Question de Mme NOËL Sylviane (Haute-Savoie - Les Républicains) publiée le 17/10/2019

Mme Sylviane Noël attire l'attention de M. le secrétaire d'État, auprès du ministre de l'action et des comptes publics, sur la situation délicate dans laquelle se retrouvent aujourd'hui de nombreux établissements et communes qui peinent à recruter du personnel qualifié face au coût élevé de la vie en Haute-Savoie.

Vivre et travailler en Haute-Savoie coûte cher, c'est une réalité qui pose aujourd'hui de sérieux problèmes sur le marché de l'emploi en Haute-Savoie, tous secteurs d'activité confondus, public comme privé.

Depuis des années, les entreprises, les collectivités, les organisations syndicales et associatives ont déjà tiré la sonnette d'alarme, relayées par nombre de parlementaires, en vain. Pourtant, ce coût élevé de la vie complique gravement le recrutement du personnel à toutes les échelles.

Avec plus de 10 000 nouveaux habitants chaque année en Haute-Savoie, il devient compliqué de maintenir certains services à la population pourtant vitaux, par manque de candidats. En effet, les personnes qui arrivent du reste de la France renoncent au bout de quelques mois à rester en poste du fait de leur qualité de vie non satisfaisante au regard du prix élevé de leur logement et du coût des dépenses quotidiennes, supérieur à la moyenne nationale.

C'est principalement ce motif du « coût de la vie », et notamment du logement, qui empêche les fonctionnaires et les salariés de s'installer durablement. Dans tous les secteurs d'activité, le taux de vacance de postes est critique y compris dans les trois versants de la fonction publique et surtout dans fonction publique hospitalière.

La proximité avec la Suisse voisine, notamment dans le Genevois et le Chablais, amplifie encore ce phénomène en particulier pour les professions du secteur de la santé, car les structures françaises ne sont malheureusement pas en mesure de s'aligner sur les salaires perçus en Suisse. Elles se retrouvent totalement impuissantes à garder leurs salariés qui décident d'aller travailler de l'autre côté de la frontière…

À titre d'exemple, cet été cent cinquante lits d'établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) ont été fermés dans le département, faute de personnel. L'octroi d'une prime de vie chère ou indemnité de résidence en Haute-Savoie se révèle aujourd'hui incontournable.

Concernant cette indemnité de résidence, elle est aujourd'hui versée selon le zonage de la commune. Ce zonage prend en considération la tension du marché immobilier local comme critère de classement. À ce titre, de nombreuses communes de la Haute-Savoie, et notamment celle de Chamonix-Mont-Blanc, mériteraient d'être classées en zone B1 au lieu de leur classement actuel en zone B2. Ainsi, un appartement à Chamonix coûte, à ce jour, 6 454 € du m2 et 8 647 € pour une maison. Bloquée en zone B2, la commune est ainsi privée de nombreuses aides à l'investissement locatif intermédiaire notamment le dispositif fiscal de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) à taux réduit qui s'applique aux logements intermédiaires portés par les investisseurs institutionnels en zone A et B1.

Elle lui demande pourquoi refuser de classer cette commune en zone B1 alors que tous les critères sont remplis et que trente et une communes du département ont déjà fait l'objet d'un sur classement.

De toute évidence, ces difficultés à se loger contribuent à rendre la vie chère en Haute-Savoie, dans un contexte déjà difficile et marqué par des inégalités de service dans ses territoires ruraux, montagnards et frontaliers.

Elle souhaiterait donc savoir si l'État compte permettre au département d'être enfin classé en zone de vie chère, ce qui permettrait de mieux recruter grâce au versement de cette prime ou d'indemnité de résidence. Enfin, elle voudrait connaître ses intentions en ce qui concerne la demande de classement émise par la commune de Chamonix-Mont-Blanc en zone B1.

- page 5196

Transmise au Ministère de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales – Ville et logement


Réponse du Ministère de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales – Ville et logement publiée le 13/11/2019

Réponse apportée en séance publique le 12/11/2019

Mme Sylviane Noël. Monsieur le ministre, mes chers collègues, vivre et travailler en Haute-Savoie coûte cher, c'est une réalité qui pose aujourd'hui de sérieux problèmes pour le marché de l'emploi de ce département, tous secteurs d'activité confondus, publics comme privés.

