Question de M. PAUL Philippe (Finistère - Les Républicains) publiée le 19/09/2019

M. Philippe Paul souhaite appeler l'attention de Mme la ministre des armées sur la coopération en matière de défense et de sécurité entre la France et le Royaume-Uni telle que définie dans les « accords de Lancaster House » signés le 2 novembre 2010 à Londres. Ces accords étaient accompagnés d'une déclaration dite « déclaration de Downing Street » qui portait sur plusieurs domaines de coopération. Dans le domaine opérationnel, il était notamment prévu la mise en place d'une force commune expéditionnaire interarmées et d'une force aéronavale de projection intégrée, offrant des possibilités d'interopérabilité entre les porte-avions français et britanniques. Dans le domaine capacitaire, il était, entre autres, envisagé un partenariat de soutien technique au transporteur stratégique A400M, le déploiement de moyens technologiques supplémentaires dans la guerre contre les mines sous-marines ou encore le développement d'une nouvelle génération de drones d'observation MALE (moyenne altitude et longue endurance). Il la remercie de lui faire connaître l'état de réalisation de l'ensemble des projets de coopération ainsi arrêtés dans la déclaration.

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Réponse du Ministère des armées publiée le 09/01/2020

S'agissant du domaine opérationnel, le cycle 2019-2020 marquera l'atteinte de la pleine capacité opérationnelle de la force conjointe expéditionnaire franco-britannique (CJEF) sur tout le spectre des missions envisagées par son concept d'emploi. La réflexion a débuté sur la dynamique à insuffler après 2020, capitalisant sur les travaux de construction de la CJEF entrepris depuis la signature des accords de Lancaster House. En revanche, la mise en œuvre d'une force aéronavale de projection intégrée a été affectée par des choix structurants divergents (systèmes de catapultes, types d'avions…) et le report de l'acquisition des porte-avions britanniques. Néanmoins, les deux marines ont en permanence le souci d'intégration et d'interopérabilité dans le cadre des déploiements de leurs groupes aéronavals. Dans ce contexte, la recherche d'interactions et d'escortes croisées lors des déploiements de groupes aéronavals est systématique, de même que la participation de bâtiments d'un pays à la préparation opérationnelle d'un groupe aéronaval de l'autre pays. Par ailleurs, la France apporte son aide à la montée en puissance des porte-avions britanniques. Concernant le domaine capacitaire, différents projets ont été lancés après Lancaster House. 1) Dans le secteur des missiles, la vision stratégique à long terme « One Complex Weapons » a été élaborée afin de mettre en place d'ici 2020 un secteur missilier franco-britannique basé sur un maître d'œuvre industriel unique. Ce projet devra offrir une chaîne d'approvisionnement commune et rationalisée s'appuyant sur les filiales française et britannique de MBDA, dotées d'une gouvernance collective. Dans ce cadre, en octobre 2016, un accord intergouvernemental visant à encadrer la création de « centres d'excellence » au sein de MBDA, répartis en France et au Royaume-Uni, est entré en vigueur. Il entérine le concept de dépendance mutuelle appelé de ses vœux par les accords de Lancaster House. Cette démarche s'appuie sur des projets concrets ou « test case » dont font partie les projets de Futur Missile Antinavire / Futur Missile de Croisière (FMAN/FMC), de missile antinavire léger FASGW(H)/ANL, et de rénovation à mi-vie des missiles SCALP-EG et Storm Shadow. Il est prévu d'étendre progressivement cette démarche à l'ensemble des familles de missiles, y compris, à terme, à celle des missiles de défense aérienne. 2) Le projet franco-britannique MMCM (Maritime Mine Counter-Measures), s'inscrit pour la France dans le cadre du programme SLAMF (système de lutte anti mines futur) et pour le Royaume-Uni dans le cadre du programme MHC (Mine countermeasure and Hydrographic Capability), qui visent tous deux au renouvellement des capacités de guerre des mines. Le projet conjoint MMCM porte sur la définition, la réalisation et la qualification de deux démonstrateurs d'un système de drones navals (un par Nation). La livraison de deux prototypes est prévue en avril 2020. 