Question de M. MOUILLER Philippe (Deux-Sèvres - Les Républicains) publiée le 31/10/2019

M. Philippe Mouiller attire l'attention de Mme la ministre du travail sur la poursuite et l'extension du dispositif « territoires zéro chômeur de longue durée », créé par la loi n° 2016-231 du 29 février 2016 d'expérimentation territoriale visant à résorber le chômage de longue durée, par l'adoption d'une deuxième loi d'expérimentation. D'ores et déjà, ce dispositif innovant, expérimenté sur dix territoires, a fait la preuve de son efficacité. Ainsi, aujourd'hui plus de 800 personnes durablement privées d'emploi ont retrouvé un emploi utile et supplémentaire, grâce à l'activation des dépenses passives et la mobilisation de l'ensemble des acteurs locaux d'un territoire donné. Alors que le président de la République avait, en septembre 2018, annoncé l'extension de l'expérimentation à cinquante nouveaux territoires lors de la présentation de la stratégie de lutte contre la pauvreté, que plus d'une centaine de territoires se sont déclarés volontaires et que plus de deux cents parlementaires soutiennent cette initiative, la deuxième loi d'expérimentation n'est toujours pas inscrite à l'ordre du jour du Parlement et reste suspendue à la présentation de deux rapports en cours de réalisation l'un par un comité scientifique indépendant, l'autre par l'inspection générale des finances et celle des affaires sociales. Compte tenu de l'urgence à agir pour les personnes les plus éloignées de l'emploi du fait de la durée de chômage, de leur faible niveau de qualification ou de leur degré de handicap, il lui demande de bien vouloir lui préciser dans quel délai la deuxième loi d'expérimentation tant attendue sera présentée au Parlement.

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Réponse du Secrétariat d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé publiée le 15/01/2020

Réponse apportée en séance publique le 14/01/2020

M. Philippe Mouiller. Ma question s'adresse à Mme la ministre du travail.

Le dispositif « Territoires zéro chômeur de longue durée », créé par la loi du 29 février 2016 d'expérimentation territoriale visant à résorber le chômage de longue durée, a d'ores et déjà fait la preuve de son efficacité. Il s'inscrit dans le préambule de notre Constitution, qui dispose que « chacun a le devoir de travailler et le droit d'obtenir un emploi ».

Ainsi, sur les 1 849 volontaires retenus pour expérimenter ce nouveau dispositif, plus de 850 personnes durablement privées d'emploi ont été embauchées dans le cadre d'un contrat de travail classique ou ont retrouvé un emploi. Plus de 20 % d'entre elles avaient un handicap qui rendait leur insertion professionnelle encore plus difficile.

De plus, cette expérimentation a un effet d'émulation sur chacun des territoires concernés, comme j'ai pu le constater à Mauléon, dans mon département des Deux-Sèvres.

Madame la secrétaire d'État, je suis étonné que le projet de loi d'extension de ce dispositif ne soit toujours pas inscrit à l'ordre du jour du Parlement.

Le Président de la République avait annoncé en septembre 2018, lors de la présentation de la stratégie de lutte contre la pauvreté, l'extension de l'expérimentation à 50 nouveaux territoires. Il a également insisté le 1er mars 2019, à Bordeaux, lors d'un grand débat, sur l'urgence d'étendre le dispositif.

Plus d'une centaine de territoires se sont déjà déclarés volontaires et sont dans l'attente de l'adoption de ce texte. Par ailleurs, 200 parlementaires soutiennent cette initiative et la Belgique s'apprête à expérimenter le projet.

Le président du Sénat lui-même vient de saisir le CESE (Conseil économique, social et environnemental) d'une demande d'avis sur la prévention et la réduction du chômage de longue durée, faisant référence à cette expérience.

L'extension du dispositif restait suspendue aux conclusions de rapports qui, aujourd'hui, sont connues. Ma question est simple : dans quel délai la deuxième loi d'expérimentation tant attendue sera-t-elle présentée au Parlement ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé. Monsieur le sénateur, je vous prie de bien vouloir excuser l'absence de Muriel Pénicaud, retenue dans le cadre des concertations sur les retraites.