Avec plus de 10 000 nouveaux habitants chaque année en Haute-Savoie, il devient compliqué de maintenir certains services à la population, pourtant vitaux, par manque de candidats. Les agents qui arrivent du reste de la France renoncent au bout de quelques mois à rester en poste du fait du coût élevé de la vie, bien supérieur à la moyenne nationale.

C'est principalement ce motif du « coût de la vie », notamment du logement, qui empêche les fonctionnaires et les salariés de s'installer durablement. Dans tous les secteurs d'activité, le taux de vacance de postes est critique, particulièrement dans la fonction publique hospitalière.

La proximité avec la Suisse, notamment dans le Genevois et le Chablais, amplifie encore ce phénomène, en particulier pour les professions du secteur de la santé en raison de l'attractivité des salaires suisses.

À l'heure où je vous parle, 181 lits d'Ehpad sont gelés dans le département, faute de personnel. L'octroi d'une prime de vie chère ou d'une indemnité de résidence en Haute-Savoie se révèle ainsi indispensable pour répondre au moins en partie à cette problématique.

De même, il conviendrait de faire évoluer le zonage ABC affecté à de nombreuses communes de notre département, qui se révèle inadapté. Ce zonage prend en considération la tension du marché immobilier local comme critère de classement. Or nombre de communes sont classées en zone B2 alors qu'elles mériteraient un classement en zone B1.

À titre d'exemple, à Chamonix, le coût moyen du mètre carré s'élève à 6 454 euros pour un appartement et 8 647 euros pour une maison. Bloquée en zone B2, la commune est ainsi privée de nombreuses aides à l'investissement locatif intermédiaire, notamment du dispositif fiscal de TVA à taux réduit qui s'applique aux logements intermédiaires portés par les investisseurs institutionnels en zone A et B1.

Son caractère doublement frontalier, hautement touristique et très attractif d'un point de vue démographique fait incontestablement de la Haute-Savoie un territoire atypique. La mise en œuvre d'un zonage et de dispositifs adaptés aux particularités de ce territoire est incontournable, et constitue un enjeu majeur pour le maintien des populations, le dynamisme économique et la vitalité des services publics.

Je souhaiterais donc connaître les intentions du Gouvernement sur ces sujets.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Julien Denormandie, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement. Madame la sénatrice, je partage votre constat : sur un certain nombre de territoires, le logement empêche notamment l'installation de celles et ceux qui travaillent, accompagnent, apportent des services publics à tous les habitants de ces territoires.

Je suis également d'accord sur un second point : il faut une politique du logement qui permette de répondre à cette problématique. On le constate dans beaucoup de cas, c'est par le logement qu'une solution peut être trouvée, comme vous l'avez très justement rappelé.

Vous proposez de faire évoluer le zonage. J'ai une conviction : la politique du logement est beaucoup trop centralisée et elle doit être davantage territorialisée. C'est un fait, depuis deux ans et demi que je suis ministre chargé de la ville et du logement, je vis avec ce zonage. Néanmoins, vous l'aurez remarqué, j'ai fait en sorte que les nouveaux dispositifs que j'ai créés, comme le Denormandie ancien, ne soient pas zonés. Ce sont donc les communes qui mettent en place les opérations de revitalisation du territoire qui seront directement éligibles à ce dispositif. La réalité territoriale est avant tout connue par les élus locaux ou les agents qui travaillent sur les communes.

Le projet de loi de finances que j'aurai l'honneur de vous présenter dans quelques jours prévoit une première expérimentation pour arrêter le zonage dans la région Bretagne. Il s'agit de donner la possibilité de déterminer au niveau régional, en faisant de la dentelle, les fameuses classifications que vous avez rappelées. Après cette expérimentation, mon objectif est bien évidemment de généraliser ce système.

Enfin, le dernier élément qui doit aussi faire l'objet de toute notre attention est la production de logements dits « abordables ». Cela passe évidemment par la production de logements sociaux. À ce titre, il importe de faire preuve de la plus grande fermeté dans l'application de la loi SRU et d'accompagner l'ensemble des bailleurs sociaux, ce que nous faisons activement aujourd'hui. Cela passe également par la production de logements à l'accession abordables. Je pense, notamment, aux initiatives prises par plusieurs communes dans votre département, madame la sénatrice, via les organismes fonciers solidaires, qui permettent de produire du logement abordable à l'acquisition.

Vous avez raison de soulever cette question. La solution, à mon sens, passe par une politique territorialisée avec un seul objectif : produire des logements abordables.

- page 15102

Page mise à jour le