesure impacte dix-neuf sites et 2 700 emplois répartis pour la plupart dans des territoires économiquement déjà fragilisés. Par ailleurs, la disposition entrainera des délocalisations au mieux au sein de l'Union européenne au pire sur le continent asiatique, signe de l'inefficacité d'unetelle mesure alors même que les entreprises concernées investissent régulièrement dans de nouvelles lignes de production, dans le domaine de la sécurité ou encore de la réduction de l'empreinte sur l'environnement en cohérence avec le tournant agroécologique.

La France ne peut se résoudre à une désindustrialisation de plus dans un secteur qui demeure pourtant majeur pour l'agriculture française. Pour mémoire, ces mêmes entreprises sont les principaux acteurs de la mise sur le marché de produits biocontrôle ou dévolus à l'agriculture biologique. L'agriculture française serait en passe de se couper d'une expertise essentielle pour son avenir.

Il lui demande donc les mesures prises par le ministère de l'économie pour remédier à cette catastrophe sociale et industrielle sur le point de se produire.

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Réponse du Ministère de l'économie et des finances publiée le 17/10/2019

L'article 83 de la loi n° 2018-938 du 30 octobre 2018 pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous (dite loi EGAlim) prévoit l'interdiction, à compter du 1er janvier 2022, de la production, du stockage et de la circulation de produits phytopharmaceutiques contenant des substances actives non approuvées dans l'Union européenne pour des raisons liées à la protection de la santé humaine, animale ou de l'environnement. L'évaluation, réalisée depuis l'adoption de la loi EGAlim, a identifié un millier d'emplois répartis sur onze sites de fabrication de produits phytopharmaceutiques, dont celui de Gravelines, qui sont susceptibles d'être touchés, auxquels s'ajoutent environ 1 500 emplois dans le secteur semencier français qui est impacté par l'interdiction d'acheminement et de stockage des produits utilisés pour le traitement des semences destinées à l'export. Cette disposition pourrait conduire à mettre en cause tout ou partie de l'activité de ces sites, de même que celle des sous-traitants et, plus largement, du tissu économique des territoires concernés. En vue d'atténuer les conséquences de l'article 83 et de concilier les intérêts économiques et environnementaux, une disposition avait été introduite dans la loi PACTE (article 18) pour reporter l'interdiction au 1er janvier 2025 et l'assortir d'une dérogation pour les producteurs ayant conclu une convention de transition avec l'État. Cet article a été censuré par le Conseil constitutionnel, dans sa décision n° 2019-781 DC du 16 mai 2019, au motif qu'il ne présentait pas de lien, même indirect, avec les dispositions qui figuraient dans le projet de loi initial et qu'il avait ainsi été adopté selon une procédure contraire à la Constitution. Le ministère de l'économie et des finances, est mobilisé pour soutenir la transition écologique des entreprises du secteur en vue de trouver des relais de croissance par le développement de solutions de substitution, notamment de bio contrôle, et plus largement par l'innovation et la mise sur le marché de produits ayant un moindre impact sur la santé et l'environnement.

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