Question de Mme de LA GONTRIE Marie-Pierre (Paris - SOCR) publiée le 26/09/2019

Mme Marie-Pierre de la Gontrie attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur la suppression annoncée de la carte de retrait de l'allocation de demandeur d'asile (ADA).

Le 23 juillet 2019, l'office français de l'immigration et de l'intégration annonçait la suppression prochaine de la carte de retrait octroyée aux demandeurs d'asile et sa transformation en carte de paiement à compter du 5 novembre 2019.

Les associations qui les accompagnent s'inquiètent à juste titre des conséquences désastreuses de cette mesure sur les conditions d'accueil et pour la vie quotidienne des demandeurs d'asile.

Par un communiqué en date du 16 septembre 2019, plusieurs d'entre elles (le centre d'action social protestant, Coallia, la fédération des acteurs de la solidarité, forum-réfugiés-Cosi, France terre d'asile) ont dénoncé une réforme précipitée et inadaptée.

Les demandeurs d'asile ne pourraient ainsi plus disposer d'argent liquide, toutes leurs dépenses (hébergement, alimentation, transports) devant être effectuées directement par carte bancaire auprès d'enseignes acceptant ce mode de paiement. Cette impossibilité de retirer des espèces pour régler les petits achats du quotidien va compliquer de manière certaine les conditions de vie de ces populations déjà fragilisées, a fortiori si les opérations réalisées avec cette nouvelle carte sont facturées 50 centimes d'euros au-delà de 25 opérations par mois.

L'interdiction qui est faite aux demandeurs d'asile de travailler les rend dépendants de cette allocation de subsistance dont le budget est régulièrement sous-estimé. Son montant (6,80€ par jour pour un adulte) est faible et permet à peine d'assurer leur subsistance.

On ne peut que s'interroger sur le bien-fondé d'une telle mesure aux bénéfices plus qu'incertains. La politique d'accueil des demandeurs d'asile mérite mieux que de basses considérations budgétaires.

Aussi elle souhaiterait connaitre les motivations qui sous-tendent cette réforme. Elle demande par ailleurs que cette mesure soit suspendue dans l'attente d'une réelle concertation avec les acteurs associatifs qui prennent en charge et accompagnent les demandeurs d'asile au quotidien.

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Transmise au Ministère de l'intérieur


Réponse du Ministère de l'intérieur publiée le 17/09/2020

La mise en place d'une carte de paiement, sans possibilité de retrait, permet, en limitant la circulation d'argent liquide, d'éviter que l'allocation pour demandeur d'asile serve à d'autres fins que celles d'assurer la subsistance du demandeur d'asile, au moyen de dépenses courantes sur le territoire national. Ce faisant, les risques de fraudes et d'abus, liés à une trop grande liquidité de l'allocation, seront mieux maîtrisés. Avant sa généralisation au territoire métropolitain, cette mesure a fait l'objet d'une expérimentation durant plusieurs mois en Guyane : les retours ont été positifs et ont montré que la mise en place d'une carte de paiement en lieu et place d'une carte de retrait ne dégradait en rien les conditions de vie des demandeurs d'asile. En outre, le Gouvernement est à l'écoute des associations qui ont été reçues au ministère de l'intérieur et qui participent à un comité de suivi de la réforme pour garantir que celle-ci ne génère pas de difficulté. L'entrée en vigueur de la mesure, initialement prévue en septembre 2019, a été retardée afin de permettre aux opérateurs qui en étaient dépourvus de s'équiper de terminaux de paiement électronique (TPE) et d'assurer une information appropriée des demandeurs. De surcroît, un aménagement important du dispositif a été consenti avec le déplafonnement total du nombre de transactions autorisées. De la sorte, quel que soit le montant de leur transaction, les demandeurs d'asile peuvent continuer à acheter leurs produits de première nécessité dans les supermarchés et les commerces dotés de TPE. Le bilan réalisé par l'office français de l'immigration et de l'intégration a d'ailleurs confirmé la possibilité, pour les demandeurs d'asile, de procéder à de petits achats avec une carte « 100 % paiement », 44 % des transactions ayant porté sur un montant inférieur à 10 € en novembre 2019. De la même manière, alors que les associations craignaient que les demandeurs d'asile hébergés dans des zones rurales moins bien pourvues en commerces ne puissent disposer librement de leur allocation, il ressort de ce bilan que la carte de paiement a été largement utilisée sur l'ensemble du territoire métropolitain, selon une répartition régionale correspondant à celle des allocataires. Enfin, la démonétisation ne méconnaît pas le fait que l'accès des demandeurs d'asile aux espèces demeure utile dans leur vie quotidienne. Ainsi, la pratique du cashback, qui est réservée aux seuls commerçants par le code monétaire et financier (ce qui limite de facto le risque d'abus), permet de récupérer jusqu'à 60 euros en espèces dans le cadre d'un paiement par carte d'un euro minimum. La mise en œuvre de cette mesure continue de faire l'objet d'un suivi attentif. Un groupe de travail réunissant des associations d'horizons divers accompagnant les demandeurs d'asile a été mis en place. Il suit avec attention la mise en œuvre de cette mesure. Le cas échéant, le dispositif pourra être adapté de façon à résoudre les difficultés opérationnelles qui pourraient être signalées.

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