L'essaimage, ainsi que l'ouverture du dispositif « Territoires zéro chômeur de longue durée », est une mesure de la stratégie de prévention et de lutte contre la pauvreté.

Lutter contre le chômage de longue durée constitue l'une des priorités du Gouvernement et des réformes qu'il mène depuis deux ans.

S'agissant de l'expérimentation territoriale visant à résorber le chômage de longue durée prévue par la loi du 29 février 2016, elle a été lancée de manière opérationnelle en janvier 2017. Nous en sommes donc à trois années tout juste de mise en œuvre.

Depuis 2017, douze entreprises à but d'emploi (EBE) ont été créées sur les dix territoires qui ont été retenus après appel à projets. Ce sont 900 personnes privées d'emploi qui ont pu être recrutées, dont 750 sont actuellement salariées. Je puis vous assurer à ce titre que le ministère du travail apporte son plein soutien à cette démarche expérimentale.

Ainsi, 1 000 équivalents temps plein supplémentaires seront financés en 2020, en cohérence avec la stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté.

La contribution totale de l'État s'élève à 28,5 millions d'euros dans le cadre de la loi de finances initiale pour 2020, soit une progression de 6,13 millions d'euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2019.

Cette expérimentation est intéressante, car elle permet de tester des modalités innovantes de lutte contre le chômage de longue durée. Comme toute expérimentation, il est désormais important de prendre du recul pour l'évaluer et partager avec tous les acteurs un diagnostic.

C'est dans ce sens que Muriel Pénicaud a réuni lundi 25 novembre dernier Laurent Grandguillaume, l'association qui porte l'expérimentation, le comité scientifique qui a remis son évaluation intermédiaire et les inspecteurs de l'IGAS (inspection générale des affaires sociales) et de l'IGF (inspection générale des finances) qui ont conduit une évaluation économique. Les rapports, comme vous l'avez rappelé, sont maintenant publics. Lors de cette réunion, chacun a pu partager ses conclusions. Elles convergent pour une grande part, qu'il s'agisse des fragilités comme des points positifs.

C'est pourquoi Muriel Pénicaud a demandé à l'association qui porte l'expérimentation et à ses services de poursuivre le travail de diagnostic – une réunion a eu lieu en décembre – pour permettre, dans les prochaines semaines, de faire des annonces sur les suites à donner à cette expérimentation.

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Mouiller, pour la réplique.

M. Philippe Mouiller. Madame la secrétaire d'État, je vous remercie de votre réponse. Je prends bonne note de votre volonté affichée de soutenir cette expérimentation, ce que vous avez confirmé par les travaux menés.

J'ai également relevé les chiffres de mobilisation lors du budget. Je rappelle néanmoins que la demande vise avant tout à étendre le nombre des territoires concernés, même si force est de constater que les engagements financiers sont de plus en plus importants sur la durée. En effet, puisque l'expérimentation fonctionne, des recrutements ont lieu dans les différentes EBE.

J'ai pris bonne note de votre programmation. Vous avez fait référence à la fois aux réunions de bilan et aux réunions de concertation. Je connais bien l'association concernée : les diagnostics sont prêts. Je sais aussi que les textes sont déjà analysés. Il y a donc des allers-retours. Toutes les conditions sont donc sur la table pour décider par voie législative de l'extension de cette expérimentation.

Il est important de continuer dans cette dynamique : une rupture, une interrogation ou des non-réponses pourraient avoir des conséquences dramatiques sur les territoires. Nous avons un outil qui fonctionne. Les retours et le bilan sont plutôt favorables, la mesure ayant une incidence directe sur l'emploi. Au vu de l'état d'esprit du Gouvernement, il y a urgence à accélérer le déploiement du dispositif…

Mme la présidente. Il faut conclure !

M. Philippe Mouiller. … dans les mois et les semaines à venir.

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