Question de M. GREMILLET Daniel (Vosges - Les Républicains) publiée le 22/08/2019

M. Daniel Gremillet interroge M. le ministre de l'action et des comptes publics sur le projet gouvernemental visant à réduire les avantages fiscaux consentis aux mécènes et sur ses conséquences sur la redistribution aux plus démunis.

À la suite de la publication du rapport de la Cour des comptes sur le mécénat, le 28 novembre 2018, s'est constitué un groupe de travail à l'Assemblée nationale visant à proposer une réforme du mécénat dans la perspective du projet de loi de finances pour 2020. Plusieurs pistes seraient explorées allant de la réduction du taux de 60 % à 50 %, voire 40 % de déduction fiscale au plafonnement du montant des dons déductibles à 10 millions d'euros, soit un avantage maximal de 6 millions d'euros. Une autre possibilité, enfin, serait de plafonner l'avantage fiscal lui-même à 1 ou 2 millions d'euros.

Or, les associations recevant et distribuant des dons alimentaires : la Banque alimentaire, les Restos du cœur, le Secours populaire, la Croix-Rouge française sont inquiètes d'autant que les mesures annoncées par le président de la République en décembre 2018 pour répondre à la crise des « gilets jaunes », et les baisses d'impôt de 5 millions d'euros dévoilées, le 25 avril 2019, seront financées par la diminution des avantages fiscaux consentis aux entreprises, notamment celui pour les actions de mécénat.

Crée par la loi n° 2003-709 du 1er août 2003 relative au mécénat, aux associations et aux fondations, ce régime fiscal du mécénat d'entreprise fonctionne parfaitement et permet, dans ce cas précis, d'organiser la redistribution de vivres aux plus démunis. Il prévoit une réduction d'impôt de 60 % dans la limite de 0,5 % du chiffre d'affaires.

Le mécénat a permis, en 2018, aux seules Banques alimentaires, de sauver du gaspillage plus de 73 000 tonnes de denrées. Elles ont, ainsi, distribué plus de 226 millions de repas à 2 millions de personnes en France, soit à près d'un bénéficiaire de l'aide alimentaire sur deux.

Le don provient, généralement, des grandes et moyennes surfaces mais également des industriels et des producteurs. Les structures d'aide alimentaire ont, déjà, connu une baisse des dons à la suite de la suppression de l'impôt sur la fortune et de la déduction fiscale qui lui était liée. Cette évolution nationale arrive au moment où le projet de budget européen pour la période 2021-2027 envisage de diviser par près de deux l'aide alimentaire, laquelle passerait de 3,8 à 2 milliards d'euros.

Ainsi, il lui demande de bien vouloir lui indiquer si les changements fiscaux envisagés entendent distinguer les bénéficiaires et ne concerneront pas le don en nature (alimentaire, textile, produits d'hygiène) d'autant que le don alimentaire s'inscrit dans la stratégie de lutte contre le gaspillage alimentaire inscrit aussi bien dans le paquet économie circulaire au niveau européen que dans le feuille de route sur l'économie circulaire et dans les annonces du président de la République au niveau national.

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Transmise au Ministère de l'économie et des finances


Réponse du Ministère de l'économie et des finances publiée le 17/10/2019

Aux termes de l'article 238 bis du code général des impôts (CGI), les versements effectués par les entreprises assujetties à l'impôt sur le revenu ou à l'impôt sur les sociétés au profit d'œuvres ou d'organismes d'intérêt général ayant un caractère philanthropique, éducatif, scientifique, social, humanitaire, sportif, familial, culturel ou concourant à la mise en valeur du patrimoine artistique, à la défense de l'environnement naturel ou à la diffusion de la culture, de la langue et des connaissances scientifiques françaises ouvrent droit à une réduction d'impôt égale à 60 % de leur montant, pris dans la limite de 10 000 € ou de 5 pour mille du chiffre d'affaires lorsque ce dernier montant est plus élevé, étant précisé que le plafond de 10 000 € ne peut être appliqué qu'aux versements effectués au cours des exercices clos à compter du 31 décembre 2019. Le projet de loi de finances pour 2020 propose d'abaisser le taux de la réduction d'impôt de 60 % à 40 % pour les versements supérieurs à deux millions d'euros. Par exception, les versements effectués au profit d'organismes sans but lucratif qui procèdent à la fourniture gratuite de repas à des personnes en difficulté, qui contribuent à favoriser leur logement ou qui procèdent, à titre principal, à la fourniture gratuite de certains soins à des personnes en difficulté demeureront éligibles à une réduction d'impôt au taux de 60 %, quel que soit leur montant. En outre, il est proposé de limiter la prise en compte dans l'assiette de la réduction d'impôt, pour chaque salarié mis à disposition par une entreprise, des rémunérations versées et charges sociales y afférentes à trois fois le montant du plafond mentionné à l'article L. 241-3 du code de la sécurité sociale. Ces mesures répondent aux préoccupations exprimées dans le rapport de la Cour des comptes sur le soutien public au mécénat des entreprises de novembre 2018. La Cour a, en effet, critiqué l'augmentation de cette dépense fiscale dont le coût a été multiplié par dix, passant de 90 millions d'euros (M€) en 2004 à 902 M€ en 2017 et souligné que le mécénat se concentrait fortement sur les très grandes entreprises – les vingt-quatre premiers bénéficiaires de l'avantage fiscal représentaient à eux seuls 44 % du montant de la créance fiscale en 2016. Les mesures proposées dans le projet de loi de finances, qui ne concerneront dans les faits qu'un petit nombre de grandes entreprises, devraient ainsi permettre de maîtriser l'augmentation de cette dépense fiscale, sans affecter le soutien aux organismes d'intérêt général qui apportent une aide aux personnes en difficulté.

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