3) Le projet Future Combat Air System-Demonstration Phase (FCAS DP), initié en 2010, visait à préparer une filière souveraine et compétitive à l'échelle européenne dans l'aéronautique de combat et à réaliser deux démonstrateurs technologiques de drones de combat. Le Royaume-Uni n'a toutefois pas souhaité s'engager dans le programme de développement du FCAS DP à l'issue de la phase de faisabilité accordant la priorité à l'initiation du programme Tempest. Le projet a donc été réorienté vers des travaux technologiques de recherche impliquant les six industriels déjà mobilisés (BAES, Dassault, Leonardo, Rolls Royce, Safran, Thalès) qui pourront constituer les fondements des systèmes de combat futurs. Par ailleurs, bien que le Royaume-Uni ne fasse pas partie des nations ayant pris part au projet EURO MALE lancé par l'organisation conjointe de coopération en matière d'armement (OCCAr) en 2016, l'acquisition par la France de plusieurs systèmes Reaper, également en service dans les forces britanniques, a ouvert des perspectives d'échanges pour étudier les synergies possibles sur ce système, notamment en termes de navigabilité, d'interopérabilité et d'autres thèmes plus génériques tels que le retour d'expérience et le soutien en service. 4) Le programme multilatéral A400M, au sein duquel la France et le Royaume-Uni sont également engagés, a vu la signature du contrat dit de Rebaselining, ayant pour objectif de revoir le calendrier de livraison des appareils et de celui des mises à niveau des appareils déjà livrés, ainsi que du contrat de soutien global dit « étape 2 », visant l'acquisition conjointe de pièces de rechange. En outre, la France et le Royaume-Uni disposent également d'une aptitude croisée à réaliser des opérations de maintenance et travaillent, aux côtés des autres partenaires, à la mise en place d'un mécanisme d'incitation à la réduction du coût de soutien moteur. 5) Sur le sujet des communications militaires par satellite (SATCOM), bien que la France et le Royaume-Uni préparent indépendamment la succession de leurs constellations de satellites actuelles (Syracuse 3 et Skynet 5), un intérêt commun a été identifié pour engager des échanges d'informations notamment dans le cadre du maintien des constellations actuelles. La France et le Royaume-Uni se coordonnent également, en lien avec les États-Unis et l'Italie, pour répondre ensemble aux besoins futurs de l'OTAN en matière de SATCOM. 6) Dans le domaine terrestre, le canon de 40mm CTA (40 CTA), réalisé dans le cadre d'une coopération franco-britannique par CTA international, est en production pour équiper les véhicules blindés britanniques AJAX et WARRIOR modernisés. 7) En matière de recherche et technologie (R&T), le portefeuille de projets communs comprend actuellement une quinzaine d'arrangements techniques. Cette coopération repose sur des investissements dans le domaine des missiles, des drones et des senseurs (radar, optronique, guerre électronique) et sur le programme de thèses franco-britanniques qui a pour objectif de mettre en relation des laboratoires de recherche de défense français et britanniques et soutenir l'innovation. Au vu de son déroulement très satisfaisant et bien coordonné entre la France et le Royaume-Uni, les deux pays ont décidé de prolonger l'accord technique qui fixe le cadre de cette coopération jusqu'en 2025. 8) Les plans d'investissements étatiques en matière d'essais et d'expertise sont échangés depuis 2012 avec l'objectif d'identifier des projets de coopération et optimiser nos investissements. La coopération en matière d'essais se déroule principalement sur le thème hydrodynamique, sur le thème des essais en vol et sur le thème de l'aéro-tranportabilité. Les échanges franco-britanniques devraient s'intensifier pour soutenir les travaux de qualification dans le cadre des projets en coopération (FMAN/FMC, MMCM). Au-delà, nous avons commencé à partager avec nos amis britanniques un menu riche de propositions pour renforcer encore notre coopération bilatérale, à l'occasion des 10 ans de Lancaster House.

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